Le Maroc est le «premier pays arabe à avoir dépêché un responsable de haut niveau à Benghazi depuis le déclenchement de la révolution libyenne», a déclaré, mercredi à Benghazi, M. Moustapha Abdeljalil, président du Conseil national de transition libyen, le CNT, après avoir reçu le ministre des affaires étrangères et de la coopération, M. Taib Fassi Fihri, selon l'agence de presse AP. Le président du CNT n'a pas manqué d'ailleurs de souligner le « rôle prépondérant et l'appui du Royaume du Maroc à la révolution libyenne ( ) depuis la première semaine de la constitution du Conseil National de Transition». Le chef de la diplomatie marocaine a assuré, de son côté, «la détermination du Maroc à fournir le soutien total au peuple libyen frère dans cette conjoncture décisive, importante et historique». Alors même que nombre de pays arabes et africains avaient encore des doutes sur la légitimité du CNT et sa capacité à chasser le dictateur libyen par les armes, le Maroc avait pris fait et cause pour ceux que les médias internationaux ont appelé les «Insurgés», en étant l'un des premiers membres du Groupe de contact sur la Libye, à côté d'autres pays comme la France, les Etats-Unis, la Grande Bretagne et le Qatar, et en prenant part à toutes ses réunions. Le Maroc a également appliqué les résolutions 1970 et 1973 du Conseil de sécurité de l'ONU, en gelant les avoirs libyens dans le pays et en soumettant un rapport détaillé à ce sujet au Comité de sanctions des Nations Unies. Tripoli n'est pas encore entièrement tombée et Kaddhafi est toujours en fuite, sa tête ayant été mise à prix par le CNT pour 1,6 millions de dollars, «mort ou vif». Ses milices continuent, d'autre part, de faire de la résistance, gros salaires obligent. Ainsi, selon le site d'information «Polisario Confidentiel», les mercenaires polisariens qui sont allés prêter main forte à Kaddhafi, pour réprimer son peuple dans le sang, touchent 500 dollars par jour. Selon un rapport de l'OTAN, dont le journal britannique Daily Telegraph a révélé le contenu, ils seraient des milliers de terroristes du Polisario à se battre dans les rangs des milices de Kaddhafi. L'armée algérienne, l'ANP, toucherait, de son côté, entre 5.000 et 10.000 dollars pour escorter les mercenaires polisariens vers la Libye, le long d'un corridor sécurisé. L'ANP qui peine à sécuriser l'intérieur du territoire algérien contre les attaques et attentats des terroristes de l'AQMI, semble ainsi coccupée à «gagner» de l'argent en mobilisant et déplaçant des mercenaires pour aller porter secours au dictateur de Tripoli, confronté à la colère vengeresse de son peuple. Actuellement, les troupes du CNT détiennent 556 prisonniers polisariens et cherchent activement leurs autres camarades terroristes à travers le pays. Ce qui n'a pas empêché Alger, pour autant, d'exiger, sans vergogne, des excuses au CNT comme préalable à la reconnaissance de celui-ci, pour ses accusations, pourtant fondées, concernant le soutien du régime algérien à la dictature libyenne dans sa guerre contre son propre peuple. Même si la presse algérienne n'a pas manqué de souligner l'isolement diplomatique dans lequel se trouve plongée l'Algérie depuis la chute du régime de Kaddhafi, à Al Mouradya, les mauvaises vielles habitudes semblent très dures à perdre. A l'instar de son allié stratégique sur le continent africain, l'Afrique du sud, l'Algérie s'est débrouillée pour se mettre à dos la communauté internationale à cause de son soutien au dictateur sanguinaire libyen. Tout ce qu'elle en a gagné, c'est de se retrouver dans la position où elle s'évertue depuis plus de trente ans à mettre le Maroc, c'est-à-dire isolé au Maghreb, dans le monde arabe et en Afrique. Pour le Maroc, au contraire, de très beaux jours s'annoncent au Maghreb. En paix avec son voisin du sud mauritanien et ayant établi de bonnes relations avec les nouveaux régimes tunisien et libyen, le Maroc, qui jouit par ailleurs de la confiance des grandes puissances occidentales, est appelé à jouer un rôle de premier plan pour donner consistance au nécessaire rapprochement entre les pays démocratiques maghrébins. S'il est évident que l'union maghrébine devrait attendre la chute du dernier régime autoritaire de la région pour pouvoir prendre corps, il n'en faudrait pas moins, dès à présent, renouer et renforcer les relations bilatérales entre les jeunes démocraties maghrébines. En près de 42 ans de pouvoir, Kaddhafi a très peu fait pour développer son pays, préférant financer, pendant de longues années, terrorisme et séparatisme plutôt que de réaliser le bonheur de son peuple. Alors que l'argent du pétrole a toujours coulé à flot. Les Libyens ont déjà dû payer les crimes de leur «guide» autoproclamé, par dix années d'embargo. Maintenant, c'est un pays littéralement dévasté par la guerre qu'il a laissé en legs à ses compatriotes. La Libye est un pays frère, qui partage désormais avec le Maroc les valeurs de démocratie et de progrès et pour la reconstruction duquel il devrait prendre part. C'est non seulement un devoir envers un pays maghrébin qui fait ses premiers pas en tant que nation démocratique, mais également une excellente opportunité pour commencer à poser, de manière bilatérale, les jalons de la future intégration économique maghrébine. 500.000 marocains résident en Libye, certains d'entre eux ont fui les combats et ont été rapatriés, alors que d'autres n'ont pas hésité à se ranger du côté des Insurgés. L'armée libyenne est également totalement à reconstruire et à rééquiper. Si le Maroc n'est pas un pays producteur d'armement, il n'en dispose pas moins d'un réel savoir-faire et d'une très grande expérience dans la lutte contre la guérilla et le terrorisme, dont les Libyens risquent d'avoir fort besoin au cours des prochains mois pour pacifier leur territoire et le désinfecter de la racaille kaddhafiste. Le Maroc jouit du statut d'allié non-membre de l'OTAN et les FAR, qui mènent des exercices annuels avec leurs partenaires occidentaux et ont participé, à leurs côtés, à plusieurs opérations de maintien de la paix à travers le monde, sont dotés d'équipements et systèmes de communications interopérables avec ceux des pays de l'Alliance atlantique. Kaddhafi, dictateur sanguinaire et grand sponsor du Polisario, vient de rejoindre Benali dans les poubelles de l'Histoire. C'est une aube nouvelle qui se lève pour les frères Libyens, après avoir été le cas pour les frères Tunisiens. A l'est comme à l'ouest du Maghreb, les valeurs universelles de la liberté, de la démocratie et du progrès ont fini par s'imposer. En attendant le jour où les frères Algériens viendront rejoindre le club des jeunes démocraties maghrébines et de pouvoir entamer, enfin, la construction de l'édifice maghrébin.