Alors que le Maroc connait un stress hydrique inédit, le ministre de l'équipement et de l'eau, Nizar Baraka a détaillé, ce mercredi, les mesures prises pour garantir une meilleure gouvernance des ressources en eau et éviter les scénarios catastrophiques. Le Royaume a connu de façon cyclique des phases aiguës de sécheresse, dont les plus importantes se sont produites entre 1940-1945 et 1980-1985, mais il n'en demeure pas moins que les deux dernières années ont été les plus sec de l'histoire du pays. Les précipitations totales durant cette se sont élevées en moyenne à un peu plus de 100 mm, créant des problèmes structurels pour les stocks hydriques, a expliqué, mercredi, Nizar Baraka, qui a été l'invité du Forum de la MAP sous le thème « Stress hydrique : les mesures prises et les perspectives d'avenir ». Le ministre a noté, toutefois, qu'entre le 1er septembre 2022 et le13 février courant, le Maroc a connu d'importantes précipitations avec une moyenne nationale de 75,9 mm au lieu de 38,8 mm durant la même période une année auparavant, soit une amélioration de 95,6%, ce qui prête à l'optimisme, sachant que les prévisions météorologiques annoncent d'importantes chutes de neige dans les jours à venir. Dans ce sens, la superficie couverte par la neige a atteint 5.720 km2 contre 4.480 km2 durant l'année précédente, soit une hausse de 30%, a précisé Baraka, notant que les ressources hydriques se chiffrent aujourd'hui à 2,15 milliards m3, soit une hausse de 192% par rapport à la même période de l'année dernière. L'interconnexion du Sebou et du Bouregreg pour bientôt Face au recul inquiétant des ressources hydriques, exacerbé par la sécheresse, le gouvernement a lancé une série de mesures, dont le dessalement de l'eau de mer pour répondre aux besoins en eau des régions côtières et leur permettre de développer leur agriculture, ainsi que le chantier d'interconnexion des bassins hydrauliques, a ajouté baraka. Sur ce dernier point, le ministre a souligné que le Bassin hydraulique de l'Oum Er-Rabia fait particulièrement face à la raréfaction des ressources en eau. Pour résoudre ce problème, un projet d'interconnexion des bassins du Sebou, Bouregreg, Oum Er-Rabia et Tensift, a été lancé tous azimuts, a-t-il commenté, ajoutant que « les travaux de la première phase de ce projet, lancés le 15 décembre 2022, et qui consiste en l'interconnexion du barrage de garde du Sebou et du barrage Sidi Mohammed Ben Abdellah au niveau du bassin de Bouregreg, s'achèveront l'été 2023 ». Cette première tranche, d'un débit de 15 m3/s, permettra de subvenir aux besoins en eau potable de la zone d'action d'environ 400 millions de m3 annuellement. Concernant le dessalement de l'eau de mer, Nizar Baraka a noté que des projets sont en cours de réalisation notamment à Safi, El Jadida, Dakhla, Sidi Ifni et Casablanca. Cette dernière sera dotée d'installations de production d'une capacité totale de 300 millions de m3 par an, dont la réalisation est prévue à partir de 2026, selon les chiffres dévoilés par le ministre de l'Equipement et de l'Eau. Le projet de réutilisation des eaux usées est une autre option importante pour faire face au défi posé par le manque d'eau dans le pays, pour le domaine de l'irrigation. Le ministre a fait savoir que 100 millions de m3 d'eaux usées seront utilisés dans le cadre du projet de généralisation de la réutilisation de ces eaux traitées pour l'arrosage des espaces verts dans la conurbation de Rabat, Salé, Kénitra, Skhirat, Témara, Tanger, Tétouan, M'diq, Marrakech. «Le recours au dessalement de l'eau de mer permettra aux villes côtières de parvenir à l'autosuffisance, faisant ainsi profiter le monde rural et le secteur agricole des ressources hydriques provenant des montagnes», a relevé le ministre. Haro sur le gaspillage ! Parallèlement, Nizar Baraka a mis le doigt sur le gaspillage en ressources que constitue l'exploitation excessive des eaux souterraines, conséquence de la prolifération de pratiques et comportements de consommation irresponsables. Le ministre a ainsi mis en garde contre le risque d'accentuer la pression sur les eaux souterraines. Il a relevé, dans ce sillage, que plus de 80% des puits au Maroc ne sont pas autorisés. Répondant à une question de «l'Opinion» sur le rôle de la police de l'eau, qui a comme vocation principale de surveiller le domaine public hydraulique et de le protéger contre toute utilisation illégale ou abusive, le ministre nous a admis sans ambages : «Les ressources humaines et financières sont minimes » avant de préciser qu'à cela s'ajoute la difficulté d'accès à certaines zones agricoles. In fine, le ministre a esquissé les contours de la stratégie de communication et de sensibilisation liée au Programme national pour l'approvisionnement en eau potable et d'irrigation (2020-2027), en vue de sensibiliser les usagers de l'eau potable et de changer les comportements vis-à-vis de son utilisation pour consolider un environnement propice à l'atteinte des objectifs définis. Concernant l'étape à venir, le responsable gouvernemental a affirmé ne pas avoir une boule de cristal pour prédire comment évoluera la situation. Mais ce qui est sûr, c'est que la protection des ressources en eau est un enjeu existentiel qui requiert l'engagement des divers acteurs de la société aux côtés des citoyens.