A l'occasion de la quatrième édition du programme « DigiGirlz Mentorship », la cheffe du projet, Chaimae Drissi Smaïli, nous dévoile la situation de l'entrepreneuriat féminin au Maroc. Entretien. - Qu'est-ce que DigiGirlz Mentorship ? - Initié par l'association Anoual et l'ambassade des Etats-Unis au Maroc, "DigiGirlz Mentorship Program" est une compétition qui vise à encourager les jeunes filles à s'impliquer et à innover dans les domaines de la technologie, le tout en favorisant la transmission et l'entraide. Lancé au Maroc en 2017, plus de 1500 jeunes filles ont bénéficié du programme. L'objectif de DigiGirlz est de promouvoir l'éducation scientifique chez les filles marocaines, l'égalité entre les sexes, encourager l'enseignement des technologies de l'information et mettre en avant les compétences féminines dans le domaine de la technologie. - En quoi consiste concrètement l'accompagnement que vous assurez aux entrepreneures ou futures entrepreneures ? - Pendant 6 mois, les participantes du programme DigiGirlz Mentorship ont pu bénéficier de formations théoriques et d'ateliers pratiques portant sur diverses thématiques : démarrage technologique d'une startup, planification de carrière, networking et rencontres avec des experts. Notons que ces formations représentent un accompagnement sur les projets IT propres des filles. Le programme traite des thèmes des formations, notamment le Team Building, l'Identification de la problématique, l'Idéation, le modèle économique, la structure des coûts, la modélisation et le prototyping. - Quels sont les freins qui expliquent les difficultés des femmes entrepreneures à se développer ? - L'entrepreneuriat reste un parcours inégalitaire pour les femmes. Plusieurs difficultés entravent le parcours des femmes entrepreneures. La femme, dans notre société, a plusieurs rôles. La conciliation entre la vie professionnelle et la vie familiale a un impact majeur. Pendant longtemps, la femme s'est occupée de la sphère privée et familiale : ménage, éducation des enfants, cuisine. Elle supporte à elle seule la charge mentale de l'organisation familiale et se voit renoncer des fois à ses propres rêves. Le manque de soutien de son entourage et le sexisme est l'un des défis que rencontre la femme entrepreneure. Il est parfois compliqué de ne pas céder aux peurs de l'entourage. Aujourd'hui, le faible niveau de socialisation des filles est l'un des défis majeurs qui limite le développement de certaines aptitudes nécessaires à l'entrepreneuriat, tels le goût de l'innovation et le sens de risque. D'où l'initiative DigiGirlz. - Comment peut-on promouvoir l'entrepreneuriat féminin à l'échelle nationale ? - La promotion de l'entrepreneuriat féminin repose sur plusieurs facteurs. Briser les stéréotypes et favoriser l'égalité de genre en matière d'entrepreneuriat est essentiel. Cela commence bien évidemment par une sensibilisation des jeunes, dès leur bas âge, lors de leur orientation scolaire, pour cesser d'avoir une approche genrée des métiers. L'école doit aussi faire apprendre à nos enfants les softs skills, une base primordiale pour tout entrepreneur. En développant leurs compétences non techniques, les femmes peuvent bénéficier des moyens d'agir en les encourageant à développer leurs activités et à se lancer avec succès dans des secteurs dominés par les hommes. - Depuis le début de la pandémie, on remarque que les femmes manifestent un fort esprit entrepreneurial. Comment expliquez-vous cette manifestation ? - Nombreux sont les projets qui ont vu le jour durant la pandémie pour répondre aux problématiques sociales du moment. Le nombre d'entreprises créées a connu une hausse spectaculaire. Chez la femme, la période de confinements a fait éclore des envies d'indépendance et des changements de vie. La crise sanitaire a aussi amplifié plusieurs tendances de fond et les consommateurs ont des attentes et des exigences nouvelles : prise en compte de l'impact environnemental, consommation locale, circuit court, solidarité et entraide, transformation digitale... Les femmes ont su profiter de la situation pour se lancer. Recueillis par Rime TAYBOUTA Activité et emploi des femmes, une réalité alarmante
Au plan national, les femmes représentent 26,8% des 11,3 millions que compte la population active. Le taux d'activité des femmes est de 25,1%, soit trois fois moins que celui des hommes. Il est particulièrement bas en milieu urbain : 17,5%, contre 36,8% en milieu rural. A titre de comparaison, au niveau mondial, les taux d'activité des femmes et des hommes se situent à 51,8% pour les femmes et 77,7% pour les hommes. Au sein de la région MENA, qui affiche les plus faibles taux d'activité des femmes dans le monde, entre 15,2% et 33,2%, le Maroc se situe dans la moyenne. Non seulement le taux d'activité féminin est bas, mais il a enregistré une baisse de 5,7 points entre 1999 et 2012, cette baisse n'étant que partiellement due à l'effort de scolarisation des filles en milieu rural. Par ailleurs, si l'activité des femmes au Maroc est faible et se réduit, ce phénomène s'accompagne d'un réel problème de définition. D'après la définition du HCP, les filles âgées de 10 à 15 ans, non scolarisées, sont considérées comme des « femmes au foyer », ce qui est contraire à la définition de l'enfant et en total désaccord avec les droits de l'enfant. Moins du quart des femmes en âge de travailler dispose d'un emploi A fin 2012, le Maroc comptait 2,74 millions de femmes actives occupées (1,03 million en milieu urbain et 1,71 en milieu rural). Le taux d'emploi féminin en 2013 était de 22,7%25 au Maroc (contre 66,4% pour le masculin), alors qu'il avoisinait les 50% au niveau mondial. En recul depuis 2000, il devrait, selon le HCP, poursuivre cette tendance à la baisse.