17 ans après son adoption dans les universités marocaines, le système « LMD » va désormais être supprimé au profit du système « Bachelor ». À ce titre, le Doyen de la Faculté des Sciences Dhar El Mahraz, Mohamed Benlemlih, va nous expliquer le quoi, le pourquoi et le comment de cedit système qui promet monts et merveilles. Eclairage - La rentrée universitaire qui aura lieu prochainement est marquée par l'entrée en vigueur du système «Bachelor», comment l'Université Sidi Mohammed Ben Abdellah se prépare-t-elle pour démarrer cette rentrée assez particulière ? - L'université Sidi Mohammed Ben Abdellah se prépare pour l'entrée en vigueur de l'excellent système du Bachelor pour la rentrée 2021-2022 à travers l'élaboration d'un programme d'études basé sur des filières professionnalisantes, des modules de soft skills et des modules de langues. Ce nouveau système qui vise principalement les établissements à accès ouvert, dont l'Université Sidi Mohammed Ben Abdellah fait partie, pourrait aider à faire avancer les Universités marocaines dans les classements mondiaux et sera très efficace car il vise une formation qui répond aux besoins du marché de travail, problème dont souffre le système éducatif national qui propose des formations purement théoriques. - Parmi les raisons fondamentales de la mise en place du «Bachelor», c'est justement de créer une adéquation entre le marché de travail et le système universitaire. Dans quelle mesure cette architecture pédagogique contribuera-t-elle à la cohérence des deux mondes? - En fait, la Faculté a été édifiée en principe pour transmettre un savoir, des connaissances mais nul ne peut nier les grandes failles dont a fait preuve le système LMD pendant des années. Les lauréats de ce système ont bénéficié d'une formation purement théorique qui certainement est nécessaire, mais qui reste inutile sur le marché de travail si elle n'est pas conjuguée avec un savoir-faire exploitable dans la pratique. Pour le système Bachelor, l'étudiant recevra certainement des cours de théorie, comme c'est le cas pour l'ancien système, mais ce n'est que pendant la première année et encore moins en deuxième. A partir du cinquième semestre, c'est la pratique qui l'emportera. A titre d'exemple, un étudiant de chimie sera amené dès la troisième année à effectuer des expériences et analyses lui permettant de comprendre le comment du métier afin de s'intégrer facilement par la suite dans le marché de travail. - Les Soft skills et l'apprentissage de langues sont au cœur de ce nouveau système. Pourquoi à votre avis le Bachelor, contrairement à l'ancien système, insiste sur ces deux éléments dans sa stratégie ? Et à quel point leur acquisition pourrait faciliter l'insertion sur le marché de l'emploi ? - Outre les compétences linguistiques, notamment en français et en anglais, que le Bachelor vise à faire acquérir aux étudiants, les soft skills prennent part également à cette nouvelle stratégie. Ces soft skills visent à forger une forte personnalité de l'étudiant, et lui redonnent confiance en soi. Des cours en la matière seront assurés dès la première année occupant, avec les cours de langues, la plus grande partie du volume horaire consacré aux deux premiers semestres. Concernant l'insertion professionnelle, le Bachelor vise à améliorer le niveau des étudiants en communication, aussi bien sur le niveau linguistique que pragmatique. Les lauréats de l'ancien système, bien qu'ils soient excellents en leurs matières de spécialité, restent très moyens en matière de communication et de langues et ne savent pas se vendre. Ce nouveau système survient afin de combler ces lacunes. - Tous ces projets d'envergure sont certes prometteurs, toutefois, dans quelle mesure sont-ils réalisables sur le plan budgétaire? - A ce propos, nous nous sommes réunis plusieurs fois avec le ministre. Le budget universitaire a été multiplié par 5 par rapport aux années 2000, - j'étais membre du Conseil de la Faculté à l'époque-, mais cela reste insuffisant. Des recommandations ont été formulées pour augmenter le budget octroyé pour chaque établissement universitaire. Si à l'instar de la France, l'Etat arrive à nous octroyer 5000 Dh par étudiant, nous pourrons réussir facilement le projet de Bachelor. - A l'international, le degré d'attractivité des Universités et établissements de formation est lié à la réputation des diplômés sur le marché du travail et la renommée scientifique des enseignants chercheurs, et comme on accuse nos Universités d'un grand retard en matière de recherche scientifique. Selon vous, comment peut-on y remédier tant au niveau des professeurs chercheurs qu'au niveau des étudiants chercheurs ? - En 2020, les résultats sont satisfaisants, l'Université Sidi Mohammed Ben Abdellah a été classée première pendant trois années et depuis 2018 selon le classement international Time High Education (THE), même si nous ne sommes pas en haut du classement de Shanghai qui se base notamment sur le nombre de publications dans les grandes revues scientifiques comme Nature. Les Etats-Unis, pays où la recherche scientifique est très développée grâce à un investissement qui dépasse largement 1% du PIB, donnent aux étudiants l'opportunité de mener à bien leurs travaux de recherches. Au Maroc, nous devons améliorer notre stratégie pour le développement de la recherche scientifique. Cette dernière est indispensable pour le développement d'un pays car elle est seule capable de créer des penseurs et chercheurs dans tous les domaines de la société. Cette catégorie de citoyens pourrait par la suite trouver des solutions aux différents problèmes dont souffre le pays. Toutefois, on commence au Maroc à franchir le même pas que les Universités européennes et nous exigeons à l'Université Mohammed Ben Abdellah au moins une publication dans des revues indexées pour soutenir une thèse de doctorat en lettres, sciences humaines, droit et gestion, et deux publications en sciences. - Selon vous, en matière d'enseignants, le Maroc dispose-t-il d'un capital humain capable de réussir cette réforme et de couvrir la demande nationale ? - En ce qui concerne les modules disciplinaires et les langues nous avons suffisamment de compétence, pour les soft-skills nous les aurons au fur et à mesure en avançant dans la formation. Deux tiers du volume horaire consacré aux cours de communication seraient assurés en ligne. Pour ce faire, une plateforme digitale a été créée au profit des étudiants. Pour le troisième tiers, les cours seraient en présentiel.
Langues étrangères Elément majeur du Bachelor
En raison du niveau assez moyen en langues d'une partie non négligeable des étudiants marocains et vu la grande importance dont jouit le plurilinguisme à notre ère, le nouveau système adopte une stratégie qui met l'apprentissage de langues, notamment le français, l'anglais et l'espagnol sur un pied d'égalité avec les matières fondamentales et de spécialité, au coeur de ses préoccupations. En fait, des tests de langues seront effectués à chaque rentrée universitaire pour évaluer le niveau des étudiants. Chaque étudiant sera orienté vers l'une des trois langues précitées selon son niveau et ses pré-acquis. Les étudiants qui, à titre d'exemple, passent avec succès le test de connaissances du français, seront dispensés de cette langue et orientés vers l'anglais ou l'espagnol. Contrairement à l'ancien système LMD, les langues ne sont plus des matières complémentaires, mais essentielles. La formation en langues sera couronnée par l'obtention de certificats reconnus comme le TOEIC en anglais par exemple. En effet, l'obtention du Bachelor est conditionnée par un niveau B2 (ou équivalent) dans les différentes langues. Un étudiant qui n'atteint pas le niveau souhaité en langues n'obtiendra pas son diplôme universitaire. Outre les langues classiques, le coding ou programmation (langage C, Python, Swift), considéré comme la langue du futur, sera également introduit dans les programmes du Bachelor. Par ailleurs, le numérique est considéré comme un outil pédagogique d'apprentissage et sera utilisé dans tout le cursus, notamment dans l'apprentissage à distance. C. B.
L'info...Graphie Diplôme Comprendre le Bachelor en 5 points
Après 17 ans de système LMD (licence en 3 ans), les universités marocaines s'apprêtent à renouer dès la rentrée avec la licence à 4 ans qui sera appelée désormais « Bachelor », diplôme très en vogue dans les pays anglo-saxons. Voici donc, ses principaux atouts : Instauration d'une année fondatrice permettant aux étudiants une transition plus souple de l'enseignement secondaire à l'enseignement supérieur . L'orientation et la réorientation actives des étudiants en leur accordant la latitude de réviser leur orientation au cours de la première année. L'introduction des soft skills dans l'architecture pédagogique en vue de faciliter l'insertion des étudiants dans le marché de l'emploi, de développer leur responsabilité sociale et de leur permettre de développer leurs capacités de communication, d'esprit critique, d'esprit d'équipe et de leadership. L'apprentissage de langues et cultures étrangères et l'instauration de certifications pour les langues étrangères. La mise en place du système de crédits pour capitaliser sur les acquis, ce qui contribuera à la mobilité internationale des étudiants. C. B.