Qui a dit un jour, en le prouvant, que le raï n'était pas algérien ? Personne et surtout pas les stars du genre, naturalisées marocaines, Faudel et Khaled. Le solennel site d'information «Algérie patriotique» se fourvoie en accusant le méchant voisin de vouloir ajouter à son enviable patrimoine une couleur musicale qu'il n'a jamais officiellement revendiquée. Mieux : le vénérable site confond chioukhs et chebs. Avec ce reproche qui tombe sous le sens : «Le Maroc a, de tout temps, tenté de s'approprier le raï en organisant des festivals en y invitant des chanteurs algériens, notamment les plus célèbres d'entre eux.» Reconnaissance ou chapardage ? Le raï est algérien et les Marocains s'y greffent comme le font des Blancs pour le blues ou des Arabes pour le rap. Le raï est algérien comme l'universalité de la musique. Le raï est algérien comme un riche mode d'expression. Le raï finit par appartenir à une culture sans partage, à un épanouissement global dès qu'il est pensé et rendu avec art. Le raï puise son existence dans le riche répertoire chaâbi d'un pays qui a donné Wahbi, Deriassa, El Harrachi... et plus tard l'inégalable Bellemou. On pense également à Djenia Lekbira, à Rimiti sans sourciller, à Fatma El Khadem, à Habiba El Abassia..., à cette richesse contagieuse, à ces deux peuples qui communiquent allégrement par les sons et les mawals faits pour les unir en enjambant les frontières. L'Algérie se bat depuis 2016 pour que l'UNESCO reconnaisse le raï comme patrimoine immatériel de l'humanité. Verdict en décembre prochain. Croisons les doigts entre Reggada et 3laoui. Anis HAJJAM