Pour la première fois depuis quatre ans, l'Egypte a rouvert samedi à titre permanent son passage frontalier de Rafah avec le territoire palestinien de la Bande de Gaza, une décision accueillie avec inquiétude par Israël. La réouverture permanente du terminal routier avait été annoncée en avril par les nouvelles autorités égyptiennes, revenant sur la politique suivie jusqu'alors par le président déchu Hosni Moubarak. Il s'agit désormais, selon le ministre égyptien des Affaires étrangères Nabil Elaraby, de contribuer à alléger le blocus israélien du territoire palestinien et améliorer les relations avec les Palestiniens -après l'accord de réconciliation officialisé le 4 mai au Caire entre avec le Hamas et le Fatah. Le terminal routier, selon l'agence officielle égyptienne MENA, sera désormais ouvert quotidiennement de 9h à 21h, sauf les vendredis et jours fériés. Samedi matin, un premier autocar avec à bord des passagers de la Bande de Gaza a franchi le poste-frontière en direction de l'Egypte, suivi plus tard par d'autres véhicules. Quelque 350 personnes attendaient dans le calme leur tour, appelés un par un par des policiers du Hamas contrôlant leurs documents de voyage. Environ 175 personnes ont transité en deux heures, selon Hatem Awideh, directeur général de l'autorité frontalière du Hamas. "C'est une nouvelle ère qui, espérons-le, ouvrira la voie à la fin du siège et du blocus de Gaza", a-t-il commenté. Salama Baraka, le responsable du terminal côté palestinien, a estimé que quelque 900 Gazaouis devraient passer par Rafah au cours de la journée de samedi. Parmi les passagers, une femme prénommée Aïcha expliquait se rendre au Caire pour des examens médicaux. Opérée en octobre dernier dans la capitale égyptienne pour des artères bouchées, elle n'avait pas pu y retourner jusqu'à présent, en raison de problèmes administratifs. Rami Arafat, 42 ans, se rendait lui au Caire où il espérait prendre un vol pour l'Algérie, où sa fille se marie. "Nous avons juste besoin de voyager comme des humains, d'être traités avec dignité, de se sentir comme n'importe quel autre citoyen du monde", a-t-il ajouté. Khaled Halaweh, un étudiant de 28 ans, est lui en route pour l'université d'Alexandrie, pour un master d'ingénierie. C'est la première fois en sept ans qu'il sort de Gaza. "La fermeture n'a pas seulement affecté le transit des passagers ou le flux de marchandises. Nos cerveaux et nos pensées étaient sous le blocus", estime-t-il. Jusqu'à présent, le terminal de Rafah n'était que rarement ouvert, principalement pour raisons humanitaires. Sa réouverture à titre permanent va permettre aux habitants de la Bande de Gaza d'entrer et sortir librement du territoire palestinien, pour la première fois depuis juin 2007. Le Mouvement de la résistance islamique s'est alors emparé de la Bande de Gaza en chassant le Fatah par les armes. L'Egypte et Israël ont fermé les points de passage vers la Bande de Gaza, tandis que l'Etat hébreu a imposé un blocus du territoire palestinien, destiné à affaiblir le Hamas. Israël a assoupli l'an dernier les restrictions sur l'entrée des biens de consommation à Gaza, mais réglemente encore les exportations ainsi que l'importation de matériaux de construction, estimant qu'ils pourraient être utilisés par les militants islamistes. Tous les problèmes de déplacement des Gazaouis ne sont pas résolus. Les hommes âgés de 18 à 40 ans doivent demander des visas égyptiens, ce qui peut prendre des semaines. Les femmes, enfants et personnes âgées pourront de leur côté obtenir des permis de voyage plus rapidement. Les autorités égyptiennes ont assuré avoir mis en place des mesures de sécurité pour empêcher le transit d'armes par Rafah à destination de Gaza.