Lorsque Hamid Chabat, juste après son élection à la tête du Parti de l'Istiqlal, a déclaré qu'il y aurait un changement au niveau du gouvernement, il ne faisait pas dans l'effet d'annonce. On vient d'en avoir le cœur net. La lettre adressée au chef du gouvernement ce jeudi 3 janvier 2013 n'est pas une simple clause de style. Le secrétaire général du PI a rappelé au chef du gouvernement que celui-ci est l'émanation d'une coalition. D'ailleurs, Hamid Chabat insiste sur la dénomination. Pour lui, Abdelilah Benkirane n'est pas chef du gouvernement, mais chef de la coalition au gouvernement. Ce n'est pas une simple nuance de style. Et c'est à ce niveau que la critique de H. Chabat a été très pointue. Pour lui, Abdelilah Benkirane a agi durant la première année du gouvernement comme si son parti était seul au pouvoir, négligeant toutes les autres composantes et leur représentation, le conseil de l'alliance de la majorité. Chabat a rappelé quelques décisions emblématiques de cet état de fait : la publication des listes des agréments et licences, le cahier des charges de l'audiovisuel, les retenues sur salaires des grévistes... Autant de décisions qui ont été prises sans concertation avec les alliés ce qui a conduit à leur échec ou à leur inefficacité a souligné le secrétaire général du PI. Il a à ce titre exigé que le cadre idoine pour la discussion de tous les projets gouvernementaux soit le conseil de l'alliance. Ce qui veut dire qu'aucun ministre ne doit plus agir de son propre chef. Et puis, il y a aussi le dossier du changement gouvernemental. Hamid Chabat voudrait plus d'adéquation entre la force politique au Parlement et les sièges accordés à tel ou tel parti. Plus encore, il réclame la réduction des portefeuilles et leur répartition de manière cohérente en regroupant des départements éparpillés. En outre, il ne veut pas de ministères éclatés entre plusieurs personnes ou partis. En fin, les femmes doivent disposer d'au moins 20% de portefeuilles ministériels. Le chef de la coalition gouvernementale ne pourra plus agir comme si son parti avait la majorité absolue, ce qu'il a eu tendance à faire durant sa première année. Hamid Chabat voudrait que le chef de gouvernement agisse en tant que tel. Il a reproché à Abdelilah Benkirane d'avoir trop souvent apparu comme chef de parti plutôt comme chef de gouvernement. Sur le volet économique, Hamid Chabat a critiqué le manque de vision claire, puisque pour lui le gouvernement a complètement oublié les entreprises exportatrices créatrices de richesses et d'emplois. Par ailleurs a-t-il dit, les grands projets ont été lancés sous la mandature du gouvernement précédent. Quant au volet social, tout en reconnaissant certains apports du gouvernement, Hamid Chabat a rappelé que les plus grandes décisions ont déjà été prises par le gouvernement précédent dirigé par l'istiqlalien Abbas El Fassi. Le tout est de savoir comment Abdelilah Benkirane va réagir. En tout cas, il ne semble pas avoir beaucoup de choix, du moment que l'Istiqlal est le deuxième parti de la coalition et que Hamid Chabat semble décidé à aller jusqu'au bout.