Aziz Daouda, qui a entraîné les plus grands athlètes marocains, nous explique que les stratégies d'acclimatation sont essentielles pour espérer réussir la CAN 2023 dans des conditions de fortes contraintes thermiques. Explications. * L'équipe nationale participe pour la 19ème fois de son Histoire à la Coupe d'Afrique des Nations, et a déposé ses valises à San Pédro, 10 jours avant le coup d'envoi de cette compétition pour un stage d'acclimatation. Une durée suffisante pour les Lions de l'Atlas qui comptent dans leurs rangs plusieurs joueurs internationaux, évoluant notamment en Europe ? Je suis persuadé que le staff de la Fédération Royale Marocaine de football a fait le bon choix. Il faut s'adapter à toute situation nouvelle, pas uniquement quand il s'agit de la Coupe d'Afrique, mais aussi quand il s'agit d'un match ou d'une rencontre quelque part. On avait la possibilité de séjourner pendant quelques jours à San Pedro où l'équipe nationale va disputer tous ses matchs de groupe. Généralement, il faut entre 10 et 14 jours pour s'y adapter. On a vu durant la première rencontre que les joueurs n'ont pas souffert ni de la chaleur ni de l'humidité. Il faut noter que ce n'est pas seulement une question de thermomètre. Effectivement, il fait une trentaine de degrés à San Pedro mais, c'est une ville côtière et une zone équatoriale, donc il y a beaucoup d'humidité. Ce qui fait que le ressenti en température est légèrement supérieur à ce qu'indique le thermomètre. Par exemple, quand le thermomètre indique 30°, on peut ressentir jusqu'à 36° quand le taux d'humidité est élevé. Je pense que le staff de l'équipe nationale a très bien fait de se rendre à San Pedro, 10 jours avant le coup d'envoi de la compétition. C'est intelligent et ça répond à des données physiologiques.
* A quel point ces conditions climatiques rendent la performance des joueurs difficile pendant les matchs ? Ce qui rend la performance difficile, pendant un match, c'est l'accumulation de l'acide lactique et le fait de faire de l'effort. Les joueurs courent entre 7 et 10 kilomètres sur 90 minutes. Quand on court, on produit l'acide lactique qui s'accumule et fait ressentir la fatigue. Les joueurs sont des professionnels qui savent ménager leurs efforts et récupérer quand il faut récupérer. Globalement, leurs corps sont adaptés à l'effort intense, donc ils s'y adaptent facilement. Après le match, la récupération est nécessaire mais aussi pendant les changements.
* Pensez-vous qu'un stage d'acclimatation en altitude aurait été meilleur qu'en plaine ? Effectivement, les stages d'altitude sont bons pour permettre à l'organisme de produire un maximum de globules rouges et de disposer d'un maximum d'oxygène indispensable à la consommation immédiatement. Les données ne sont pas très stables. Quand on descend de l'altitude, au bout de quatre ou de cinq jours, on retrouve le niveau normal. Paradoxalement, quand on s'entraîne dans un climat sous une grande température, on produit la même chose. L'organisme produit aussi des globules rouges et de l'hémoglobine pour permettre une meilleure oxygénation au niveau des cellules musculaires. Théoriquement, les joueurs vont revenir de la Coupe d'Afrique avec un bon potentiel.
* Quel est le protocole d'acclimatation dans cet environnement ? Il faut d'abord adapter le sommeil et les températures ambiantes. Quand il fait chaud, on a tendance à mettre de la climatisation, ce qui peut poser des problèmes de santé et de refroidissement. Il faut que les températures soient optimales dans les chambres. A côté de cela, il y a l'alimentation à laquelle il faut accorder beaucoup de soins, notamment quand il s'agit d'hydratation et de perte en sels minéraux. Dans un climat pareil à celui de San Pedro, on transpire beaucoup. En transpirant, on élimine beaucoup de sels minéraux qui sont essentiels à la contraction musculaire et au fonctionnement des cellules, au risque de blessures. Le staff marocain a suffisamment d'expérience et de connaissances pour permettre aux joueurs de récupérer au maximum. Portrait : Aziz Daouda, un dénicheur de talents Aziz Daouda n'est plus à présenter. Il est un fabricant de champions et a permis à plusieurs générations de se développer via la pratique de l'athlétisme. Quand l'envie de transmettre aux autres a été plus forte, Aziz Daouda a mis sa propre carrière d'athlète de côté. Il entraîne plusieurs personnalités de l'athlétisme dont Fatima El Faquir, Saïd Aouita et Nezha Bidouane. Il est également manager de vedettes de l'athlétisme marocain et mondial avec lesquels il a gagné plusieurs titres et battu des records du monde dont Saïd Aouita, Hicham El Guerrouj, Nezha Bidouane, Jawad Gharib, Hasna Benhassi, Salah Hissou. Derrière chaque sportif d'exception se cache un grand entraîneur. L'adage est bien connu dans le monde du sport ! En outre, il a occupé plusieurs postes de responsabilité en tant qu'enseignant universitaire à l'Institut Royal de la Formation des Cadres (IRFC) tels que : Directeur des études et cadre du ministère de la Jeunesse et des Sports, Chef de service, Chef de division et Chargé de la Direction des Sports. Au sein du ministère, il initie et intervient sur plusieurs projets notoires d'infrastructure et d'organisation, en qualité de coauteur de la première loi sur le sport et l'éducation physique promulguée au Maroc. Après des études primaires, secondaires et universitaires à Rabat, en sa qualité d'athlète, il bénéficie d'une bourse d'études à l'Institutut de Educatia Fizica Bucuresti en Roumanie où il obtient le diplôme des études supérieures en éducation physique, spécialité : athlétisme, en 1977. Après un bref séjour au Maroc, il repart au Canada en 1980 où il poursuit des études à l'Université de Montréal en Sciences de l'activité physique - Msc Physiologie de l'effort.