Au moins dix personnes ont été tuées et une centaine d'autres blessées lors d'incidents confessionnels samedi au Caire à propos d'une chrétienne qui se serait convertie à l'islam, ont annoncé les autorités égyptiennes. Le Premier ministre égyptien Essam Charaf, a dû reporter un déplacement à l'étranger et a tenu dimanche une réunion de crise de son cabinet alors que l'armée a annoncé l'arrestation de quelque 190 personnes au lendemain de ces affrontements qui alourdissent encore d'un cran un climat déjà tendu entre les deux communautés. Samedi, deux églises ont été incendiées dans le quartier pauvre d'Imbaba, dans l'ouest de la capitale, lors de violences intercommunautaires, qui comptent parmi les plus graves affrontements depuis la chute du président Hosni Moubarak en février. Ces affrontements, qui ont fait quelque dix morts et plusieurs dizaines de blessés, sont nés de rumeurs évoquant l'enlèvement d'une copte mariée à un sunnite et de sa détention dans une église. Ces rumeurs, qui n'ont jamais été confirmées, ont attisé la colère de musulmans qui ont marché sur l'église. Des heurts s'en sont suivis et des coups de feu avaient retenti dans tout le quartier. Les musulmans ont accusé les coptes d'être à l'origine des tirs et une large foule, à l'instigation de dirigeants religieux salafistes locaux, a convergé dans le secteur. Des groupes ont lancé des bombes incendiaires sur des maisons, des magasins et l'église Saint-Mina, mettant le feu à la façade de l'édifice religieux. La foule a ensuite attaqué l'église de la Vierge Marie située à proximité, l'incendiant également. L'armée et la police ont tenté de disperser la foule à l'aide de gaz lacrymogènes, sans réussir pendant plusieurs heures à ramener le calme. Des habitants ont fait irruption dans un immeuble près de l'église Saint-Mina, affirmant que les coptes l'utilisaient pour tirer sur des musulmans et brûlant l'édifice. Dimanche matin, le foyer n'était toujours pas éteint et des meubles jonchaient les trottoirs. Les incendies dans les églises ont été éteints et les bâtiments étaient encerclés par l'armée. Selon l'agence de presse officielle MENA, six musulmans et trois coptes ont été tués lors des affrontements. Le corps d'un des chrétiens a été découvert dans l'une des églises. Une dixième personne est décédée, mais on ignore son appartenance religieuse. Hicham Sheiha, du ministère de la Santé, a déclaré à MENA que 186 personnes avaient été blessées, dont 11, touchées par balles, se trouvaient dans un état critique. Les violences les plus meurtrières depuis le départ du président Moubarak en février avaient fait 13 morts en mars dans des affrontements de rue, à la suite de l'incendie d'une église par des musulmans. Les coptes représentent 10% d'une population de 80 millions de personnes. Plusieurs dirigeants religieux ont condamné ces violences, tirant la sonnette d'alarme devant l'escalade des tensions durant la période de transition. Le grand mufti Ali Gomaa a estimé que ces heurts «mettaient en danger la sécurité de l'Egypte». Le grand imam de l'université Al-Azhar, Ahmed al-Tayeb, a lui aussi condamné ces violences, qui «ne profitent à aucune partie», a-t-il dit dimanche au quotidien «Al-Ahram». 190 personnes seront déférées devant la justice militaire L'armée égyptienne a annoncé dimanche que 190 personnes arrêtées après les violents affrontements entre musulmans et chrétiens qui ont fait 10 morts la veille au Caire seraient déférées devant des tribunaux militaires. L'armée a ordonné «le transfert de toutes les personnes arrêtées en liaison avec les événements de samedi soir et dont le nombre s'élève à 190 pour qu'elles soient déférées devant la cour militaire suprême», selon un communiqué. L'armée, qui assure la direction du pays depuis qu'une révolte populaire a chassé le président Hosni Moubarak le 11 février, avait promis samedi soir d'agir fermement contres les responsables des violences. Un général, s'exprimant dans la nuit à la télévision, avait assuré que l'armée ne permettrait pas «à quelque courant que ce soit d'imposer son hégémonie en Egypte». Pour sa part, le Premier ministre égyptien Essam Charaf tenait dimanche une réunion de crise de son cabinet au lendemain des violents affrontements entre musulmans et chrétiens qui ont fait dix morts au Caire, alourdissant un climat déjà tendu entre les deux communautés. M. Charaf, qui prévoyait une tournée dimanche aux Emirats arabes unis et à Bahreïn, a reporté son voyage et convoqué «une réunion d'urgence du cabinet pour examiner les événements regrettables à Imbaba», selon l'agence officielle Mena et la télévision d'Etat.