Les juristes convaincus que la méthode du droit, fondée sur l'analyse des faits et le contradictoire, doit primer toute considération contextuelle, pouvaient espérer du Tribunal de l'Union européenne, une décision consacrant la légalité des accords tarifaires conclus entre l'UE et le Maroc, sur des motifs rigoureux. Cette espérance a été ensevelie sous une avalanche de déclarations, dont aucune n'a valeur de démonstration en raison du refus de discussion des arguments développés par le Conseil et la Commission. Au Tribunal de Luxembourg, on manie la technique pourtant dangereuse du syllogisme. En premier lieu sur la capacité d'ester en justice 1. Que le Front Polisario ne soit pas un sujet de droit international est établi. 2. Mais cela n'empêche pas que sa capacité d'agir devant le juge de l'Union lui soit reconnue. 3. Dès lors «le rôle et la représentativité du requérant sont de nature à lui conférer» cette capacité. Puis sur le défaut de qualité pour agir, c'est-à-dire sur l'intérêt à agir du Polisario. 1. Ces accords affectent le peuple du Sahara. 2. Le Polisario représente le peuple su Sahara. 3. Le Polisario est donc affecté par ces accords. Puis vient le fond de la question. Ces accords ont-ils respecté les règles du droit international et spécialement de la jurisprudence de la Cour de Justice européenne ? 1. Les parties à ces accords avaient l'obligation de s'assurer du consentement du peuple du Sahara. 2. Les démarches entreprises par l'Union ne lui ont pas permis de recueillir ce consentement. 3. Ces accords sont donc nuls. Le tout est couronné par une formule lapidaire. Le critère des bénéfices que la population tire de ces accords n'a aucune signification. Appel sera formé devant la Cour. Ce jugement va donc rejoindre sur la même étagère poussiéreuse, les autres décisions hostiles au Maroc, au Conseil et à la Commission, de la justice de l'Union. Ces accords vont donc se poursuivre dans la légalité. Viendra le temps ou les juges regarderont les réalités des enjeux et de l'adhésion du peuple au développement du Sahara. Qu'impliquent ces accords ? * Tout d'abord de bonnes relations Nord Sud. * Ensuite des capacités d'exportation renforcées, en raison de la suppression de certains droits de douane. * Mais pour le Maroc les enjeux globaux sont minimes. Le peuple y consent-il ? Les dernières élections de septembre 2021 ne font-elles pas la démonstration la plus concrète et tangible du consentement du peuple ? Quoi de plus significatif que cette participation massive et unitaire ? Ce que le monde entier reconnait, parce qu'il voit et entend, le Tribunal l'ignore, semblant aveugle et sourd. Il fait au contraire la leçon au Conseil et à la Commission ; il leur dit qu'il est possible « de recueillir, en pratique le consentement du peuple ». Mais il ne va pas jusqu'à leur dire Comment ?
Hubert Seillan, Docteur d'Etat en droit, avocat au barreau de Paris