Dans des déclarations faites à la chaîne Al-Jazeera, le président Tebboune révèle les incohérences de sa politique sur les différents sujets qu'il a eu à aborder Dans un entretien accordé à la chaîne qatarie Al-Jazeera, non encore diffusé et pas encore commenté par la presse algérienne, le président algérien a mis au grand jour les incohérences de sa politique extérieure. Cet entretien, le deuxième du genre après celui de juin 2021, depuis son entrée au palais présidentiel d'El-Mouradia, vient confirmer les caries d'une diplomatie suffisamment secouée par la valse de ses ministres des Affaires étrangères. Trois ministres (Sabri Boukadoum, Ramatane Lamamra et Ahmed Attaf) en trois années. Ramatane Lamamra, présenté comme un diplomate chevronné, n'a pas tenu plus d'un an et huit mois sous le pouvoir de Tebboune. En abordant les sujets concernant les trois pays clés dans les relations de l'Algérie avec son environnement immédiat, selon les premiers extraits écrits diffusés sur Al-Jazeera.net et repris par le portail de la présidence de la république algérienne, Abdelmadjid Tebboune n'arrivera pas à convaincre les observateurs de la scène politique algérienne du bien fondé de ses positions. A court d'arguments, le président algérien semble prendre les choses avec légèreté en usant d'un langage simpliste et incohérent.
Avec le Maroc, le point de non-retour
Des relations de l'Algérie avec son voisin marocain, le président Tebboune se contente d'une laconique « elles ont atteint un point de non-retour ». Sans fournir le moindre argument ni avancer une seule raison qui lui fait prononcer pareille sentence. Exagérément belliqueux, le régime du duo Tebboune-Chengriha semble battre de l'aile depuis les remontrances que lui a faites Washington en baissant le ton dans ses déclarations intempestives contre le Maroc. Il opte, aujourd'hui, pour le silence en évitant de parler de son voisin de l'Ouest. Cette déclaration laconique en est la preuve éclatante. Tebboune n'avance pas une seule raison qui justifie cette rupture dont souffrent beaucoup plus les populations algériennes et marocaines et plus particulièrement les transfrontaliers. Pourtant, il n'échappe pas à l'observateur averti que cette hostilité avérée du régime algérien à l'encontre du Maroc s'explique aisément par la volonté de maintenir « le danger extérieur » pour justifier la répression sur un peuple qui refuse de lui accorder la légitimité populaire qui lui fait défaut depuis son accession au pouvoir à bord d'un char d'une armée dont plus d'une cinquantaine d'officiers généraux sont en prison pour enrichissement illicite et détournements de deniers publics. L'autre raison de cette rupture se trouve dans le développement socio-économique que connaît le Maroc depuis quelques années et qui fait rougir de honte un régime algérien beaucoup mieux nanti financièrement. Enfin, l'autre raison de cette réponse laconique réside dans le fait que la chaîne qatarie ne souhaite pas ouvrir au président algérien une tribune pour déverser son venin contre le Maroc, pays plus proche politiquement du Qatar que l'Algérie. Selon des sources proches de la chaîne qatarie, cet entretien a été réalisé à la demande des autorités algériennes. C'est le deuxième du genre en trois ans de pouvoir du duo Tebboune-Chengriha. Et, pour ne pas froisser le président algérien, Al-Jazeera a délégué une journaliste algérienne, en l'occurrence Khadija Benguenna, une ancienne de la télévision publique algérienne. Il en a été de même pour le premier entretien de 26 mn réalisé en juin 2021 par un autre journaliste algérien, Abdelkader Ayadh. Deux entretiens dans lesquels on ne fait que « servir la soupe » comme on dit dans le jargon journalistique. Et on ne peut trouver mieux que deux anciens journalistes algériens de la télévision publique pour servir la soupe à leur président. L'enfant gâté de l'Elysée De la France, Tebboune déclare que les relations de son pays avec l'ancienne puissance coloniale sont « fragiles ». Mais, il annonce que l'ambassadeur d'Algérie à Paris ne tardera pas à retourner à son poste après avoir été rappelé le 8 février dernier pour une raison que nul autre Etat dans le monde ne lui aurait accordé crédit. C'est l'affaire de l'opposante franco-algérienne, Amira Bouraoui, qui a regagné la France à partir de la Tunisie en fuyant l'Algérie clandestinement. Il est bon de rappeler qu'Alger avait dans un premier temps rappelé son ambassadeur à Paris le 2 octobre en réaction à des propos, relayés par Le Monde, du président français, Emmanuel Macron, qui affirmait que l'Algérie, après son indépendance en 1962, s'était construite sur « une rente mémorielle » entretenue par « le système politico-militaire ». Et ce n'est que trois mois plus tard, soit le 6 janvier 2022, qu'Alger rétablit son ambassadeur à Paris. Par ses agissements envers la France, tantôt frondeur, tantôt conciliant, le président algérien donne l'image d'un enfant gâté qui croit faire avancer son statut d'ancien colonisé pour jouir des faveurs de l'Elysée.
L'Espagne, ce nouvel ennemi L'autre point soulevé dans l'entretien accordé ou plutôt demandé à la chaîne Al-Jazeera, est celui concernant les relations algéro-espagnoles. Un point qui révèle l'étendue de la méconnaissance du président algérien du fonctionnement des institutions des Etats démocratiques. Sinon, comment expliquer que le président Tebboune n'a rien trouvé d'autre à dire au sujet du soutien de Madrid au plan d'autonomie des territoires du Sud du Maroc proposé par le Royaume alaouite pour clore le dossier du Sahara occidental (ndlr : Sahara marocain).
Pour Abdelmadjid Tebboune, ce soutien madrilène est le fait du seul Premier ministre ibérique Pedro Sanchez. Comme si, en Espagne, un Premier ministre pouvait mener à sa guise la politique de son pays sans avoir besoin de l'approbation du parlement et des autres institutions de l'Etat. Et d'ajouter : « L'Espagne feint d'ignorer qu'elle était la puissance colonisatrice et continue d'avoir une responsabilité sur le territoire sahraoui ». C'est comme s'il demandait aux anciennes puissances coloniales de continuer d'exercer leur pouvoir sur leurs anciennes colonies. L'accepterait-il dans ce cas à l'Algérie ? C'est à ne rien comprendre avec un homme, qui montre, à chacune de ses sorties médiatiques, ses limites en matière de connaissances politiques. Et lorsque le président algérien affirme qu'il « maintient le contrat gazier avec l'Espagne, c'est juste par pitié envers le peuple espagnol pour lui permettre de se réchauffer ». Une déclaration qui se passe de tout commentaire.