Malgré les réformes engagées par le gouvernement pour améliorer les conditions de vie des ménages, ses efforts ne trouvent pas toujours écho auprès des citoyens, suite à la «cupidité inflationniste» de certains acteurs économiques. Pour y remédier, Nizar Baraka appelle à une action commune pour que les initiatives gouvernementales atteignent les groupes cibles. Les partis de la coalition gouvernementale -Parti de l'Istiqlal (PI), Rassemblement national des indépendants (RNI) et Parti authenticité et modernité (PAM)- se sont réunis, mardi à Rabat, conformément au mécanisme de concertation permanente établi par la Charte de la Majorité. L'occasion pour les leaders des partis de la coalition d'exprimer leur satisfecit des réalisations de l'Exécutif depuis le début de son mandat, tout en se félicitant de la cohésion de ses composantes, et de la «maturité politique» ayant marqué la gestion de la majorité. Lors de cette réunion, où les projecteurs étaient rivés vers le Projet de Loi des Finances (PLF) 2025, les patrons du trio gouvernemental ont également dressé la liste des défis à surmonter pour faire face aux aléas conjoncturels et préserver le pouvoir d'achat des ménages. Le SG de l'Istiqlal, Nizar Baraka, a noté dans ce sillage que le mandat gouvernemental a été marqué par des résultats satisfaisants et positifs dans les différents domaines et secteurs en dépit des contraintes, de l'inflation et de la fluctuation des prix à l'international, sans oublier la marge de manœuvre budgétaire étroite. S'agissant de l'amélioration des conditions de vie des citoyens, Baraka a donné l'exemple de la hausse des salaires, de la révision des barèmes de l'IR, et des efforts déployés dans le cadre de la Caisse de Compensation, dont l'enveloppe budgétaire dépasse les 16 milliards de dirhams (MMDH). Néanmoins, le patron du Parti de la Balance n'a pas manqué de préciser qu'il y a des efforts et des réformes «qui ne trouvent pas un écho auprès des citoyens». «C'est une réalité et nous devons y remédier éminemment», a tranché Nizar Baraka, fustigeant les comportements «anti-citoyens» de certains acteurs économiques qui profitent du «contexte inflationniste pour augmenter les marges commerciales et réaliser des bénéfices». Une «avidité» interdite étant donné les circonstances du Royaume en cette période de crise.
Blinder les garde-fous de l'Etat ! L'exemple du secteur des viandes est saillant, car, malgré la baisse des pressions inflationnistes et les multiples initiatives gouvernementales pour stabiliser les prix, la flambée persiste. Une situation qui, selon les professionnels contactés par nos soins, serait due, d'un côté, à la multitude des intermédiaires qui interviennent dans la chaîne d'approvisionnement et, d'un autre côté, aux marges «énormes» appliquées par certains importateurs, qui pourtant bénéficient de moult facilités fiscales. D'où la nécessité de renforcer les garde-fous de l'Etat pour réguler les marchés nationaux, notamment quand il s'agit de secteurs touchant directement les bourses des ménages, à l'instar de l'agroalimentaire. «Si aujourd'hui les intermédiaires et les opérateurs faussent le jeu, il faut renforcer les mécanismes de contrôle de l'Etat, comme le Conseil de la Concurrence et les Commissions interministérielles, tout en accélérant la cadence de certains chantiers fondamentaux, à l'instar de la réforme des marchés de gros», appuie Jamal Diwany, député et Président de la Commission parlementaire des secteurs productifs. C'est ainsi que Baraka a appelé les parlementaires à signaler les éventuelles violations ou déséquilibres qui affectent les réformes et les initiatives lancées ou adoptées de sorte à gagner «la bataille contre la cupidité». «Il faut se mobiliser, être vigilant et assurer le suivi au sein des régions, villes et villages du Royaume afin de nous transmettre l'impact et les répercussions des mesures prises, qu'elles soient positives ou négatives», a recommandé Baraka, ajoutant que le gouvernement a, certes, gagné la bataille contre l'inflation importée et celle résultant de la sécheresse, mais aujourd'hui, il faut faire face à la «Greedflation». Une pratique par laquelle un acteur économique profite d'un contexte inflationniste pour augmenter artificiellement le prix de ses produits, sans lien avec la hausse des coûts des matières premières, ou de manière disproportionnée. Concernant les efforts du gouvernement, Baraka, tout comme ses homologues Aziz Akhannouch et Mehdi Bensaïd, rassure sur la continuité de la dynamique sociale, «issue des programmes électoraux des partis ayant bénéficié de la confiance des citoyens». «Nous sommes en phase d'une nouvelle vision pour créer des opportunités d'emploi avec des mesures volontaires financières, fiscales et économiques dans les secteurs prometteurs», a rappelé le SG du PI, faisant référence au PLF 2025 et notant que le citoyen a grand besoin de mesures tangibles en phase avec ses besoins urgents et légitimes, et de communication permanente, simple et transparente sur les réalisations accomplies.
Mina ELKHODARI Trois questions à Jamal Diwany « La réduction de l'IR aura un impact d'au moins 15 à 20% sur le pouvoir d'achat de la classe moyenne inférieure » * Le PLF 2025 insiste sur l'augmentation des enveloppes des collectivités territoriales. Comment peut-on exploiter ce budget de manière optimale ?
Ce budget devrait se traduire par une plus grande capacité des collectivités à s'approprier les investissements publics. Il représente aussi une affirmation des principes de décentralisation et de déconcentration, qui sont, en effet, au cœur d'une régionalisation avancée. Par ailleurs, une autonomie financière accrue pour les collectivités territoriales offre aux élus la possibilité de prendre des décisions adaptées au niveau régional, provincial et local, pour pouvoir porter les propres projets de territoire. Il faut savoir que ce budget n'est pas destiné à garantir le fonctionnement de ces services, car les dépenses liées aux ressources humaines occupent déjà une part importante des budgets des collectivités territoriales. Ce qui fait défaut, c'est clairement la portion dédiée à l'investissement, comme l'ont souligné les présidents des collectivités.
* Les projecteurs sont également rivés sur le nouveau barème de l'IR. Pensez-vous que les mesures du PLF sont suffisantes pour préserver le pouvoir d'achat de la classe moyenne ?
Je dirais plutôt de soulager les ménages en termes de dépenses, notamment après l'augmentation des revenus des ménages, et cela permettra par la même occasion de favoriser l'équité fiscale et la classe moyenne inférieure. Cet impact varie pour chaque tranche de la société, mais il devrait se faire sentir sur une tranche assez large de la population. Ce changement du barème de l'IR aura un impact d'au moins 15 à 20% sur le pouvoir d'achat de la classe moyenne inférieure. En revanche, cet impact ne sera pas le même pour la classe moyenne supérieure, étant donné que les mesures prises dans le cadre de l'Etat social ciblent les plus démunis, ainsi que les classes modestes et la classe moyenne inférieure.
* Il y a également la question de l'élargissement des importations pour les produits de première nécessité. Quelle est votre lecture de cette mesure, étant donné que la balance commerciale du Maroc est grandement déficitaire ?
L'exonération de ces produits, dont le Maroc atteste d'une insuffisance au niveau de la production, est une mesure importante pour amortir le choc de l'augmentation vertigineuse des prix de certains biens. Cette mesure exceptionnelle s'avère incontournable dans un contexte où le prix de la viande rouge, par exemple, a atteint un niveau sans précédent. De ce fait, la réduction des droits de douane est susceptible de se répercuter sur les prix et, par conséquent, de réduire l'inflation à un niveau tolérable. Elle permettra de combler le déficit en matière de produits de consommation l'année prochaine. L'état des cultures et la disponibilité du cheptel dans les années à venir seront décisifs pour maintenir cette mesure ou non. PLF 2025 : Orientation sociale, malgré la crise Si malgré la crise économique mondiale, le Maroc affiche une résilience remarquable grâce à une stratégie de diversification économique et de partenariats avec des acteurs mondiaux, le PLF 2025 vise à consolider cette résilience à travers des réformes structurelles à vocation sociale. Ses priorités se déclinent en quatre axes principaux : le renforcement des piliers de l'Etat social, la consolidation de l'investissement et de l'emploi, la mise en œuvre de réformes structurelles et la soutenabilité des finances publiques. Pour préserver le pouvoir d'achat il prévoit une enveloppe de 16,536 milliards de dirhams est allouée pour stabiliser les prix de produits de base tels que le gaz butane, le sucre, la farine et le blé tendre. Pour faire face à la hausse des coûts de production de l'électricité, des dotations budgétaires de 5 milliards de dirhams en 2022, 4 milliards en 2023 et 2024, et 4 milliards supplémentaires en 2025 ont été accordées à l'ONEE pour limiter l'impact de cette hausse. Concernant l'inflation des produits alimentaires, particulièrement due aux sécheresses récurrentes, le gouvernement mobilise, entre autres, 20 milliards de dirhams pour les campagnes agricoles de 2022-2023 et 2023-2024. Diplomatie partisane : Action 360° en faveur de l'intégrité territoriale Lors de la réunion de la majorité, les leaders du trio gouvernemental se sont félicités des directives Royales concernant le dossier du Sahara marocain. Le Chef du gouvernement et président du RNI, Aziz Akhannouch, a indiqué, dans ce sens, que la rentrée politique de cette année confronte le gouvernement et toute la Nation à de grands défis «définis par le discours de SM le Roi Mohammed VI à l'ouverture de l'actuelle session parlementaire». Il a ainsi appelé les groupes parlementaires de la majorité à interagir de manière approfondie avec le Discours du Souverain et à fédérer leurs efforts pour défendre la cause nationale, notamment en matière de choix des cadres et des compétences parlementaires qualifiés pour défendre le dossier à l'international et capables de suivre les nouveautés et les évolutions nationales et internationales liées à la question du Sahara marocain, tout en plaçant la proposition marocaine à l'ordre du jour officiel de la diplomatie parlementaire. Dans ce même sens, le Secrétaire Général du Parti de l'Istiqlal, Nizar Baraka, a noté que le dossier du Sahara marocain «fait face à de nombreux défis», nécessitant une mobilisation plus large du gouvernement pour convaincre les quelques pays restants à soutenir la cause nationale, et résoudre définitivement ce différend artificiel. Il est ainsi important, selon le leader du PI, d'établir un mécanisme national de diplomatie partisane. «Une coalition partisane nationale rassemblant toutes les organisations politiques du pays afin de renforcer la coordination et le plaidoyer pour notre cause d'intégrité territoriale», préconise Baraka.