L'idée qui a germé dans la tête d'Oussama Tourougui est de concevoir et fabriquer des machines de désinfection à ultraviolets, un procédé à la fois rapide et efficace. Entretien. - Des machines de désinfection, il y en a à revendre, mais la vôtre a la particularité de fonctionner aux ultraviolets. D'où est née cette idée ? A vrai dire, j'ai déjà vu les machines de désinfection par rayonnement ultraviolet en marche, à l'étranger. Avant le déclenchement de la pandémie, je n'y ai pas prêté toute l'attention nécessaire. Avec l'apparition de ce virus, le déclic est venu. Dès lors, j'ai effectué quelques recherches à l'Université MIT (Le Massachusetts Institute of Technology, un institut de recherche américain spécialisé dans les domaines de la science et de la technologie, Ndlr), avant de trouver finalement le modèle adéquat. Ce type de machines est déjà en cours à l'étranger, depuis plus de vingt ans, comme stratégie de désinfection contre les infections nosocomiales, contractées au cours d'un séjour dans un établissement de santé, en vue d'éviter les contaminations entre les patients. - Quelles sont les spécificités de ces machines de désinfection par rayonnement ultraviolet, et à quel prix sont-elles vendues ? - C'est une machine calibrée en fonction de la superficie des salles à désinfecter. Ce sont des machines typiques, avec des lampes, un voltage et une durée précise, ainsi qu'une technologie de sécurité active et passive. Grâce à la sécurité active, la machine peut s'éteindre à l'aide d'une télécommande. Tandis que la sécurité passive lui permet de s'éteindre une fois un mouvement est détecté dans la salle. Toutes les parties électroniques de la machine sont importées avec une certification européenne, en l'occurrence la norme CE. Concernant les lampes, elles sont certifiées à l'étranger, comme des lampes germicides. Dans ce cadre, nous collaborons avec trois compagnies, dont Philips, pour nous envoyer ces lampes. Il y a beaucoup de processus et de calculs à prendre en considération avant de produire. Au niveau des prix, pour démarrer, la plus petite machine, qui désinfecte un espace de 20 m2, est vendue à 20.000 dhs HT. En comparaison avec les machines présentes actuellement sur le marché, la nôtre est la moins chère et la plus économique. De plus, il n'y a rien à changer puisqu'elle est vide de consommables. Chaque lampe a une durée de vie de 9.000 heures. C'est l'équivalent de 5 ans d'usage intensif pour l'épuiser. Ce n'est pas rentable pour nous, mais c'est un produit marocain et une nouvelle technologie rare, à partir de laquelle nous pourrons concevoir d'autres appareils de désinfection. Récemment, des dentistes nous ont demandé de concevoir un petit format de ce modèle, puisque les infections sont très fortes dans leurs cabinets. - Contrairement aux machines classiques de désinfection, des nébuliseurs aérosols au peroxyde d'hydrogène, les machines UVC émettent des rayonnements. Des risques pour la santé sont-ils à craindre ? - Dans ces machines, on parle de 253,7 nanomètres de longueur d'ondes. Si un être humain est exposé à ces rayons, de 10 à 15 minutes, le cancer de la peau est garanti. Au niveau des yeux, la cornée est détruite. C'est comme des rayons radioactifs. Lors du développement de ces machines, nous avons eu beaucoup d'incidents. Mais, maintenant, nous maîtrisons la technologie. Elle ne représente pas de risque. La machine est pour une utilisation professionnelle uniquement. Le professionnel l'installe, l'allume à l'aide de la télécommande, et sort de la salle à désinfecter. Pour l'éteindre, il suffit qu'il ouvre la porte pour que la machine s'éteigne automatiquement. - Des portiques de désinfection ont été interdits par les autorités, pour non-conformité aux normes sanitaires, en avril dernier. Vos machines ont-elles été homologuées par les autorités compétentes ? - En collaboration avec les ministères de l'Industrie, de la Santé et de l'Intérieur ainsi que quelques collaborateurs et spécialistes, nous venons de mettre un projet de normalisation marocain pour ce type de machines. Il s'agit du nouveau projet de norme "NM/ST 21.5.206 2020". Toute personne souhaitant fabriquer de telles machines doit obligatoirement respecter ces normes. Recueillis par Safaa KSAANI Portrait : Il ne doit sa réussite qu'à lui-même A la tête de la société Atlas Invention, Oussama Tourougui se voit comme un capitaine de navire. Celui qui fixe le cap et montre la direction à suivre. Ce jeune Fassi, né en 1981, a eu son Baccalauréat en 1999. Il a choisi ensuite de poursuivre ses études universitaires à Montréal, où il a décroché un Master en sciences économiques. Il est rentré au Maroc en 2009, en vue d'y investir. Premier projet entre les mains, la société ULTRAMARE. Créée la même année, cette société est dédiée à la fabrication du matériel de désinfection dans le domaine agricole. "On est les pionniers au niveau national qui fabriquent des atomiseurs contre les bactéries dans l'arboriculture. Parmi les produits réalisés dans ce domaine, nous comptons des machines turbines de désinfection et d'entreposage. D'autres appareils verront le jour prochainement", nous promet-il. Après avoir accumulé une riche expérience, Oussama Tourougui décide de créer, il y a deux ans, une autre société, spécialisée dans la technologie innovante. Il s'agit d'Atlas Invention. Son parcours universitaire poursuivi à l'étranger lui a enseigné l'importance des nouvelles technologies dans le développement de nos vies. "Au Canada, j'ai pu voir et me familiariser avec la nouvelle technologie. Je trouvais qu'il fallait mettre une division spécialisée dans tout ce qui est nouveau", nous explique ce jeune trentenaire. Sa deuxième société travaille actuellement sur la proposition d'un système de désinfection par rayonnement UV à la Royal Air Maroc (RAM).
S. K. Repères Un produit antibactérien ne détruit pas les virus Dans le milieu de travail, ou autre, on remarque souvent les personnes chargées de la désinfection des milieux appliquer les produits désinfectants sur les surfaces, sans les nettoyer. Un faux processus, auquel Oussama Tourougui veut attirer l'attention. "La désinfection est une réduction du nombre des bactéries, et non leur élimination. Il faut un préalable avant la désinfection. Il faut d'abord nettoyer la surface en question, pour éliminer la poussière avant de désinfecter. Pour ce faire, il faut également un produit virucide et non antibactérien. Ces derniers ne détruisent pas les virus, dont le Covid 19". Un procédé moins dangereux pour la santé Probablement la méthode de désinfection la plus connue, la vaporisation de peroxyde d'hydrogène est actuellement le seul moyen de désinfection dans les hôpitaux du royaume. Cet aérosol, à base de produits dangereux pour la santé, exige la fermeture de tous les trous, l'extinction de la climatisation des salles, pour être efficace. Cependant, les machines de désinfection par ultraviolets sont simples d'utilisation, où les produits chimiques n'ont pas de place. « On peut entrer dans la salle, après la fin du processus de désinfection, ou pendant, puisque le système de sécurité passif y est intégré, sans encourir le risque d'une lésion au niveau des poumons », c'est la promesse que nous fait le PDG d'Atlas Invention.