Fléau international, le suicide continue de happer les vies à travers le monde. Chaque année, plus de 700.000 personnes se suicident et beaucoup d'autres tentent de le faire. C'est ce qu'affirment les données de l'OMS. Tragédie personnelle, familiale et communautaire, le suicide peut survenir à n'importe quel moment de la vie, il reste cependant la quatrième cause de mortalité chez les 15 à 29 ans en 2019. Toujours d'après l'OMS, le suicide n'est pas l'apanage des pays à revenu élevé. Tout au contraire, plus de 77 % des suicides sont enregistrés dans des pays à revenu faible ou intermédiaire en 2019. Le Maroc n'est pas épargné non plus. Fléau en évolution, le taux de suicide a atteint 7,3 cas pour 100.000 habitants selon les statistiques de 2019 de l'OMS. Des chiffres à revoir à la hausse à cause de la crise sanitaire et son impact sur le moral des Marocains. Le nombre des suicides a enregistré en effet, en 2020, une hausse de 300% par rapport aux années précédentes. Les séquelles d'un confinement et d'un reconfinement mal vécus, l'isolement, l'activité économique paralysée, les relations et la vie sociales profondément affectées par cette épreuve inhabituelle... sont autant de facteurs ayant eu raison de la résistance des individus ici et ailleurs. Les jeunes, groupe vulnérable Si le phénomène est général, les jeunes restent toutefois plus vulnérables et plus exposés comme l'affirment les statistiques de l'OMS. Le suicide constitue en effet l'une des cinq causes principales de mortalité pour la tranche d'âge de 15 à 19 ans. Dans beaucoup de pays, le suicide apparaît même comme la première ou la seconde cause de décès pour cette tranche d'âge. « Différents facteurs sociaux, psychologiques, familiaux ou personnels affaiblissent la santé mentale d'un individu et le rendent plus vulnérable au suicide », nous explique Nadia Mouâtassim, psychologue clinicienne. Qu'en est-il donc d'un adolescent ? « Au-delà des facteurs de risque, lors d'une crise suicidaire d'un jeune sujet ou un adolescent, il est question d'une douleur vive, une souffrance insoutenable dont la seule issue, pour lui, reste la mort. Il ne choisit pas vraiment de mourir mais plutôt d'apaiser cette douleur et de s'en débarrasser », analyse la spécialiste. Facteurs de risque D'après cette dernière, les facteurs de risque se multiplient dans ce cas. Des relations familiales pénibles aux épreuves de vie difficiles en passant pas les traumatismes et les violences subites... les causes augmentant le risque de passage à l'acte sont légion. «Certaines études américaines et européennes ont démontré que 90% des jeunes suicidés souffraient d'une maladie mentale préexistante. Ce risque est d'autant plus élevé que le trouble est précoce », explique Mouâtassim. Les principaux troubles prédisposant au suicide restent, selon la praticienne, la dépression majeure, la bipolarité, l'abus de substances alcool ou drogues et les troubles de la conduite. Les personnes ayant déjà fait des tentatives de suicide constituent également un groupe prédisposé. « Le risque de passage à l'acte chez ces personnes est quarante fois supérieur à la moyenne de la population et reste ainsi élevé pendant plusieurs années après. 40% des jeunes suicidés ont déjà fait une tentative auparavant », nous explique la spécialiste. Tous mobilisés Particulièrement touchés par le fléau, les jeunes sont ainsi au cœur de la nouvelle campagne de sensibilisation menée par l'Association Sourire de Reda. Lancée mardi 31 janvier sous le thème « Prévention du suicide : Tous mobilisés», cette nouvelle campagne se caractérise par l'implication des acteurs de santé publique. « Lorsque nous avons débuté notre action et notre mobilisation pour la prévention du suicide, nous étions seuls. Aujourd'hui, on se réjouit de la prise de conscience de la société et des pouvoirs publics » déclare Meryeme Bouzidi Laraki, présidente et fondatrice de Sourire de Reda. « Faire partie des rares pays (moins de 40) qui ont mis en place une stratégie nationale pour répondre à cet état d'urgence est très important. Nous vivons une étape cruciale de ce combat sans merci », ajoute Bouzidi. Lors de cette rencontre, ont été présentés les principaux axes de la Stratégie nationale de prévention du suicide 2023-2030. Ils s'articulent autour de l'information et la sensibilisation notamment à travers la formation des leaders d'opinion. La prévention des risques suicidaires est au cœur de cette stratégie via la limitation de l'accès aux moyens de suicides spécialement les produits chimiques toxiques ; mais aussi à travers les programmes éducatifs renforçant les aptitudes sociales et psychologiques des enfants et des adolescents.