Ahmed Charaï Emmanuel Macron a eu raison d'inviter Donald Trump le 14 juillet. Le Président français, qui a affiché les divergences sur le climat avec le locataire de la Maison Blanche, a inscrit cette invitation dans une profondeur historique qui peut accoucher d'un nouveau partenariat stratégique. Il y a un siècle, de jeunes américains ont offert leur sang, sacrifié leurs vies, pour inverser le cours de la première guerre mondiale et défaire l'Allemagne. Alors qu'à ce moment-là, la guerre devenait de plus en plus meurtrière, inhumaine et que l'équilibre des forces était rompu suite au retrait des Russes du conflit. C'est à l'honneur de la France que d'afficher cette reconnaissance, cette gratitude, mais « il n'est d'histoire que contemporaine », comme disait le philosophe italien Benedetto Croce. En invitant Trump dans le faste et l'imposante histoire de la France, Emmanuel Macron a fait un acte politiquement habile. Il recentre le débat autour d'une alliance, non pas factuelle, mais universaliste autour de valeurs. La France est engagée, aux côtés des USA parfois, seule en Afrique, contre les groupes terroristes et cela demande des efforts budgétaires énormes. Croire que l'on peut se passer des Etats-Unis dans ce combat, au nom des divergences sur le climat, est une indigence intellectuelle. Donald Trump est imprévisible, certes, mais il dirige un Etat qui est la première puissance mondiale, qui a une administration très forte, avec une continuité remarquable. Ce que Macron propose, c'est un contrat gagnant-gagnant, en assumant les divergences. Les deux pays se retrouvent sur les situations « chaudes » au niveau international. Macron a évolué sur la Syrie. Les deux veulent renouer avec Poutine, par réalisme politique. La France a besoin du soutien des USA, surtout après le Brexit. L'Allemagne est un géant économique, mais nain politique, puisque sans capacité de projection en dehors de ses frontières. Les USA ont tout intérêt à trouver un allié sûr, engagé sur les questions internationales. En Afrique, c'est la France qui porte tout le fardeau. Or, Donald Trump, homme d'affaires, sait que ce continent est la promesse de la croissance future de l'économie mondiale. Les USA sont timidement impliqués. La situation est complexe. La lutte contre le terrorisme, les flux migratoires font la Une. Mais en réalité, ce continent qui recèle d'extraordinaires potentialités, réalise des avancées en matière de démocratie et de bonne gouvernance. C'est sur ces deux pieds qu'il faut marcher. Derrière, il y a l'idée du co-développement. Macron et Trump ne peuvent pas nier cette évidence, qui n'est pas une contrainte, mais une opportunité pour leurs entreprises. Il se trouve que le Roi du Maroc porte ce plaidoyer depuis plus d'une décennie. En visitant Rabat au début de son quinquennat, Emmanuel Macron a explicitement exprimé son soutien à cette vision. On peut donc s'attendre à une nouvelle vision, réaliste, volontariste où l'alliance Washington-Paris-Rabat pèsera, au profit des populations et non pas avec l'unique réflexe sécuritaire.