Dans un centre de santé dans une ville du nord du Maroc, un médecin généraliste, confronté à une longue file de patients, qui attendent leur tour de consultation, reçoit un malade qui présente des signes d'agitation. Dans la précipitation et sous la pression, le médecin le dirige en consultation de psychiatrie. Au fait, il s'agit d'un patient souffrant de diabète très déséquilibré et mal soigné, qui est en phase d'agitation. Donc, il s'agit d'une maladie organique, qui se complique d'un symptôme psychiatrique ou neurologique. Est-ce une erreur médicale ? Est-ce la charge de travail qui peut conduire à ce genre d'erreur ? Est-ce le manque de formation continue ? Parant de ce dernier constat, le 6ème Congrès National de l'Association Marocaine des Psychiatres du Secteur Public (AMPSP), qui aura lieu, les 20 et 21 mai 2011 à Fès, a choisi pour thème principal, la problématique des maladies psychiatriques, dont les premières ou les principales manifestations cliniques sont d'ordre organiques, indique Dr Derghal Mohamed, psychiatre dans le secteur publique et membre de l'AMPSP. D'éminents psychiatres nationaux et internationaux vont débattre de plusieurs ramifications liées à cette thématique. En l'occurrence, les démences et les manifestations psychiatriques, qu'appelle-t-on troubles psychosomatiques ? Quels sont les risques cardiovasculaires liés à la prise de médicaments antipsychotiques ? Quelles sont les voies de communication et de concertation qu'il faut développer entre la psychiatrie et la médecine générale, comme relais de suivi des patients atteints de maladies psychiatriques de longue durée ? Quelles sont les spécificités organiques des maladies psychiatriques chez l'enfant ? Comment reconnaître et diagnostiquer des affections somatiques méconnues, responsables ou aggravant la psychopathologie des patients relevant de la psychiatrie ? Ce sont autant de volets qui seront abordés par les experts marocains et internationaux autour de la notion d'organicité et maladies psychiatriques. Et cela dans un contexte ou plusieurs spécialistes estiment que les réponses à ce type de questionnements est tout d'abord d'ordre méthodologique. Car certaines relèvent du patient tandis que d'autres relèvent du médecin, ce qui rend difficile la conduite d'un bon examen clinique chez ce type de malades. Mais, il faut partir du principe, que cet examen clinque, à la recherche de signes organiques, est capital avant de démarrer tout traitement psychiatrique, du fait que plusieurs affections organiques peuvent mimer des maladies psychiatriques. Sur un autre plan, les personnes atteintes de troubles mentaux sont plus à risque de développer des comorbidités (autres maladies associés à la pathologie psychiatrique), tels que les maladies cardiovasculaires, les accidents vasculaires cérébraux, le diabète, l'hyperlipidémie, certaines affections pulmonaires tel l'emphysème. L'une des mises en garde principale des classifications psychiatriques internationales actuelles, précise Dr Derghal, insiste sur le fait qu'on voit de plus en plus de maladies psychiatriques associées à des maladies organiques chez le même patient, avec parfois de grande difficultés à tracer les lignes des frontières entre troubles relevant de maladies organiques et ceux relevant de maladies psychiatriques. Car, souvent les personnes atteintes de troubles mentaux et souffrant d'une autre pathologie organique lourde, se trouvent dans de situations ou l'accès aux soins est plus difficile, ce qui se répercute négativement sur la qualité des soins reçus. Partant de toutes ces problématiques, l'objectif de cette réunion sur « organicité et troubles psychiatriques », relève Dr Darghal, est de permettre d'examiner les avancées de la recherche sur les comorbidités psychiatriques et les affections somatiques, et débattre des problèmes que le psychiatre du secteur publique, rencontre dans sa pratique quotidienne. Il faut rappeler que l'Association Marocaine des Psychiatres du Secteur Public (AMPSP), a vu le jour le 1er Avril 2000 regroupant ainsi l'ensemble des psychiatres du secteur public, environ 200 pour 100 psychiatres dans le secteur libéral. Elle vise à améliorer la santé mentale au Maroc, organiser des réunions scientifiques et de formation médicale et surtout établir des relations de coopérations et d'échanges avec les autres associations nationales et internationales.