Moncef Kettani président de l'Union Générale des Entreprises et Professions (UGEP) déplore que l'UGEP n'ait pas été invitée par le ministère de l'Industrie, au même titre que d'autres organisations, aux Assises de l'Industries tenues dernièrement à Casablanca. Dans l'entretien suivant il explique son point de vue dans le débat qui se veut démocratique et sans langue de bois: L'Opinion: Quel est votre point de vue sur les Assises de l'Industries ? Moncef Kettani: Je voudrais m'en tenir à un simple constat. Aux Assises de l'Industrie seule la CGEM a été conviée. L'Union Générale des Entreprises et Profession (UGEP) ne l'a pas été ni l'Union des Petites et Moyennes Entreprises et d'autres associations non plus. Ces organisations n'ont pas été invitées, ce qui fait qu'elles n'étaient pas présentes à cette importante manifestation. La question qui se pose c'est en premier lieu de savoir si les organisateurs n'avaient pas les coordonnées de ces associations sachant que le ministère de l'Industrie de M.Chami dit être dans la communication par excellence. Il faut en effet que M.Chami communique, mais avec toutes les associations sans exclusive. Le fait sur lequel je voudrais insister c'est que nous avons besoin aujourd'hui de tout le potentiel économique: les petits, les moyens et les grands. C'est l'industrie qui crée l'emploi c'est un fait. Nous ne parlons pas du secteur des services et autres entreprises. Mais le fait de ne pas impliquer certaines associations qui ont un rôle à jouer, ce n'est pas une question de crédibilité ou de conditionnement parce que l'UGEP est membre du Conseil Economique et Social, l'Union PME est membre du Conseil d'administration de l'Agence Nationale de la PME. Cette absence aux Assises de l'Industrie de Casablanca ne s'explique pas surtout au moment où il faut réunir toutes les énergies. Il ne faut éliminer personne, bien au contraire. D'autant plus que les TPE et PME ont un rôle important à jouer dans l'émergence industrielle. Un jeune promoteur ou une petite entreprise peuvent générer de grandes entreprises industrielles. Et le fait de ne pas impliquer ces acteurs constitue tout simplement une perte pour l'économie nationale et c'est un manquement au rôle du ministère de l'Industrie censé être un ministère fédérateur pour mobiliser toutes les énergies et fédérer au lieu d'inviter les uns et pas les autres. Que la CGEM soit la grande organisation patronale qui représente le grand tissu industriel je le veux bien, mais il y a aussi dans les rangs de nos adhérents à l'UGEP des industriels qui auraient mérité d'être invités ou du moins l'organisation les représentant dans ces Assises de l'Industrie. Donc tant qu'on continue au Maroc à négliger les uns et à mettre en valeur les autres, ça n'a pas de sens. L'Opinion: Tant qu'on est en plein débat sur l'industrie, que pensez-vous donc de l'aide publique consentie pour ce secteur ? Moncef Kettani: Ce que nous remarquons c'est que la politique de soutien à l'entreprise aujourd'hui (on le voit à travers tous les programmes que ce soit Imtiyaz, Moussanada, Taahil, Rawaj), est malheureusement en train de se transformer en des programmes où l'Etat est donateur de fonds pour venir en aide à certaines entreprises seulement. Alors qu'il y a des méthodes beaucoup plus judicieuses d'aider l'entreprise. A titre d'exemple créer des fonds de garantie pour permettre à l'entreprise elle-même de lever les fonds de crédits bancaires. Nous ne sommes pas du tout d'accord avec cette façon, je dirais, de dilapider l'argent de l'Etat pour quelques dizaines d'entreprises au détriment de milliers d'autres. Et je ne pense pas que ce soit la meilleure politique pour aider l'économie marocaine. Parce que, encore une fois, c'est ça ce qu'on appelle l'élitisme c'est-à-dire en l'occurrence aider les grands, aider ceux qui ont la chance d'être au courant, d'être informés ou de pouvoir avoir accès alors que la quasi majorité des autres entreprises ne sont pas concernées par ces programmes d'aide. Je pense qu'il y a une grande défaillance dans la politique industrielle qui est menée pour venir en aide à l'entreprise. Et je ne pense pas qu'avec des programmes qui aujourd'hui agissent pour une infime quantité d'entreprises pour donner le modèle on puisse avancer. L'entreprise marocaine a besoin d'une vraie politique qui touche la majorité d'entreprises et non pas l'inverse. Nous ne cherchons pas la sélection de certaines unités qui doivent être mise en valeur, aidées, c'est du non sens pour la simple raison que l'économie est un tout. Certes on a besoin de politiques sectorielles mais les prêts de l'Etat doivent être utilisés à bon escient pour toucher la majorité et non pas la minorité. L'Opinion: Quelle démarche serait d'après vous la plus bénéfique pour agir et donner chance à tous ? Moncef Kettani: Quand on parle d'industrie, je pense qu'il va falloir vraiment commencer d'abord par un recensement et une étude de terrain approfondie pour connaître notre tissu industriel notamment au niveau sectoriel et connaître les difficultés et problèmes des professionnels en particulier en matière de zones industrielles, zones d'activité, en matière de facilitation des opérations de production, coût engagé, formation de main-d'œuvre et de personnel qualifié etc. Il y a un certain nombre de défaillances qui aujourd'hui, malheureusement, ne sont pas prises en considération ou du moins ne le sont qu'en partie seulement et c'est ce qui fait que des industriels aujourd'hui se détournent de l'industrie pour se diriger vers des secteurs beaucoup plus profitables