Après une vague de froid, des températures en hausse par rapport à la normale sont observées sur l'ensemble du territoire. Un changement de température qui tire ses racines des variations météorologiques. Eclairage. Il y a quelques semaines, le Maroc avait connu un temps hivernal inhabituel ayant régné sur les quatre coins du Royaume. Cette vague de froid a amené à la prise d'une panoplie de mesures ayant permis aux habitants des régions montagneuses, enclavées et délaissées d'y faire face et d'en atténuer les effets. A la surprise générale, le froid est en train de nous quitter plus tôt que prévu pour laisser place à un temps ensoleillé et à des températures printanières. Un changement brusque qui n'a rien d'inhabituel aux yeux de Houcine Youaabed, responsable de la communication à la Direction Générale de la Météorologie (DGM). « Depuis presque dix jours, la météo est caractérisée par un temps stable sur la quasi-totalité du Royaume, avec une augmentation de presque 2 à 3 degrés par rapport à la normale », a-t-il indiqué. A ce propos, il nous a expliqué que « cette hausse de température est due au fait que notre pays soit d'abord sous l'influence des anticyclones des Açores, une zone de haute pression atmosphérique, et, ensuite, à une remontée d'air sec et chaud, provenant généralement du Sud-Est ». Un phénomène météorologique « courant » Ce phénomène est, en effet, lié aux variations météorologiques que le pays connaît régulièrement, a indiqué M. Youaabed, tout en précisant que la vague de froid observée récemment, atteignant jusqu'à -3 et -5 degrés, était due à une dépression atmosphérique venant d'Europe, et précisément de France. Le responsable à la DGM a également souligné que « cette augmentation de température ne peut pas être perçue comme étant une anomalie météorologique, tout en notant qu'une baisse de température accompagnée de pluies et de chutes de neige sur le Haut et le Moyen Atlas, et probablement dans le Rif sont prévues prochainement ». Toutefois, ces changements, qui viennent à l'improviste, interpellent sur la situation climatique du Maroc, comme en témoigne un nouveau rapport de l'institution de Breton Woods, intitulé « Climat Risk country profil ». En effet, la Banque Mondiale (BM) a dressé un sombre tableau révélant que le Royaume est très vulnérable à la variabilité et au changement climatique, qui impactent déjà plusieurs domaines, en particulier l'eau, l'agriculture et la santé. « Des vagues de chaleur en hausse » Au cours des dernières décennies, l'institution s'alarme de plus en plus suite à l'augmentation de la fréquence et l'intensité des événements extrêmes tels que de fortes pluies, entraînant des inondations dans certaines régions ainsi que des sécheresses et des vagues de chaleur dans d'autres. Elle prévoit ainsi que les températures en Afrique du Nord augmenteront de 1,5°C à 3,5°C d'ici 2050, et potentiellement 5°C d'ici la fin du siècle. « Les taux de réchauffement devraient être plus rapides à l'intérieur du pays», a souligné la même source. Pendant ce temps, les projections de la Banque Mondiale montrent une diminution significative des précipitations annuelles à travers le Maroc entre 10% et 20%, et jusqu'à 30% au Sud. «Même sans changement des précipitations, l'évaporation augmentera en raison de la hausse des températures et donc l'humidité de surface du sol diminuera conduisant à de graves pénuries, notamment d'eau», a-t-elle noté. Siham MDIJI Trois questions à Saïd El Khatri « Il faut agir maintenant pour garantir une planète propre aux générations de demain » Saïd El Khatri, Directeur des Systèmes d'Observation (DSO) chez la DGM, a répondu à nos questions sur la hausse des températures enregistrées au Royaume. - Quelle analyse faites-vous de cette hausse « subite » de température ? - Les températures varient doucement durant ces trois mois, à savoir février, mars et avril. Rien n'est désormais inquiétant. Les premiers indicateurs pour l'année courante montrent que la saison prochaine serait de normale à un peu plus chaude que le niveau habituel. Concernant la climatologie du mois de février, si nous prenons Casablanca, la température minimale normale est aux alentours de 10 degrés et la maximale près de 18 degrés, pour évoluer doucement de 2 à 3 degrés de plus. Ce n'est qu'en été qu'une augmentation de plus de 7 degrés se fait sentir, par rapport à février, pour atteindre le maximum en août avec des valeurs de près de 20 et 26 degrés pour les températures minimales et maximales respectivement. - Ce scénario pourrait-il durer ? - Notre pays se situe dans une zone très vulnérable aux changements climatiques. Il est placé précisément sur la rive Sud de la Méditerranée. En effet, nous avons déjà enregistré des hausses de températures « anormales » et nous présumons qu'il y aura une augmentation de chaleur assez sensible dans les prochaines années. La variation entre février et l'été est plus importante à l'intérieur du Maroc. A Taza, par exemple, elle passe de 7/17 en février à 21/36 en août. - Devons-nous accélérer la transition écologique pour prévenir ce genre de phénomènes ? - Le Royaume est connu à l'échelle internationale pour être bien avancé en matière d'adaptation, d'atténuation et de lutte contre le changement climatique. D'abord, ce n'est pas un pays polluant, ensuite parce qu'il a pris plusieurs mesures pour réduire le gaz à effet de serre dans l'atmosphère, comme en témoigne sa stratégie d'énergies renouvelables. Mais comme nous partageons tous le même globe, toute l'humanité est appelée à faire des actions en la matière en réduisant l'émission de gaz à effet de serre qui reste une condition sine qua non pour juguler l'augmentation de la température. Autrement, l'existence de l'être humain reste en danger. Recueillis par S. M. Repères Maroc-UE : vers une lutte commune contre le changement climatique Sous le thème « Green Deal Européen : Enjeux et impact sur la relance économique au Maroc », un webinaire, tenu jeudi 11 février, a permis aux décideurs et experts en développement durable de mettre en avant la lutte conjointe du Maroc et de l'Union Européenne (UE) contre le changement climatique, ainsi que l'impact de leurs efforts en faveur de la transition énergétique sur leurs économies. Ces derniers ont rappelé les nombreux partenariats stratégiques et projets communs visant la protection de l'environnement. Ainsi, ils ont mis en exergue les avancées réalisées par le Maroc, ainsi que les efforts du pays en matière de substitution d'énergies fossiles et de l'économie verte dans plusieurs domaines. Des jeunes marocains tirent la sonnette d'alarme 68% des Marocains, âgés de moins de 18 ans, ont exprimé leur inquiétude sur le changement climatique, qu'ils considèrent comme une urgence mondiale, c'est ce qu'a révélé une enquête, dénommée « Peoples Climate Vote », réalisée par le Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD), en collaboration avec la prestigieuse université d'Oxford. D'abord, 52% d'entre eux souhaitent la mise en place de politiques climatiques plus ambitieuses. Ensuite, 44% prêchent pour l'usage de l'énergie solaire, éolienne et renouvelable. Ainsi, 47% militent pour la conservation des forêts et des terres, tandis que 44% défendent l'utilisation de voitures et bus électriques plus propres ou des vélos.