Entamé, il y a environ trois années, le processus de négociation du volet agricole de l'accord d'association liant le Maroc à l'Union Européenne s'est soldé, le 14 courant, par l'adoption de nouveaux protocoles. (Cf : « L'OPINION du vendredi 18 DECEMBRE 2009). Pour la partie marocaine, les termes de cet accord sont qualifiés de très favorables au Maroc et au développement des exportations de ses filières agricoles. D'autant plus que le nouvel accord, en plus du fait qu'il tient compte de la sensibilité de certaines filières qui demeurent encore fragiles dont la viande et les céréales et auxquelles une certaine protection est assurée, prévoit une révision à la hausse de quotas sur plusieurs produits stratégiques dont la tomate, l'olive et les agrumes… Ce qui fait qu'au département de l'Agriculture, l'on qualifie le nouvel accord de globalement équilibré et rapidement avantageux pour le Maroc et ses termes donnent à ce dernier largement le temps nécessaire pour mieux opérer une transition progressive dans le cadre du « Plan Maroc Vert » et du Plan Halieutis. Et les moyens aussi, dans la mesure ou, outre un accompagnement technique, un appui financier, et direct, et ciblé, en termes de normes sanitaires et phytosanitaires est tout aussi programmé. L'on précise aussi, une fois de plus, que ces protocoles agricoles respectent aussi la sensibilité de la production nationale et lui offre les délais nécessaires pour réussir le processus de modernisation et de mise à niveau tel qu'énoncé dans le cadre de la nouvelle stratégie agricole marocaine. En vue d'éclairer les lecteurs de « L'OPINION » sur les tenants et aboutissants d'un tel accord qui avant d'entrée en vigueur, doit être soumis aux institutions d'approbation des deux parties, nous reproduisons ci-dessous le détail de ces protocoles agricoles tels que relatés par une note d'information communiquée par le département de l'agriculture et de la pêche à l'occasion de la présentation de ces nouveaux protocoles agricoles. Synthèse du premier Accord d'Association Maroc-UE L'ancien accord d'association Maroc-UE fixait le cadre des échanges entre le Maroc et l'Union Européenne, mais ne traitait que les produits faisant partie d'un échange de concessions pour une liste limitée de produits et non un libre-échange. Il ne couvrait alors pas l'ensemble des produits agricoles, agricoles transformés et produits de la pêche. Les concessions accordées par l'UE étaient sous forme de quotas pour tous les produits phare de l'offre d'exportation marocaine. Il était donc restrictif pour les produits stratégiques de l'Offre Export Maroc. Par ailleurs, l'accord ne comprenait aucune disposition relative aux « Normes SPS » et aux Identités Géographiques (IG), aspects de valorisation nécessaire à la mise en œuvre du Plan Maroc Vert. Enfin, l'ancien accord prévoyait une mesure de sauvegarde globale pour tous les produits et ne dédiait pas de clause de sauvegarde spécifique pour les produits agricoles permettant de faire face aux perturbations du marché des denrées alimentaires. Cadre général de l'Accord La négociation de la libéralisation des échanges agricoles, agro-industriels et de la pêche entre le Maroc et l'UE s'inscrit dans le cadre de la feuille de route euro-méditerranéenne établie le 4 avril 2005 à Rabat et applicable à l'ensemble des pays méditerranéens adoptée par les ministres euro-méditerranéens des Affaires étrangères le 28 novembre 2005 sur l'accélération de la libéralisation du commerce des produits agricoles, des produits agricoles transformés et des produits de la pêche. Les négociations ont été menées par la Commission Européenne et le Royaume du Maroc. Cette feuille préconise le cadre suivant : Meilleur accès au marché européen pour les produits marocains et libéralisation progressive et asymétrique des échanges agricoles, agro-industriels et de la pêche pour permettre la mise en œuvre des ajustements nécessaires : • Suffisante pour la transition de modernisation prévue par le PMV (12 ans). • Convenable pour que le consommateur marocain puisse bénéficier des retombées positives d'une libéralisation (en termes de diversification de produits constituant le panier de la ménagère, en termes de qualité et en terme de prix) ; • Convenable pour que le producteur national (agriculteur et industriel) améliore sa compétitivité et sa productivité qui engendrerait une réduction des courts, voire des prix à la consommation. Exclusion d'un nombre limité de produits sensibles vu les conséquences négatives sur l'équilibre économique et social ; • A la production nationale et au revenu des agriculteurs constituant une part importante de la population nationale consommatrice. • Au principe de la sécurité alimentaire du pays en produits de base qui laisserait le consommateur national à la merci des fluctuations du marché mondiale de ces produits (la flambée des prix 2007-2008). Accompagnement du Maroc par l'UE dans le cadre de l'ouverture à travers le statut avancé en particulier pour le développement rural : • Pour la contribution conséquente à la mise en œuvre du PMV. Ceci permettra d'améliorer l'offre agricole agro-industrielle et de la pêche tant en terme de quantité que de qualité et de prix. • Pour la convergence réglementaire vers celle de l'UE tant en terme de SPS, de normes, de standards environnementaux et sociaux pour les produits agricoles, agricoles transformés et de la pêche qui garantirait un haut niveau de sécurité et de salubrité de produits agricoles pour les consommateurs des deux rives. Démarche adoptée Les négociations ont été menées dans le cadre d'une commission interministérielle regroupant les Départements concernés pour concertation : Finances, Affaires Etrangères, Agriculture & Pêche Maritime, Commerce & Industrie, Commerce Extérieur. La focalisation des négociations sur les exportations agricoles marocaines, s'est organisée conformément aux objectifs PMV (cohérence entre objectifs de production et niveaux d'exportation) et naturellement en concertation avec les opérateurs de ces filières exportatrices (COMADER, APEFEL, ASPEM, FICOPAM, AMPEX-FLEURS, AMSP, FINAGRI, FENIP, AMASCOP …). Dans le même sillage, l'importance accordée au sein des négociations à la protection des agriculteurs et des industriels nationaux pour les filières de production destinées à la consommation nationale a été appuyée par une collaboration étroite avec les opérateurs de ces filières (COMADER, Association de la Minoterie, AMIPAC, FNCL, FACM, COMADER, AFAC, ANDE, ANIL, UNCAL, ANOC, ANPVR, FISA, COPAG, ANEB, CHARCUTIERS, APFHM, ADEHO, ARGANOIL, ASPERT, IMIDEBOIS, AFAC, AFAMAR, ASMIT, BALIMAR, APS, AB2C, Amylum-Maghreb…) Les négociations ont été entamées le 22 février 2006, A ce jour, dix ronds de négociations ont été tenus entre les deux parties depuis l'examen et adoption des principes de cadrage de la négociation à l'élaboration et échange des nouvelles offres de chacune des parties. Au terme des négociations : des acquis significatifs et un timing favorable Des acquis significatifs dans le processus de négociations : - Un équilibre général positif avec des avancées significatives sur les quotas des exportations Maroc vs un niveau de protection élevé des filières nationales sensibles - un gain fiscal immédiat important : 1,7 Mds de gain Vs 0,7 Mds de concession - Un enjeu de prouver la capacité du Maroc à investir des quotas négociés à moyen terme - L'insertion dans l'accord d'une clause de rendez-vous proche : dès que les quotas sont atteints et au plus tard 3 ans Un timing très favorable à la conclusion de cet accord : - Avancée positive dans un contexte difficile de crise touchant particulièrement les exportations - Impact politique fort participant à la relance d'autres processus : Statut avancé (dont est composante l'accord en négociation), UPM,… - Visibilité permettant d'accélérer et orienter les investissements agricoles : renouvellement du positionnement des exportateurs actifs (nouveaux enjeux) et attraction de nouveaux investisseurs nationaux et internationaux sur des segments d'exportations élargis et / ou nouveaux (nouveaux players) Synthèse des résultats Volet agricole L'apport de ce nouvel accord d'association est d'abord un niveau de libération des échanges (par des importations en valeurs hors produits soumis à restriction spéciales dans le total des importations en valeur) pour partie marocaine dans dix ans de : • Offre agricole : 67 % • Offre agro-industrie : 92% • Offre pêche : 90 % Pour la partie européenne, le niveau de libéralisation des échanges est immédiatement de : - Offre Agricole 67% - Offre Agro-industrie 98% - Offre Pêches 100 % Pour le Maroc, ce niveau de libéralisation se traduit avec l'offre suivante : - Une libéralisation au terme de 10 ans (asymétrie temporelle) étalée sur 3 groupes : • Un premier groupe de produits à libéraliser dès signature de l'accord : essentiellement des intrants pour l'agriculture et l'agro-industrie nécessaire pour l'atteinte des objectifs du Plan Maroc Vert : animaux vivants reproducteurs, les semences y compris celle de la pomme de terre… • Un deuxième groupe de produits à libéraliser sur 5 ans : produits où le Maroc a un avantage comparatif clair et ne représentant pas de risque majeur pour les producteurs nationaux : • Un troisième groupe de produits à libéraliser dans 10 ans : Tous les produits nécessitant une longue période d'ajustement pour la production nationale : certains produits laitiers, les œufs, certaines légumineuses, les produits de la biscuiterie, chocolaterie et confiserie… - A l'exception d'une liste de produits qui ne sera pas libéralisée mais qui fera l'objet d'un accès particulier : 19 groupes de produits disposant d'un délai suffisant pour une profonde mise à niveau dans le cadre du PMV et critiques en termes de sécurité alimentaire du pays : les blés, les pommes, l'huile d'olive, le lait UHT… Des quotas limités ont alors été mis en place afin de stimuler la concurrence et contribuer à l'amélioration de la comptitivité. - Aucun concession supplémentaire pour le blé tendre (statu quo) Pour l'UE, ce niveau de libéralisation cité se traduit avec l'offre suivante : - Tous les produits libres dès l'entrée en vigueur de l'accord à l'exception de 6 produits exclus du libre échange avec accès garanti (amélioré) : Tomates ; Ail, Clémentine, Fraise ; Concombres, Courgettes, Sucre. - Pour les produits libres : pas de quota, pas de calendrier, pas de droits de douane, pas de prix d'entrée à l'exception de : • Artichaut et oranges : maintien du prix d'entrée conventionnel • Raisins de table, abricots, pêches / nectarines : octroi de prix d'entrée conventionnels (30% de réduction par rapport aux prix d'entrée OMC) • Autres produits soumis au prix d'entrée OMC : maintien du prix d'entrée OMC (raisons politiques intracommunautaires et engagement de l'UE vis-à-vis des autres partenaires tiers) - Instauration d'un mécanisme de consultation immédiate en cas de problème Le Maroc bénéficie d'une clause de préférence en cas d'octroi de réductions de prix d'entrée plus avantageuses à l'un des pays MED Volet Pêche Maritime Les nouvelles dispositions du nouvel accord sur le volet Pêche Maritime peuvent se résumer comme suit : - Maintien de l'accès libre des produits marocains au marché UE - Nouveau schéma d'accès au marché Marocain des produits de la pêche de l'UE • Un premier groupe de produits à libéraliser dès signature de l'accord : Thons à nageoires jaunes congelés, Salmonidés, hareng, caviar et succédanés en conserve… • Un deuxième groupe de produits à libéraliser sur 5 ans : produits où le Maroc a un avantage comparatif clair et ne représentant pas de risque majeur pour les producteurs nationaux : Maquereau et Sardine frais, réfrigérés, congelés ; Morues et Flétans salés, séchés, chairs de poissons • Un troisième groupe de produits à libéraliser dans 10 ans : Tous les produits nécessitants une longue période d'ajustement pour la production nationale : Les préparations et conserves de poissons, farine, poudres et agglomérés…