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MoyenAtlas
Bois de chauffage et préservation des ressources forestières : l'éternel dilemme …
Publié dans L'opinion le 24 - 12 - 2011

La chute du mercure ces derniers temps est remarquable dans la fumée qui échappe des cheminées à Azrou, Ifrane, El Hajeb, Midelt. Cheminées qui laissent imaginer des âtres brûlants. Les paysages sont magnifiques, la neige, de retour, toujours visible et persistante sur le Mont El Ayachi, est reposante. Encore faut-il que chaque habitant de ces régions ait le moyen de se procurer ces petites bûches, symbole de vie en pareille situation, à enfouir dans sa cheminée. Le drame d'Anfgou aura au moins servi à quelque chose. Cette année la vigilance est d'actualité et les projets engagés dans le cadre de l'INDH (Initiative Nationale pour le Développement Humain) ont permis de désenclaver plusieurs localités et surtout de doter ces localités d'infrastructures sanitaires de proximité.
Le lancement officielle de la 14ème campagne nationale de solidarité présidé par le Souverain, à Midelt, au cœur de l'Atlas, au Complexe intégré de formation et de commercialisation des produits de l'artisanat local et de l'orientation touristique, entre d'ailleurs dans cette optique de porter de l'aide là où on a le plus besoin. Midelt, jeune province, abrite des régions très pauvres, à Imilchil, et dans les hauteurs.
A l'instar donc d'autres régions montagneuses du Maroc, la région du Moyen Atlas a été affectée ces derniers jours par d'importantes perturbations climatiques donnant lieu à des précipitations et des chutes de neige qui ont sensiblement perturbé la circulation sur certaines routes nationales, régionales et surtout secondaires, en isolant complètement des villages du Moyen Atlas. La baisse de température qu'a connu dernièrement la région a accentué la souffrance des habitants, manquant d'équipement adéquat pour faire face à cet aléa climatique, surtout que l'enneigement et surtout les chutes de température ont touché encore une fois cette année une grande superficie s'étalant d'El Hajeb à Errachidia, Plusieurs provinces sont concernées (El Hajeb, Ifrane, Sefrou, Boulemane, Khénifra, Midelt et Errachidia).
Si l'enneigement cette année n'a pas posé de problèmes graves aux usagers de la route, étant donné que les jours d'enneigement, jusqu'à maintenant, n'ont pas dépassé quelques jours, nous sommes loin, très loin des 70 jours de neige effectifs d'il y a deux ans, une situation que les habitants de l'Atlas n'avaient pas connue depuis plus de trois décennies. La baisse de température, le mercure est descendu à -10 certaines nuits, a affecté de grandes couches de la population, qui souffre en silence, dignement, faisant face à des dépenses supplémentaires pour acquérir le bois de chauffage, adapter sa nourriture aux exigences du climat et faire face aux risques de rhumatismes et de pathologies accentuées par ce froid glacial.
Les premières doléances viennent des fonctionnaires. Des centrales syndicales multiplient leurs protestations pour amener les pouvoirs publics à reconnaître cet état de fait et à trouver une formule pour indemniser ceux qui travaillent dans les régions froides.« La lutte contre le froid a un prix qui désavantage tous les employés dans cette belle province par rapport aux autres. Le prix du bois de chauffage en hausse constante et ce n'est pas un luxe, c'est une nécessité. Ne doit-on pas donc indemniser ? » Nous a déclaré un responsable syndicale à Azrou qui se réjouit d'ailleurs des dernières décisions prises par le gouvernement d'indemniser les salariés exerçant dans des régions à climat pénible. « Le gouvernement a entériné une aide substantielle pour les fonctionnaires qui travaillent dans des conditions difficiles, y a-t-il des conditions pires que ce froid glacial ? »,renchérit un autre.
Plus loin, sur le route entre Azrou et Timhdite, les douars s'apparentent plus à une sorte de regroupements de personnes appartenant à une même "Phakhda", presque même famille d'une grande tribu. Ils sont généralement établis dans des zones rurales fortement enclavées dont les habitations sont situées à flanc de montagne. De plus en plus, les habitants des douars s'établissent dans des endroits là où des intérêts communs peuvent être exploités : des points d'eau, une mosquée, une école. D'une manière générale, les douars sont très difficiles d'accès. L'on y accède par des routes rocailleuses, des pistes mais généralement, sur cette partie de l'Atlas, les douars ne sont pas trop loin de la route nationale. Ce n'est généralement pas la route qui mène vers le douar qui pose un problème en période d'enneigement, mais c'est surtout lorsque les chutes de neiges sont assez importantes pour couper la route nationale. « Les cinq kilomètres de piste qui séparent le douar de la route ne nous ont jamais posé de problèmes, on peut les faire à dos de mulet et même à pieds même s'il neige, nous craignons plus la coupure de la route parce que c'est par là que nos approvisionnements et nos moyens de survie sont acheminés vers le douar et les habitations avoisinantes » nous a déclaré Haj Brahim, qui venait de traverser à dos de mulet. Depuis deux ans, les choses se seraient nettement améliorées, des équipes médicales viennent souvent rendre visite aux populations, à l'initiative des autorités locales et sanitaires et des associations, devenues très actives dans le région depuis le lancement de l'Initiative Nationale de Développement Humain. Les approvisionnements des populations en denrées de première nécessité sont assurés et la route n'a été coupée que quelques heures cette année.
Bakrite, la localité la plus enclavée d'Ifrane
Rendue désormais célèbre par les scandales liés à l'abatage clandestin des arbres, activité illicite très lucrative, des responsables des eaux ont été démis de leurs fonctions pour la cessation douteuse d'un marché de coupe de bois. Il y a deux ans, c'est un responsable à Ifrane qui a subi le même sort mais malheureusement l'hémorragie continue aggravant la situation des riverains des forêts. C'est sans doute l'enclavement de cette localité qui en fait un lieu de non droit pour des trafics de bois, surtout le cèdre, très convoité. 6 (six) douars vivent en autarcie dans cette localité qui culmine à une altitude de plus de 2000m. A 80 km d'Ifrane, Bakrite ne possède qu'un seul accès vers la route nationale 13 reliant Ifrane à Timhdite. Il ya deux ans, les habitants ont été approvisionnés par hélicoptère. L'enclavement et l'isolement des habitants ont duré une semaine. Cette année, la route a été rouverte le jour même. Deux difficultés majeures dans le traitement du déneigement dans cette localité selon la direction de l'équipement d'Ifrane, des pièges à vents et le verglas en cas de baisse importante de température. Comme les douars forment une boucle, certains demandent le déneigement de la route qui mène vers la nationale 13 du côté d'Ifrane, d'autres préfèrent l'accès à Timhdite. Mais pour les autorités locales, comme pour la direction de l'Equipement, Bakrite a toujours été une priorité dans leur intervention de désenclavement et de déneigement. Plus de 1200 personnes y vivent et la pauvreté y est visible. C'est la seule localité de cette province qui vit des conditions proches de celles des localités d'Imilchil comme Tounfite.
« Cette année les chutes de neige ont été relativement tardives et avec une intensité faible. On n'a pas du tout senti l'isolement. La route a été dégagée le jour même par les chasses neige et d'autres engins. Les responsables sont venus s'enquérir de notre situation. Louange à Dieu et Gloire à Sa Majesté le Roi », nous a déclaré une habitante de cette localité qui a répondu par un sourire en s'éloignant et en cachant son visage entre ses mains à notre question sur son prénom.
Nous avons l'impression que cette année, trois paramètres ont joué un rôle essentielle dans l'absence presque total d'isolement dramatique qui puisse avoir des répercussions graves sur les populations des montagnes du Moyen Atlas : Primo, la période d'enneigement cette année, pour le moment au moins a eté très courte. D'ailleurs, ni à la station de ski de Michlifen, ni à Jbel Habri, il ne reste que des traces de neige lors de notre passage. L'épaisseur des neiges a été très faible. Secondo, le drame d'Anefgou où des enfants sont morts de froid et la mobilisation nationale pour venir en aide à ses habitants, et plus récemment la visite du Souverain dans cette contrée, a déclenché une vraie dynamique de réflexion sur les conditions de vie des populations des montagnes. « Le gouvernement a élaboré une stratégie impliquant plusieurs ministères visant à venir en aide aux habitants des régions montagneuses dépassant 1500m d'altitude, en proie aux vagues de froid et aux chutes de neige. Un plan intégré destiné à plus de 400.000 personnes et à environ 1000 douars relevant de 19 provinces. C'est une stratégie transversale impliquant plusieurs départements visant le désenclavement des populations et des interventions adéquates et pertinentes en cas d'urgence », martèle un responsable à Ifrane. Cette prise de conscience a entraîné une vigilance accrue et une redéfinition des priorités dans les conditions de grand froid. Dans certaines provinces, des plans d'intervention sont établis et des équipes ont été formées pour faire face à tout imprévu.
Tertio, l'Initiative Nationale de Développement Humain lancée par le Souverain, et dont le coup d'envoi a été donné cette année dans une ville qui connait justement des problématiques d'enneigement, de chute de température et d'enclavement et qui par certaines activités génératrices de revenu et plusieurs projets de désenclavement, électrification et approvisionnement en eau potable a profondément modifié les conditions de vie des populations des montagnes.
Comme la plupart des communes rurales des massifs sont pauvres, elles étaient quasiment toutes recensées pour bénéficier de projets dans le cadre de l'INDH. Cette politique a eu pour effet immédiat, selon Aït Ahmed, acteur associatif porteur de projet concernant Aïn Leuh, « la préservation et le renforcement de la cohésion de la société marocaine à travers la poursuite d'une politique sociale intégrée marquée par l'élargissement de l'accès des populations aux équipements de base par la résorption des déficits que connaît essentiellement le monde rural en matière d'infrastructures et de services ».


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