Le Maroc manifeste actuellement un intérêt grandissant pour le marché russe. La preuve, pas moins de 120 opérateurs ont fait récemment le déplacement pour participer au tout premier forum économique Maroc-Russie. Organisé en partenariat avec la CGEM et le ministère des Affaires étrangères, l'événement vise à donner un nouveau souffle aux échanges économiques et de présenter les potentialités du Maroc en termes d'opportunités d'affaires et d'investissement. La signature de plusieurs conventions était au programme, notamment entre la CGEM et la Chambre russe de commerce. La BCP a procédé aussi à la signature de conventions de coopération avec Sberbank, la première banque russe. Attijariwafa Bank n'est pas en reste. Sa participation s'est soldée par la conclusion de deux accords avec les deux premières banques russes Sberbank et VTB. Ce sont autant de signes qui ne trompent pas. Aujourd'hui, le Royaume occupe une place prépondérante dans le carnet économique du pays du Kremlin. Les rapports ont été dynamisés par les visions stratégiques des deux chefs d'Etat. Le premier élan a été donné par le souverain qui, lors de sa visite historique en Russie en 2002, a assis les bases d'un partenariat stratégique, concrétisées par la conclusion d'une multitude d'accords et de partenariat. Aussi, la visite de Vladimir Poutine au Maroc en 2006 a-t-elle tracé dans la continuité les relations bilatérales. Or, jusque-là, les exportations marocaines vers la Russie sont dominées par les fruits et légumes, avec notamment les agrumes, dont ce pays est particulièrement friand. Les Russes ont une préférence particulière pour l'orange marocaine. L'autre pro- duit fortement exporté sur la Russie est la farine de poisson. En tout et pour tout, les échanges commerciaux actuels entre les deux pays ne dépassent pas 19 milliards DH. Ils sont constitués essentiellement par les exportations de ressources énergétiques de la Russie vers le Maroc. En tout cas, le volume des échanges reste très faible au vu du potentiel de développement existant. Surtout que sur les 19 à 20 milliards de DH d'échanges annuels, la balance commerciale penche largement en faveur de la Russie puisque le Maroc n'exporte vers ce pays qu'environ 2 milliards de DH. Pire, selon le ministère chargé du Commerce extérieur, sur la période 2009-2013, le déficit commercial du Maroc avec la Russie a augmenté, passant de 6,05 milliards en 2009 à 18,09 milliards en 2012 pour diminuer en 2013 à 14,37 milliards de dirhams. Vivement la diversification ! L'heure est donc au renforcement des échanges bilatéraux et surtout à la diversification comme le note le président de l'ASMEX. « Le marché russe a été inscrit en tête des destinations d'intérêt dans le cadre du plan d'action 2013-2015 de l'ASMEX », note Hassan Sentissi. L'ambition affichée est de consolider la coopération économique bilatérale pour qu'elle devienne de plus en plus étroite, grâce à la diversification des échanges, des partenariats entre entreprises et au développement des investissements russes au Maroc. Et Sentissi d'ajouter : « La Russie possède un important marché de consommateurs. Une opportunité à saisir par les exportateurs marocains, sachant que ce pays est un grand importateur mondial en centaines de milliards de dollars ». Des opportunités peuvent être créées dans le secteur de l'agroalimentaire, notamment pour l'huile d'olive et l'huile d'argan qui pourraient s'ajouter aux fruits et légumes dans l'offre marocaine. La pêche et le textile, ou encore les phosphates et dérivés sont également des segments où le Maroc est suffisamment armé pour rivaliser avec des concurrents potentiels. Par ailleurs, la montée en puissance des métiers mondiaux du Maroc pourrait constituer une opportunité de renforcer les exportations marocaines vers ce marché. Hassan Sentissi cite aussi d'autres secteurs appelés à se développer sur ce marché, tels que l'aviculture, les produits halal tous types confondus, les aliments pour bétail, l'artisanat... L'ASMEX est d'ailleurs en train de mettre en place un programme d'accompagnement des opérateurs désireux de se certifier Halal à destination des marchés extérieurs, en général, et en Russie, en particulier. Tripler les exportations d'agrumes d'ici 2018 La Russie est devenue le premier client du Maroc pour les agrumes avec 60% du volume exporté, tandis que l'Amérique du Nord a absorbé entre 10 à 15% et l'Union européenne 30%. Le Maroc a réussi à expédier en Russie près de 200.000 tonnes de mandarines la saison dernière, en augmentation de 52% par rapport à des campagnes précédentes. Selon les responsables de l'Association des exportateurs d'agrumes (ASPAM), l'objectif d'ici 2018 est de tripler les exportations d'agrumes vers la Russie. Pour Maroc Fruit Board, le plus grand regroupement d'exportateurs, l'accent doit être mis sur le marketing pour proposer un produit Maroc de qualité et différencié. L'Association Marocaine des Industries du Textile et de l'Habillement (AMITH) veut aussi mettre le paquet sur le marché russe. Avec le soutien de Maroc Export, 10 sociétés marocaines spécialisées en textile de maison et en textile d'habillement ont fait le déplacement à Moscou dans le cadre du Forum Maroc-Russie. Lors d'une mission précédente, les professionnels marocains du textile avaient pu conclure 39 contacts avec des acheteurs potentiels et de grandes enseignes russes. « La Russie est un marché prometteur, son économie est considérée comme suffisamment prometteuse et saine pour que les entreprises de toute taille s'y intéressent», relève Maroc Export. Les professionnels du Tourisme misent aussi sur les Russes. « Il est regrettable de constater que sur les dizaines de millions de touristes russes qui parcourent le monde, moins de 50.000 seulement viennent au Maroc », déclare Hassan Sentissi. Sa conclusion : « Le Maroc a toutes les chances aujourd'hui de capter cette clientèle ». Surtout avec la suppression des procédures de visas pour la Russie par le Maroc ce qui permettra certainement de drainer plus de touristes. Selon le ministre du tourisme, qui s'exprimait lors des travaux du forum, la conquête des marchés émergents, particulièrement la Russie, est une priorité de la Vision 2020. Le Maroc a en effet accueilli plus de 47000 touristes russes en 2013, soit plus de 60% par rapport à 2012. Il ambitionne d'en drainer quelque 800.000 à l'horizon 2020❚