Après la réélection du "speaker" de la première Chambre, les députés sont face à un agenda législatif chargé, à commencer par le bilan de mi-mandat. Décryptage. Le décor est planté. La session d'avril a démarré avec la réélection attendue du président Rachid Talbi Alami, candidat naturel du RNI à qui les partis de la majorité ont apporté unanimement leur soutien. Alami a été reconduit à son poste lors d'une séance plénière présidée, vendredi, par le député istiqlalien Hamdi Ould Rachid qui a dû diriger la séance en l'absence du député Rniste Mohamed Bouhdoud en tant qu'élu le plus âgé. Le règlement veut que le doyen des députés préside la séance dédiée à l'élection du président de la première Chambre. L'un des grands poids lourds du RNI, Rachid Talbi Alami, se voit reconduit à la tête de la première Chambre pour la troisième fois de sa carrière politique. Il a déjà présidé l'Hémicycle entre 2014 à 2017 quand il a succédé à l'istiqlalien Karim Ghellab, lors de la 9ème législature à l'époque du gouvernement Benkirane. Election naturelle du "speaker" En gros, le "speaker" a été ainsi réélu à 264 voix sur 324 exprimées, face au candidat malheureux du PJD, Abdellah Bouanou, dont la candidature a été une mesure protocolaire plus qu'autre chose. Ce dernier n'a eu que 23 voix. Dans un communiqué, le parti d'Abdelilah Benkirane a tenté de minimiser la défaite du président de son groupe parlementaire en arguant que ce dernier s'est présenté pour que le Parlement ne se transforme pas en une "annexe gouvernementale". Allusion faite à l'écrasante suprématie de l'alliance gouvernementale à l'Hémicycle.
L'opposition sombre dans les divisions Force est de constater que le candidat du PJD n'a même pas eu le soutien de ses propres alliés dans l'opposition, sachant que les députés de l'Union Socialiste des Forces Populaires n'ont pas voté pour lui, ce qui montre à quel point l'opposition est fissurée et ébranlée par les divisions. 37 bulletins blancs ont été recensés à l'issue du scrutin. L'attitude des députés socialistes s'apparente à une riposte au refus du PJD de voter le projet de motion de censure qu'allaient présenter les camarades de Driss Lachgar pour tenter de faire tomber le gouvernement. Ce projet est resté lettre morte et est tombé à l'eau avant le passage à l'action. Avant même la rentrée printanière du Parlement, le PJD a annoncé publiquement qu'il se désolidarisait de cette initiative prise, selon un communiqué publié à cette occasion, "de façon unilatérale". De toute façon, cette démarche punitive de l'opposition était vouée à l'échec dès le début puisque le texte n'avait aucune chance d'aboutir étant donné l'écrasante majorité du trio gouvernemental. Seul un gouvernement issu d'une majorité relative, tel qu'en France par exemple, peut redouter une telle initiative. "Même si elle était adoptée, elle n'aurait aucun impact sur le gouvernement, étant donné que l'alliance majoritaire actuelle est solide et cohérente", explique El Ayachi Al Ferfar, député du Parti de l'Istiqlal. Notre interlocuteur rappelle, néanmoins, qu'il s'agit d'une "démarche démocratique encadrée et garantie par la Constitution". L'opposition aborde la nouvelle session d'avril divisée et incapable de parler d'une seule voix face à une majorité resserrée qui a réussi, jusqu'à présent, à rester fidèle à sa charte fondatrice. Maintenant que le président de la Chambre des Représentants est élu, il reste aux députés d'achever la formation du Bureau de la présidence et, surtout, d'élire les nouveaux présidents des Commissions permanentes conformément à l'article 63 de la Constitution qui prévoit que "Le président et les membres du Bureau de la Chambre des Représentants, ainsi que les présidents des Commissions permanentes et leurs Bureaux, sont élus en début de législature, puis à la troisième année de celle-ci lors de la session d'avril et pour la période restant à courir de ladite législature". La concurrence est acharnée pour s'emparer de la Commission de la Justice et de la Législation. Le vent de changement concerne également les groupes parlementaires dont certains pourraient changer de président. Pour sa part, le Parti de l'Istiqlal n'a pas encore annoncé le successeur du chef de file de ses députés, Noureddine Modian, qui a suspendu son mandat provisoirement. Son remplacement ou son maintien à la tête du groupe fait toujours l'objet de discussions. Le grand oral d'Aziz Akhannouch attendu mercredi Par ailleurs, l'agenda de la session d'avril est chargé, c'est le moins que l'on puisse dire. Les députés sont face à des chantiers législatifs majeurs, à commencer par la discussion du bilan de mi-mandat que le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, s'apprête à présenter devant l'Hémicycle. Le Chef de l'Exécutif, rappelons-le, est attendu, mercredi, pour son grand oral devant les parlementaires des deux Chambres lors d'une réunion conjointe. L'opposition se tient en embuscade pour tenter de critiquer le gouvernement sur les points faibles tandis que la majorité juge le bilan honorable et très positif.
Un agenda législatif chargé Aussi, la session d'avril est synonyme de grandes réformes tant attendues telles que celle de la procédure civile qui continue d'être débattue au niveau de la Commission de la Justice à la Chambre des Représentants. Le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, est attendu également sur la réforme de la procédure pénale qu'il devrait transmettre au Parlement après en avoir exposé les grandes lignes au Conseil de gouvernement. Idem pour la réforme du Code de la famille dont les conclusions de l'Instance chargée de sa révision ont été soumises au Chef du gouvernement. En principe, le texte pourrait être soumis aux parlementaires dès cette session. Les débats s'annoncent intenses surtout du côté du PJD, dont le président, Abdelilah Benkirane, a sévèrement critiqué la réforme au point de menacer d'organiser une marche nationale. Le gouvernement, pour sa part, est face au défi de réussir le dialogue social en cours pour en sortir avec un compromis avec les syndicats avant le 1er mai. Au-delà de la hausse des salaires et la réforme de l'IR, la réforme des retraites dont les scénarios définitifs sont censés être finalisés dès avril 2023. Le retard des discussions, rappelons-le, est lié à la difficulté de la réforme que le gouvernement a remise à l'ordre du jour. En plus de cela, des textes législatifs de grande envergure devraient découler du nouveau round. Le texte lié à l'exercice de droit de grève est l'un des textes les plus prioritaires. Le ministre de tutelle, Younes Sekkouri, a promis un accord avant le 1er mai. Cet accord devrait apporter une série d'amendements au texte soumis au Parlement dès 2016 et qui devrait être dépoussiéré et reprogrammé au niveau de la Commission compétente. Le ministre se voit sous pression sachant que cette réforme figure parmi les trois textes législatifs à revoir dans l'accord social du 30 avril 2022 aux côtés de la loi relative à l'organisation des syndicats.