Les experts du Centre régional de la recherche agronomique (CRRA), relevant de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA-Meknès), ont développé une méthode de lutte biologique alternative à l'usage des pesticides contre les maladies de post-récolte des pommes. Cette méthode a donné de bons résultats. «Nous avons sélectionné deux levures qui protègent les pommes à plus de 90% des pourritures de post-récolte». C'est ce qu'affirment, en effet, les chercheurs de l'Institut. Et d'ajouter que les deux souches répondent positivement aux exigences d'homologation. Leur traçage par usage d'un milieu semi-sélectif (outil classique) et une empreinte génétique (outil moléculaire) a été développé. Ces deux outils ont été appliqués ensemble avec succès pour l'identification et le suivi des deux levures une fois introduites sur le fruit. Techniquement, ces deux souches peuvent être utilisées en végétation avant l'entreposage des pommes sans problème, car elles tolèrent les rayons UVB qui arrivent au sol. La méthode est expérimentée depuis 2004. Aujourd'hui, elle s'avère très utile. D'autant plus que le Maroc est second producteur africain de pommes avec 30% de la production du continent. La seule région de Meknès accapare le tiers de la superficie nationale dédiée à cette culture (près de 9.000 ha). Elle dispose aussi d'une capacité frigorifique de 45.000 tonnes. «Les pommes entreposées dans les frigos subissent malheureusement des détériorations suite aux problèmes phytosanitaires», indiquent les experts du CRRA. Et d'ajouter que les pertes peuvent atteindre 30% et sont occasionnées essentiellement par des maladies d'origine fongique telles que Botrytis cinerea, Penicillium expansum, Fusariumavenaceum. En fait, l'incidence de chacun de ces parasites reste à déterminer, même s'il semble que deux parasites de blessures (B. cinerea et P. expansum) soient à l'origine des nombreuses contaminations observées sur les fruits (BondouxP. 1992). Ces pertes, économiquement importantes, agissent sur le prix de vente de la pomme, devenant souvent supérieur au pouvoir d'achat d'une grande majorité des couches sociales. Il faut aussi dire que les méthodes de lutte utilisées contre ces parasites sont principalement de nature chimique, les fongicides les plus utilisés appartenant à la famille des benzidimazoles. Pour les responsables du CRRA, l'usage de ces fongicides a engendré l'apparition de souches pathogènes résistantes et la pollution de l'environnement. Par ailleurs, la plupart des pays importateurs de fruits, et plus particulièrement les pays européens, ont adopté des législations très strictes vis-à-vis de l'emploi des pesticides. Ainsi, l'utilisation de certains produits est déjà limitée. D'autant plus que le traitement (par vinchlozoline) ne peut plus être utilisé sur pommier et poirier que pendant la période de floraison pour combattre la pourriture de la mouche (B. cinerea). L'autre insecticide, le captane, est interdit en Allemagne et en Hollande pour des problèmes d'éco-toxicologie. L'on sait également que dans d'autres pays européens, la période entre la dernière application de cette matière active et la récolte est prolongée. Et dans un avenir proche, certains produits efficaces (benzimidazoles) ne seront plus autorisés. Ces mesures s'accompagnent d'une réduction des limites maximales de résidus tolérés sur les fruits. Aussi, la recherche d'une alternative de lutte permettant, d'une part, de réduire les dégâts dus aux maladies de post-récolte et, d'autre part, de répondre aux contraintes imposées par le marché international, est-elle devenue une des priorités de ce secteur. Selon le CRRA, parmi les méthodes de lutte alternatives, une attention considérable est portée sur la lutte biologique. Les résultats obtenus durant les dix dernières années dans ce domaine ont montré que cette dernière peut constituer une alternative intéressante à la lutte chimique.