Simon Martin, l'ambassadeur du Royaume-Uni au Royaume du Maroc, est dans une posture très embarrassante depuis que son concitoyen, le député Daniel Kawczynski, a révélé son manque d'enthousiasme pour la reconnaissance par son pays de la marocanité du Sahara. L'indiscrétion a été commise dans le cadre d'une réunion à la Chambre des Communes consacrée justement à l'examen de la politique du gouvernement britannique sur le Sahara. Au gré d'un plaidoyer en faveur de la reconnaissance britannique de la souveraineté du Maroc sur ses provinces du Sud comme l'ont fait de manière explicite les «alliés américains et israéliens», ou du moins un alignement sur les positions espagnole, allemande et française affirmant la primauté de l'initiative marocaine d'autonomie pour le Sahara sur toutes les autres options, Kawczynski a livré la synthèse d'une conversation tenue dans le sillage d'une mission parlementaire britannique au Maroc, avec Simon Martin. Il ressort du compte-rendu de cet entretien que l'ambassadeur britannique accrédité au Maroc s'oppose à la reconnaissance britannique de la marocanité du Sahara, sous le prétexte que cela risquerait d'indisposer le gouvernement de son pays dans ses relations avec ses territoires autonomes d'outre-mer, notamment les Malouines (îles Falkland). Passons la légèreté de ce prétexte qui ne repose sur aucune logique géopolitique ou simplement géographique et sociétale, puisqu'il établit un improbable parallèle entre la situation du Sahara qui est collé et lié de manière matricielle au Maroc et un territoire situé à mille lieues de Londres (12.755 kilomètres!), peuplé d'un peu moins de 4000 habitants, en majorité de souche européenne, principalement britannique et scandinave, avec quelques descendants de colons français et une minorité de Chiliens. Passons aussi le fait que l'avis de monsieur Simon Martin, même s'il peut refléter une certaine tendance minoritaire au sein de la diplomatie britannique, n'engage que lui. Il ne constitue de ce fait qu'une voix divergente dont le poids ne pourrait peser outre-mesure sur la balance de la raison d'Etat qui reste, sur ce dossier spécifique du Sahara marocain, le principal déterminant et l'unique décideur. Retenons, en revanche, que l'affaire des propos polémiques de Simon Martin vient confirmer les bruits qui circulent depuis plusieurs mois sur le projet de reconnaissance britannique de la marocanité du Sahara. Une décision qui, comme on l'a vu avec les Etats-Unis d'Amérique de Trump et de Biden ou le Royaume d'Espagne de Sanchez et de ses éventuels successeurs, sera une vraie décision d'Etat pérenne et irréversible, complètement immunisée contre les aléas des alternances politiques et surtout contre les contraintes de duplicité qu'impose souvent l'exercice de l'art subtil de la diplomatie. C'est Daniel Varè, l'illustre diplomate italien, qui disait que «la diplomatie, c'est l'art de laisser l'autre défendre votre point de vue». Gageons et espérons que notre ami ambassadeur de la très subtile «Perfide Albion» soit un disciple de Varè.