Alors que la mortalité augmente et que la situation épidémiologique n'a jamais été aussi détériorée, le gouvernement mise toujours sur les vertus de la vaccination, tout en préparant les citoyens à l'obligation du pass vaccinal après la saison estivale. Détails. La vague du variant Delta semble durer plus que les vagues précédentes. À fur et à mesure que se succèdent les jours, le Royaume se voit submergé par la propagation de la pandémie à tel point que le chef de la division des maladies transmissibles au ministère de la Santé, Abdelkrim Meziane Bellefquih, a fait état d'un « lourd bilan » bimensuel, où les cas critiques ont augmenté de 126%. Dans son exposé, le responsable a annoncé une hausse palpable du taux de positivité des tests, dont la courbe a augmenté de façon exponentielle passant de 4,56% le 11 juillet à 22% le 15 août. En effet, le Maroc a enregistré une moyenne de 8706 cas durant la dernière semaine. Le système de santé menacé ? En sus des cas de contamination, cette recrudescence est accompagnée d'une hausse inquiétante des cas critiques, qui n'ont eu de cesse de croître durant les dernières semaines. Des 79.447 cas actifs observés actuellement, 2374 personnes sont dans un état critique dont 1418 sont admis dans les services de réanimation, qui sont occupés de plus de la moitié de leur capacité (50,1% selon les derniers chiffres communiqués par le ministère de la Santé). Va-t-on tenir avec une cadence pareille ? Pas facilement, selon Mohammed Amine Berrahou, membre du Comité scientifique, qui estime que le Maroc a pris du retard à réappliquer les restrictions. D'après l'expert, on ne pourrait inverser la courbe des contaminations et des décès qu'à la fin du mois courant, et si les mesures restrictives sont dûment respectées. Or, actuellement, cela ne se fera pas, vu la mobilité qui continue son cours normal à cause de la saison estivale. Selon M. Berrahou, les cas de réanimation pourraient atteindre 330 à 380 si on continue dans la lancée actuelle. Par ailleurs, la hausse des cas graves a entraîné une hausse de la mortalité, en témoigne le nombre des décès quotidiens qui a passé de 38 à 123 du 1er au 17 août. Cette situation devient de plus en plus effrayante, d'autant plus qu'il n'y a pas une famille marocaine où un proche, aussi lointain soit-il, n'ait décédé à cause du Covid-19. Pas de reconfinement pour le moment, mais... En pareille circonstance, le système de Santé n'a jamais été aussi menacé de saturation, ce qui pose moult interrogations sur sa capacité à tenir le coup face à la vague Delta. Le gouvernement reste, quant à lui, discret et se contente actuellement des restrictions qu'il a décrétées, il y a plus de deux semaines. Une source bien informée, ayant requis l'anonymat, a écarté pour le moment l'hypothèse d'un durcissement des mesures restrictives. Ceci dit, le retour au confinement est à exclure pour l'instant, selon notre interlocuteur. Même sans confinement, le gouvernement prépare les citoyens à la période postérieure à la saison d'été, où le pass vaccinal sera une condition sine qua non pour prendre part à la vie publique. Les autorités locales ont d'ores et déjà commencé à faire des tournées dans la rue pour en aviser les citoyens, comme l'ont montré des vidéos sur les réseaux sociaux. Ceci devrait faire l'objet d'une campagne de sensibilisation à l'échelle nationale, selon notre source. La vaccination : l'ultime espoir Si le gouvernement évite à tout prix le retour au bouclage général, de crainte de paralyser une économie qui peine déjà à redécoller, l'accélération de la vaccination reste l'unique carte à jouer. C'est ce dont conviennent le Comité scientifique et les experts. Pour Tayeb Hamdi, médecin et chercheur en politique et systèmes de santé, la seule issue pour sortir de la crise sanitaire passe forcément par la vaccination, en l'absence de traitements efficaces contre la Covid-19. Selon l'expert émérite, bien que le variant Delta réduise l'efficacité des vaccins, les personnes complètement vaccinées (ayant pris les deux doses) ne sont pas autant exposées aux formes graves du SARS-CoV-2 que les gens non immunisées. Ainsi, l'Exécutif mise d'autant plus sur la campagne que les résultats sont satisfaisants : près de 16,7 millions de personnes ont eu au moins une première dose, soit 45% de la population. Jusqu'à ce jour, 11,3 millions sont complètement vaccinés. Comme l'approvisionnement vaccinal est sécurisé pour le moment, le ministère de la Santé fait tout pour accélérer la cadence de la campagne en y donnant accès aux jeunes de 18 ans et plus, et aux femmes enceintes.