L'autre soir, au hasard d'un zapping, on tombe sur les séquences du mondial 86. Cette compétition est restée célèbre pour ce qu'y ont réalisé les Lions de l'Atlas, et la fameuse demi-finale entre la France et l'Allemagne où la bande à Platini coachée par Henri Michel (eh oui) fut bouffée tout cru par les Teutons de Rummenigge. Les Français éliminés aux penaltys après avoir mené 3 à 1 au cours des prolongations, ce sont des souvenirs qui font encore mal à tout l'Hexagone. Platini, aujourd'hui devenu président de l'UEFA, répond encore à des questions sur le pourquoi et le comment de cette défaite. Cruel… Le football marocain se rappelle, plutôt, de la gloire qu'il a gagnée dans cette Coupe du Monde : première équipe africaine à passer au second tour d'un Mondial. Très beau souvenir. Mais ce n'est pas de cela que l'on va parler ici et aujourd'hui. 1986 est resté fameuse aussi dans les cœurs belges, à commencer par l'un des plus illustres d'entre eux, j'ai nommé le citoyen Eric Gerets, notre coach national, himself. Comme il l'avait rappelé, lors de sa première conférence de presse à Rabat, Gerets était de cette équipe des Diables Rouges (nom de l'équipe nationale belge) qui est arrivée en demi-finale comme la France d'Henri Michel. Sauf que les Belges tombèrent avec tous les honneurs contre le monstre absolu du football de ces années- là, l'Argentine de l'ogre Maradona. Diego mit au supplice la défense adverse et particulièrement l'ami Gerets qui, sur le dernier but, rata d'un cheveu le tacle qu'il lança sur Maradona, celui-ci était arrivé comme un mustang de la pampa, dribblant tout le monde, et complètement lancé, il pénètre dans les 18 mètres. C'est là que Gerets l'attend, mais Maradona accélère encore et le tacle du lion (surnom de Gerets, eh oui) rasa le gazon soulevant des milliers de brins d'herbe. Quand Eric se releva c'est pour contempler les dégâts : le gardien Pfaff ramassait le ballon dans les filets et Maradona était salué par tous ses coéquipiers. Ses images existent dans le film officiel de la FIFA et ont été récemment diffusées sur E.S.P.N. Les fans du clavier la retrouveront sûrement sur les sites consacrés. Gerets, lui, depuis 1986 a fait des tas d'autres choses. Entre autres, il se retrouve ici, chez nous, au Maroc, pour redorer le blason du football marocain. On a été content de le voir souriant et bien placé dans les tribunes du derbissimo. Gerets aime tellement Casa et son stade Mohammed V qu'il a convaincu des amis diplomates de venir voir l'ambiance. On a été content parce qu'on a eu ainsi la preuve que le coach national avait surmonté le contre coup de la défaite Annaba. Celle-ci l'avait sévèrement marqué, peut être plus que le tacle raté sur Maradona, car, en vérité, qui peut en vouloir à un défenseur qui se fait piéger par le « maâlem » argentin, mais à Annaba, il s'est agit de toute autre chose, lui, Gerets, le vétéran, l'homme qui n'a peur de rien s'est fait piéger. Oh ! il ne l'avouera jamais, mais là-bas, à Annaba, pour son premier match officiel, Gerets a subi un vrai « bizutage ». De celui que l'on administre aux nouveaux arrivants dans certains collèges et les universités. Comme l'a si bien dit quelqu'un ici, sur cette page, Gerets s'était préparé pour un match qui, en fait, n'a jamais eu lieu. Dès le coup d'envoi, l'ami Rawrawa et « son » arbitre l'avaient confisqué, ne laissant aux coéquipiers de Chammakh que leur colère pour râler et rater. Lui, Gerets, au lieu de calmer ses joueurs, de les rappeler à l'essentiel, à savoir le jeu, au lieu de se perdre dans des crises de nerfs qui, si elles étaient largement justifiées, n'en étaient pas moins intempestives. Mais on n'en voudra pas au preux Eric le Viking, il a été surpris, et il en est resté tout assomé pendant toute la première mi-temps. C'est au vestiaire qu'il passa un savon mémorable aux joueurs, mais le cœur des uns et des autres n'y était plus. Et c'est le cœur gros et la tête en feu que tout le monde rentra à Marrakech, la néophyte fédération ne faisant rien pour améliorer l'ambiance, c'est un Gerets quasi sonné qui s'appliqua à reprendra peu à peu ses esprits en ruminant sa déception. La déception de ne pas avoir donné au Maroc et aux Marocains la joie qu'ils voulaient leur offrir. Mais là, maintenant, c'est oublié, le soleil brille et le match retard s'annonce paisiblement. On dit que les loups ne se font avoir qu'une fois, on sait aussi qu'un homme aussi orgueilleux que Gerets ne se serait pas fait avoir une seconde fois contre Maradona Alors contre l'Algérie ? Quid du prochain match ? Qui vivra verra … Si Gerets va retrouver son lustre et son honneur de footballeur face à un adversaire qui sera, soyons en sûrs beaucoup plus fort, à Casablanca qu'à Annaba. Mais on aura le temps de penser à tout cela. Pour l'instant, on se contentera de constater que Gerets a retrouvé le sourire et le moral. Et ça c'est plutôt une bonne nouvelle. Pour lui comme pour nous.