Plus de 1.000 dirigeants venus de toute l'Afrique participant, à Casablanca, à l'édition 2024 du Sommet Financier Africain (AFIS). Axé sur le thème évocateur « Une nouvelle ère : il est temps de mobiliser le pouvoir financier de l'Afrique », cet évènement se donne comme objectif de réinventer les paradigmes financiers de manière à exploiter pleinement le potentiel économique du continent. Le sommet intercontinental offre un vaste champ de réflexion avec une trentaine de panels et tables rondes, s'articulant autour de la réduction des coûts et l'accélération des échanges commerciaux, du renforcement des investissements locaux et de la création d'un marché boursier commun africain. C'est à ce sujet qu'est intervenu Brahim Benjelloun Touimi en sa qualité de président du Conseil d'Administration de la Bourse de Casablanca. Il a partagé à cette occasion trois convictions qu'il a déclinées comme suit : «La première, le Maroc à travers ses autorités publiques, d'abord à travers la Commission pour le nouveau modèle de développement et bien entendu les autorités publiques, ministère des finances et Trésor, la Banque centrale, l'Autorité du marché, ont placé la restructuration de la Bourse de Casablanca comme première étape pour faire émerger le Maroc comme première place financière de la région. Elles ont également fait les bons choix pour adopter une structuration des infrastructures du marché des capitaux qui corresponde aux meilleurs standards internationaux puisque désormais la Bourse de Casablanca est structurée en tant que holding qui va hériter de la Bourse de Casablanca et donc du marché au comptant qui est opérationnel depuis 1929 et compte 77 sociétés cotées, avec près de 76 milliards de dollars de capitalisation. Et c'est une holding qui fédère un marché spot, un marché à terme, une Chambre de compensation des parties et un dépositaire central. En même temps, les bons choix ont été faits pour adopter cette structuration avec des infrastructures «State of the art». Pour le marché spot et pour le marché à terme puisque nous avons une technologie de London Stock Exchange qui s'appelle IMT, puis pour la Chambre de compensation des parties avec une solution performante développée en interne. Le Maroc a fait également le bon choix pour disposer d'un régulateur des marchés des capitaux qui procède à une régulation anticipatrice, stratégique, moderne, proactive, participative, à travers notamment l'Autorité des marchés des capitaux et donc «crédibilisatrice» aux yeux des acteurs des marchés national et international et de l'opinion publique. Le Maroc a fait le bon choix pour prendre de bonnes initiatives pour susciter une dynamique des marchés et améliorer la liquidité, notre sujet. Du côté de l'émetteur, pour rendre la source accessible, il y a eu en 2019 la création du marché alternatif dédié aux PME, avec des règles de fonctionnement allégées. Il y a eu des campagnes de proximité auprès des territoires, des régions, des associations professionnelles dont celles qui seront sur le panel, la Société des professionnels des sociétés de Bourse, l'association des gestionnaires d'actifs (l'ASFIM), le patronat, l'ordre des experts comptables, les hommes d'affaires, l'association faisant appel à l'épargne. Et puis, il y a eu aussi la volonté qu'il y ait le continuum de financement depuis l'étape de startup jusqu'à l'appel public à l'épargne. Il y a eu ainsi des liens forts qui ont été noués avec l'association des investisseurs. Et puis il y a eu l'accompagnement de la Bourse de Casablanca pour la structuration de l'activité de financement des entreprises avec notamment le programme «Elite». Du côté des investisseurs, il y a eu essentiellement des programmes éducatifs massifs notamment à travers l'école de la Bourse de Casablanca avec la collaboration des universités. Le Maroc a fait également le bon choix pour rassembler les membres de l'écosystème des marchés des capitaux et a préparé le lancement opérationnel, probablement au premier trimestre de l'année prochaine, du marché à terme, avec un contrat sur un indice boursier. C'est le futur contrat MASI 20. J'ai la conviction que tous les ingrédients du succès du lancement réussi du marché à terme, qui va permettre une plus grande liquidité. La motivation et la coordination avec les parties prenantes ont été faites, structurellement dans la préparation de ce marché à terme. Le cadre réglementaire est solide. La plateforme technologique avancée je l'ai mentionnée tout à l'heure. Et la formation des acteurs a été assurée. La seconde conviction est dans le sillage de ce marché à terme qui est l'archétype de ce marché innovant qui génèrera du volume, donc la liquidité, et qui va même contribuer à la détermination des sous-jacents. J'ai la conviction qu'avec le rodage du fonctionnement de ce marché à terme et le lancement du MASI 20, il y aura d'autres supports qui seront lancés». Poursuivant son intervention en rappelant qu'il est un «ancien combattant» des marchés financiers puisqu'il y a près de 40 en France, il était l'un des premiers courtiers sur le marché à terme des instruments financiers, Brahim Benjelloun Touimi ajoute : « le marché à terme est un formidable outil de couverture des risques. Il est générateur de liquidités. Pour les spots, c'est un outil d'efficience des marchés grâce aux arbitrages spot terme qu'il permet. Et puis, il va permettre de représenter un réceptacle de toutes les anticipations, de toutes les attentes, et les craintes des opérateurs, et à travers cela, sans doute ménager la volatilité du marché du comptant. L'ambition est qu'il devienne de plus en plus directeur du prix des marchés du comptant. La troisième conviction, c'est que le Maroc est indéniablement un modèle africain dans son cheminement de progrès vers un marché des capitaux robuste, moderne, efficient, afin de jouer pleinement son rôle de l'épicentre de l'économie réelle. Cependant, quand bien même des stratégies de développement du marché des capitaux sont tracés pour le présent et pour l'avenir grâce notamment à une vision claire des autorités publiques qui est ressortie des allocution donnée hier par la ministre de l'Economie et des finances et celle donnée aujourd'hui par la présidente de l'AMMC, qui associent, c'est leur mérite, les membres de l'écosystème. Les réalisations ne doivent conduire ni à l'autosatisfaction ni au confinement à soi. C'est-à-dire le repli sur l'horizon national. L'Afrique devrait être notre crédo commun, notre bien commun, notre destinée commune. Que signifie cette profession de foi ? Pour notre industrie des marchés des capitaux, particulièrement sur le sujet de la liquidité. La conviction est qu'il faut que chacun dans son domaine puisse inscrire l'Afrique dans sa stratégie, stratégie des entreprises, stratégie des associations. Nous devons multiplier individuellement les partenariats avec d'autres opérateurs africains pour davantage se connaître, échanger les pratiques et les expériences. Nous avons Casablanca Finance City également qui a essayé, sur la foi de ce que j'en ai vu dans son rapport, de nouer des partenariats avec d'autres places financières. Œuvrer au sein des fora existants tels que l'African Stock Exchange Association pour consolider l'African Exchange Linkage Project, pour l'étendre au-delà des sept marchés actuels, facilitant ainsi les transactions transfrontalières des titres et la libre circulation des investissements. L'élargissement pourrait concerner 25 Bourses africaines. Chacun, dans son domaine, devrait œuvrer, en appui des autorités nationales qui défendent les projets africains, que ce soit dans le domaine de l'harmonisation des réglementations, que ce soit dans le domaine des paiements transfrontaliers tels que le Système panafricaine de paiement et de règlement dont a parlé la ministre hier, que ce soit dans le domaine de la transparence et de la gouvernance des entreprises, notamment avec l'adoption des normes comptables internationales et toutes les modalités de diffusion de l'information et dans le domaine de l'innovation financière. La Bourse de Casablanca, avec toutes ses structures et ses composantes, est pleinement engagée dans cette dynamique d'approfondissement des marchés des capitaux, d'amélioration de sa liquidité et reste disposée à partager ses expériences et ses pratiques». Brahim Benjelloun Touimi a aussi évoqué pour son auditoire son intervention à Fès dans le cadre des rencontres de l'UEMF sur l'alliance des civilisations qui a donné la parole à une centaine d'experts nationaux et internationaux : «Il y a eu l'inauguration, en première mondiale, de la Chaire de l'alliance des civilisation au sein de l'Université Euromed de Fès. Dans ces rencontres, le Maroc et l'Afrique ont figuré en bonne place dans les propositions et discussions en termes d'ouverture envers l'autre, d'écoute de l'autre et de partage. Le moto de cette alliance des civilisation, une diversité des cultures, une seule humanité. Gardez ce crédo africaniste, mais cette fois-ci pour les marchés des capitaux, vous proposant qu'on garde en tête de considérer que nous avons plusieurs structures, plusieurs cultures, et une aspiration à l'unité. Une seule humanité. Et alors l'image de l'alliance des civilisations de bâtir l'alliance des expertises.» Pour rappel, la rencontre de Fès à laquelle a pris part Brahim Bejelloun Touimi était axée sur la gouvernance mondiale durable et a été marquée par la présence de nombreux jeunes. L'Administrateur directeur général de Bank of Africa et président du Conseil d'Administration de la Bourse de Casablanca, Brahim Benjelloun Touimi s'est illustré en présentant l'Initiative Royale Atlantique comme exemple concret de ce que propose le Maroc au monde comme projet ayant pour objectif suprême une «communion humaine». «Visant à désenclaver les pays du Sahel, comme le Niger, le Burkina Faso et le Mali, en leur donnant accès à l'océan atlantique, cette Initiative annoncée par SM le Roi Mohammed VI dans son discours de la Marche Verte du 6 novembre 2023 ouvre un espace de sécurité et de prospérité partagées en faveur de 23 pays, soit 46% de la population et 55% du PIB du continent», a détaillé l'orateur. Outre cette Initiative Royale qui permettra aux pays concernés d'accéder à l'océan atlantique et donc à s'ouvrir sur l'espace américain grâce aux infrastructures portuaires, logistiques, routières, ferroviaires du Maroc, et plus particulièrement de Dakhla ; Brahim Benjelloun Touimi a aussi évoqué le projet du gazoduc Maroc-Nigéria devant relier 11 pays et 343 millions d'habitants, et le port Dakhla Atlantique présentant une formidable opportunité de développer l'économie bleue. L'Administrateur directeur général de Bank of Africa et président du Conseil d'Administration de la Bourse de Casablanca a bien montrer ainsi le rôle moteur que joue le Maroc comme «pont entre les continents et point de liaison entre eux», dans le strict respect de sa souveraineté et celle des autres pays.