La date des élections britanniques était un secret de Polichinelle. Gordon Brown a obtenu de la Reine Elisabeth quelle rentre de ses vacances de Pâques pour dissoudre la Chambre des Communes. Le scrutin aura donc lieu le 6 mai, ce qui permet de lassocier à des élections locales prévues de longue date. Une façon de limiter labstention car les Anglais, surtout les travaillistes, votent pour leurs maires alors quils boudent leurs députés. Cet opportunisme électoral prouve que Gordon Brown est sans trop dillusions : il mesure le discrédit de son parti qui sest goinfré en notes de frais et qui a laissé Tony Blair faire la guerre dIrak Ce divorce entre lopinion publique et ses élites politiques frappe la Grande-Bretagne, comme le reste de lEurope (France, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Suisse, etc). La crise la encore aggravé, en renforçant le sentiment dimpuissance de populations qui hésitent entre le fatalisme et la colère. Léconomie sera au cur de la campagne éclair, acharnée, indécise qui souvre. Le déficit britannique sest creusé au point de donner le vertige à la City (190 milliards deuros, 11,8% du PIB), la livre a perdu un tiers de sa valeur, la dette a triplé, les obligations émises ont été multipliées par sept, le chômage qui avait disparu croit très rapidement tout comme le nombre de faillites Toute la question budgétaire est de savoir comment revenir à lorthodoxie financière sans casser une reprise qui reste «timide». Après six trimestres négatifs, enfin à la fin 2009, une croissance de 0,1%. Un espoir davantage quune reprise. Qui demande à être confirmé. Cest dire à quel point la publication des chiffres du début de lannée sera guettée. Ils vont tomber le 23 avril, en pleine campagne ! Gordon Brown fut pendant plus de dix ans le Chancelier de lEchiquier de Tony Blair. Il porte sa part de responsabilité dans les délires de la City et leffondrement de léconomie. Lusure du pouvoir est son handicap. Mais cela devient un atout dans la tempête qui secoue le royaume, face à léquipe de David Cameron dont aucun des membres na dexpérience de lexécutif. Le dilemme des Britanniques : choisir entre le désir de changement et le désir de sécurité. Ils sont dautant plus indécis que la marge de manuvre du prochain gouvernement sera étroite et que les programmes semblent converger. Les travaillistes se sont ainsi résignés à tailler dans les dépenses publiques pendant que les conservateurs renonçaient aux baisses dimpôts. Cela nempêche pas les deux partis de promettre à lunisson des plans ambitieux pour la Santé ou lEducation. Il y aurait de quoi faire douter nimporte quel électeur. La victoire annoncée des conservateurs qui semblait acquise lan dernier est remise en cause. Pour la première fois depuis des décennies, les sondages envisagent quaucun des deux partis nait de majorité suffisante pour gouverner. Cette crise institutionnelle serait sans précédent. Seuls les bookmakers qui voient les paris senvoler se frottent les mains.