L'entrée en vigueur de l'embargo de l'Union Européenne sur les produits pétroliers russes aura lieu le 5 février. C'est une course contre la montre pour la Russie, qui a intensifié les exportations de ses produits pétroliers vers plusieurs pays, dont le Maroc. Depuis le début de cette année, la Fédération de Russie a augmenté ses expéditions d'exportation de carburant diesel vers le Maroc et la Turquie notamment, et ce, à l'approche de l'embargo sur la fourniture de produits pétroliers russes aux pays, tel que décidé par l'Union Européenne (UE) , selon les informations des médias russes. La Fédération de Russie représente environ 40 % des importations maritimes totales de carburant diesel vers l'UE, mais à partir du 5 février 2023, les pays européens seront obligés de chercher un autre fournisseur pour remplacer le produit russe. Dans sa quête de nouveaux acheteurs, Moscou redirige les flux énergétiques vers l'Asie, l'Afrique et l'Amérique latine. Les données de Refinitiv montrent que les livraisons de carburant diesel de la Russie au Maroc, le mois dernier, se sont élevées à environ 150.000 tonnes. En 2022, les exportations totales dudit carburant étaient d'environ 735.000 tonnes, après 66.000 tonnes une année plus tôt. En janvier 2023, les mêmes sources indiquent qu'environ 140.000 tonnes de produits ont déjà été expédiées du port baltique de Primorsk vers le Maroc. Selon les données datant du mois de novembre 2022 de Volza - institution de fourniture des informations stratégiques - l'approvisionnement du Maroc en diesel a été effectué par 86 importateurs marocains auprès de 71 fournisseurs. D'après l'institution, le Maroc importe la majeure partie de son diesel d'Inde, de Turquie et d'Espagne, avec respectivement 2,135 expéditions de l'Inde suivies de la Turquie - soit 829 - et de l'Espagne, qui se situe à la 3ème place avec 267 expéditions, totalisant ainsi 4.880 lots d'importations jusqu'au 03 octobre 2022. Plusieurs observateurs préconisent le marché indien ou le Moyen-Orient, comme alternative, pour les approvisionnements futurs du Maroc en diesel, et ce, après l'entrée en vigueur le 5 février de l'embargo de l'UE sur le carburant russe. En octobre 2022, l'Inde a notamment supprimé une taxe d'exportation sur le kérosène et réduit de moitié les droits d'exportation sur le diesel, à 5 roupies par litre. Les sanctions de l'UE sur les produits pétroliers russes auront un impact plus important que les restrictions sur le pétrole, avec pour résultat une chute prévisible du raffinage du pays de 15% en moyenne en 2023, a déclaré à Reuters une source proche des milieux industriels. Qu'en est-il du diesel russe ailleurs ? Les données de Refinitiv montrent également qu'en décembre de l'année dernière, les expéditions offshore de carburant diesel et de gazole à faible teneur en soufre de la Russie vers la Turquie ont dépassé 750.000 tonnes. En général, au cours de l'année écoulée, elles sont passées à 5,05 millions de tonnes, contre 3,99 millions de tonnes en 2021. Depuis le début de ce mois, les exportations de carburant diesel russe vers la Turquie ont atteint 450.000 tonnes, selon Refinitiv. D'après la même source, la Russie a exporté plusieurs lots de gazole en décembre et janvier au Ghana, au Sénégal, en Libye, en Uruguay et en Côte d'Ivoire. Un lot de gasoil d'un volume d'environ 33.000 tonnes a été acheminé en janvier de Primorsk vers le Brésil. En juillet de l'année dernière, le président sortant du Brésil Jair Bolsonaro avait déclaré que les autorités de son pays négociaient avec la Russie l'achat de carburant diesel, sachant que les livraisons vers la destination brésilienne restent pour l'instant sporadiques. Pendant ce temps, la part du lion du carburant diesel exporté de la Fédération de Russie reste toujours accaparée par l'Europe, qui, profitant de gros volumes d'approvisionnement, alimente à flot ses réserves en carburant russe avant l'embargo. La reconversion des livraisons à l'exportation de produits pétroliers russes de l'Europe vers les pays d'Asie, d'Afrique et du Moyen-Orient dépendra non seulement du réel impact de l'embargo, mais aussi du prix plafond que les pays du G7 prévoient de fixer, selon les acteurs du marché. «De toute évidence, certaines routes vont se mettre en place pour remplacer les flux de fret de la Russie vers l'Europe, et profiteront au carburant en provenance d'Asie et du Moyen-Orient. Février ne sera pas facile », a déclaré l'un des commerçants.