De la musique, du chant, de la danse, des maîtres et des élèves. Un même legs musical multiséculaire, cousu par le fil de la coexistence et de l'amitié, écrit et joué à deux mains, juive et musulmane, chanté à deux voix, arabe et hébraïque, dans une fabuleuse symphonie fraternelle. Une même fougue : faire de l'Essaouira actuelle, la Mogador des anciens, la Cordoue maghrébine d'aujourd'hui, la Jérusalem de l'Orient serein de demain. De cette huitième édition du Festival des Andalousies Atlantiques d'Essaouira, placée sous la direction artistique de Françoise Atlan, les festivaliers se sont rempli le cœur d'émotions fortes et d'images indélébiles. Naïma Dziria, la diva du Hawzi, sur scène avec son compatriote israélite, le pianiste Maurice Médioni, une rencontre impossible dans leur Algérie natale. Les jeunes Sanaa Marahati et Laila Lamrini saluées par des standing ovation pour leurs relèves inédites et fidèles à la fois à Samy El Maghrebi. Des petites touristes américaines, observant, les yeux écarquillés d'admiration, évoluer avec grâce sur le Lac des Cygnes la Troupe du Royal Ballet de Londres, puis se déhanchant allégrement avec leur aïeule sur les «Flamencos de Moron». André El Baz, l'enfant éternel d'El Jadida, écoutant religieusement, les larmes aux yeux, jouer l'Orchestre des Jeunes Talents du Conservatoire de Fès. Des jeunes marocains, toutes confessions confondues, accompagnant en chœur à Dar Souiri la reprise par l'Académie de musique Al Qods de «Wa nassitou daai», l'ode lyrique de l'Irakien Kadem Saher pour son Maroc d'adoption. André Azoulay, Conseiller du Roi et Président-Fondateur de l'Association Essaouira-Mogador recevant, le regard embué d'émotion, une représentation de Jérusalem des mains de l'artiste palestinien Mahmoud Jamal. Ou encore le célèbre peintre et journaliste Claude Senouf, «Ould Chenouf» comme il aime que les Souiris l'appellent, ouvrant avec générosité, à la clôture du festival, les portes de sa lumineuse demeure dans l'arrière-pays de la cité des alizés, à la cinéaste Selma Bargach pour la projection de son long-métrage «La cinquième corde», autour d'un brunch dominical «champêtre et culturel». Le Festival des Andalousies Atlantiques d'Essaouira a encore une fois remporté son pari : celui d'associer aux spectacles, immortels et enchanteurs, des moments d'échange chaleureux et de réflexion fructueuse. Durant et en marge de cette manifestation culturelle, ce sont en effet tenus colloques et débats à bâtons rompus entre tous ceux qui militent, du Maroc et d'ailleurs, pour la conservation du patrimoine judéo-marocain sous tous ses aspects, pour la perpétuation de l'oasis «Maroc» comme modèle universel de paix et de partage, et partant, pour la pérennité du Festival des Andalousies Atlantiques comme symbole même de ce noble combat : «Nous tenons à ce que cette manifestation, créée par et pour les Marocains, reste gratuite. Dotée de petits moyens, clairement insuffisants, chaque nouvelle édition de cet évènement est pour nous une source d'angoisses et de défis», nous confie-t-on au sein de l'organisation. Le Festival des Andalousies Atlantiques, organisé par l'Association Essaouira-Mogador, en partenariat avec la Fondation des Trois Cultures, se bat en effet depuis 8 ans maintenant pour préserver cet espace libre et gratuit, où tout un héritage commun renaît avec splendeur et s'enrichit admirablement avec les apports des générations actuelles. L'appel du cœur des festivaliers est de nouveau lancé, afin que soit pérennisée cette scène unique au monde, par sa singularité éditoriale, sa marocanité enracinée dans notre Mémoire, notre Terroir à tous, Musulmans et Juifs, fiers d'être marocains… hier, aujourd'hui et demain.