Apparemment le projet est en bonne voie mais avec du retard «parce qu'il a fallu réaliser des études et du fait du temps qu'il a fallu pour la mise en place des crédits», nous indique M.Omar El Asri, paysagiste chef de la Division des Espace Vert de la ville Casablanca. Fin 2010, au bout de quatre années, 65 hectares d'espaces verts de l'ancien patrimoine de parcs sont réhabilités sur un total de 85, précise la même source. Malgré le retard, le résultat sur le terrain est réjouissant comme on peut le constater dans les parcs de Murdoch, de Ain Chok, de Ben Msik (Parc Alesco), L'Hermitage qui doit ouvrir prochainement ses portes au public et le parc de Moulay Rachid dit Ghaba Khadra à Ben Msik. Restent le parc de la Palestine au quartier Belvédère et le gros morceau constitué par le grand parc de la Ligue Arabe lequel, à lui seul, s'étendait, à l'origine, sur une superficie de 35 hectares mais a été amputé au fil des décennies de pas moins de 16 hectares ! C'est à cause de différents intervenants qui squattent le site dont des cafés glaciers, restaurants, snacks, kiosques, clubs de sport, villa et bureaux des Eaux et Forêts. «Toutes ces constructions qui squattent le parc vont être rasées pour récupérer le domaine du parc qui va être ouvert sur le boulevard Roudani» souligne Omar El Asri. Le projet actuellement à l'étude, prévoit de restituer au parc son unité d'antan en supprimant le tronçon du boulevard Moulay Youssef qui coupe le parc en deux. La verdure reviendra sur ce tronçon du boulevard qui va du rond-point Saint-Exupéry au rond-point Roudani-rue d'Alger. Il lui sera intégré le jardin place Rachidi sous lequel sera aménagé un parking souterrain de 700 places. Une solution pour atténuer la pression du très grave problème du stationnement mais pas suffisante pour arrêter la marée automobile. A cause de ce problème laissé comme d'autres en suspens par la ville, le parc de la Ligue Arabe est devenu un véritable parking anarchique où les voitures, ne trouvant pas où stationner, prennent d'assaut le domaine des plantations et des vieux ficus. C'est le comble de la dégradation du site. Avec le futur réaménagement du parc, il est prévu qu'il sera clôturé comme les autres parcs réhabilités jusqu'à présent pour le protéger notamment de toute intrusion automobile. Retour sur l'histoire de l'espace vert à Dar Beida Casablanca, la ville asphyxiée par la pollution atmosphérique due au gaz d'échappement des voitures entre autres, a toujours souffert pour ses espaces verts: non seulement le béton et l'immobilier avancent sans qu'ils soient accompagnés au même rythme par la plantation d'arbres, mais l'ancien patrimoine est abandonné en friche. Beaucoup a été écrit sur cette situation et des colloques organisés par des universitaires géographes pour sensibiliser, informent qu'à Casablanca, il y a à peine deux mètres carrés de verdure par habitant alors que les normes internationales sont de 12m2 / habitant. Ceci pour exprimer les carences et le grand déficit du fait que depuis l'indépendance, très peu d'espaces verts dignent de ce nom ont vu le jour. Toutes les voix ne trouvaient aucun échos auprès des collectivités locales qui trouvaient même des astuces machiavéliques pour s'en prendre aux espaces verts existants et les remplacer par du béton, des constructions d'immeubles à usages d'habitation et locaux commerciaux: «modification des plans d'aménagement pour raison de manque de budget». Autrement dit, on brade les espaces verts qui, comme tout domaine public, suscitaient l'envie et la cupidité des accapareurs de tout poils. Des justifications toutes trouvées étaient avancées selon lesquelles «la population n'exprimait pas de besoins en espaces verts» ou encore «les espaces verts coûtent trop chers pour l'entretien et il y a trop de vandalisme contre le mobilier» etc. Après tant d'années de statu quo, le changement a commencé sous la pression de l'action de sensibilisation sur l'environnement, phénomène mondial il est vrai. Une exigence de qualité de vie meilleure prenait le dessus. Au niveau local, quelques actions d'associations de quartier ont donné le bel exemple comme l'association Derb El Metr à Bouchentouf pour la sauvegarde du parc L'Hermitage pour ne citer que ce cas parmi tant d'autres. L'entrée en lice d'associations de quartiers s'expliquait par la crainte légitime que le patrimoine en espaces verts soit accaparé, détourné, spolié au profit des spéculateurs du béton au moment même où les quartiers souffrent de carences criantes en aires de jeu et verdures. Le changement dans les esprits et des mentalités s'annonçait inéluctable. Mais il ne pouvait se faire sans qu'intervienne le législateur. C'est ainsi que l'ancienne Charte communale a été supplantée depuis septembre 2003 par la nouvelle qui décrète l'unité de la ville. Du coup, un seul service (la Division des Espaces Verts) s'occupe du patrimoine de verdure avec une vision unifiée et donc forcément une visibilité et responsabilité délimitée. Par contre, l'ancienne charte faisait que chacune des anciennes communes devait s'occuper des parcs et jardins, plantations d'alignement sous sa juridiction. Il y avait 27 communes dans la ville de Casablanca en plus de la Communauté Urbaine, soit donc 28 entités, chacune ayant sa propre vision. Il en a résulté, pour le domaine des espaces verts, une grande anarchie et inefficacité sur tous les plans. Du moins est-ce là l'une des explications avancée par des intervenants. Si dans l'ancienne charte le législateur semble avoir axé son intérêt sur la proximité (la commune s'occupe de son propre espace) ces communes n'étaient pas dotées en ressources humaines qualifiées et en nombre suffisant (ingénieurs, paysagistes) pour mener une action réfléchie et tracer un programme d'action sur le terrain répondant aux attentes de la population. Toute l'action des anciennes communes, c'est archi-connu, se limitait à quelques travaux d'embellissement effectués à la hâte et sans lendemain à l'occasion de grandes festivités, sommets internationaux, visites du Souverain dans la ville etc. Nouvelle ère L'unification de la ville a permis donc la mise en place d'un service unique, intervenant et interlocuteur. Après donc le changement de la Charte communale, l'idée d'intervenir pour la sauvegarde du patrimoine des espaces verts est née. Elle a pu prendre l'envergure d'un véritable plan de sauvegarde annonçant une nouvelle ère pour les espaces verts à Dar el Beida, surtout à la suite de la signature de la convention pour le développement urbain déjà citée. D'après Omar El Asri chef de division des espaces verts de la ville de Casablanca, le programme de réhabilitation a commencé par le parc Alesco de Ben Msik, angle boulevards Harti et Joulane, situé entre l'ancien cimetière de Sbata et le marché de gros. Ce parc a été créé en convention avec l'Organisation arabe pour l'éducation, la culture et les sciences (Alesco) d'où le nom du site. Le choix de ce parc comme premier champ d'intervention du plan de réhabilitation s'explique par le désir de montrer qu'on s'intéresse aussi à la périphérie de Casablanca souvent laissée à la marge. D'une superficie de 8 hectares, ce parc avait été laissé à l'abandon pendant de longues années et clôturé au point de devenir une «vraie jungle». Cependant, l'espace, ouvert au public, souffre encore de problèmes de sécurité, ce qui appelle à une action sérieuse de réhabilitation en la matière. Par la suite, ce fut le tour du parc de Moulay Rachid dit Ghaba Khadra, suivi du parc Murdoch qui compte 4 hectares et qui fut rouvert au public en 2006, ensuite le parc de Ain Chok d'une superficie de 3 hectares. Actuellement c'est au tour du parc de la Palestine, quartier Belvédère, de faire l'objet de travaux de réhabilitation en rasant le café qui le squatte depuis des années. Dans tous les parcs réhabilités, faut-il le rappeler, on a pu assister à la démolition des constructions qui les squattent, souvent des cafés, des snacks. Ces constructions ont pu s'établir en grand nombre surtout durant les années 70 et 80 en vertu d'autorisations temporaires données à d'anciens fonctionnaires pour l'exploitation du domaine public. C'était le début de la décadence de ces sites. Après réaménagement de chaque parc, celui-ci est mis entre les mains d'entreprises de jardinage qui s'occupent du travail d'entretien dans le cadre «d'externalisation des travaux d'entretien» apprend-on. Il s'agit actuellement de sept entreprises privées engagées pour entretenir les parcs et jardins sur dix zones d'intervention avec le contrôle et le suivi de la Division des espaces verts. Parallèlement aux travaux de réhabilitation des anciens parcs, de nouveaux espaces verts ont vu le jour dont celui d'Ain Sebaa derrière le complexe administratif de 12 hectares et le grand jardin d'accès à Bernoussi de même superficie. Cela sans oublier les plantations d'alignement. «Depuis 2004, nous avons planté 35 mille arbres à Casablanca et prochainement près d'un millier d'arbres seront plantés sur la route de Nouacer à partir du rond-point Marjane Boussekkoura» affirme El Asri. Par contre, l'un des points noirs reste l'état de dégradations du zoo d'Ain Sebaa qui aurait dû figurer parmi les priorités de réhabilitation vu l'état des animaux dont les visiteurs ne manquent pas de relever la situation lamentable, sans oublier le jardin de Sidi Mohammed attenant au zoo et le parc de jeu d'Ain Sebaa qui ne renferme plus, en guise de manèges, que des tas de ferrailles. Déplacement de 2.000 arbres pour le tramway Au volet de la préservation et de la protection de l'arbre, beaucoup de Casablancais ont assisté avec grande peine à la suppression de centaines d'arbres pour la réalisation des travaux du tramway ou pour l'agrandissement de certaines avenues. Pour Omar El Asri, la Division des Espaces verts veille à protéger l'arbre où qu'il soit dans la ville. «Tous les arbres enlevés sont simplement déplacés vers d'autres endroits, nous veillons à ce que le déplacement soit effectué avec le moindre stress possible pour permettre à l'arbre de survivre au déplacement. A titre d'exemple, pour les grands ficus presque septuagénaires de l'avenue el-Massira al-Khadra (pour l'agrandissement de l'avenue et non le tramway) ils ont été tous transplantés en alignement sur la Route d'El Jadida à partir de Azbane, ils ont d'ailleurs commencé à refleurir. Sur 300 ficus déplacés, nous en avons malheureusement perdu dix, mais c'est très peu comme dégât sur le reste des trois cent qui survivent. Malgré tout, un arbre mort est une immense perte». Pour cette opération de déplacement des arbres se trouvant sur l'itinéraire de la première ligne du futur tramway, le maître d'ouvrage, Casa-Transport, a lancé un appel d'offre sur la base d'un cahier des charges pour le déplacement des arbres, apprend-on. «Nous ne faisons que les assister pour que l'opération de déplacement et transplantation des arbres se fasse dans les meilleures conditions» précise Omar El Aasri. Dans cette opération de déplacement et transplantation, il s'agit de plus de deux mille arbres dont 1155 palmiers essentiellement des Phoenix et des washingtonias sans parler des milliers d'arbustes de différentes variétés dont 421 ficus.