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La Banque mondiale découvre 400 millions de pauvres en plus
Publié dans L'observateur du Maroc le 17 - 09 - 2008

La Banque mondiale vient de reconnaître des erreurs importantes dans ses calculs concernant la situation mondiale de la pauvreté. Tout en affirmant que « les estimations de la pauvreté établies par la Banque mondiale s'améliorent grâce à des données plus fiables sur le coût de la vie », l'institution qui traverse une très grave crise de légitimité depuis plusieurs années, a découvert que « 400 millions de personnes de plus que l'on ne pensait précédemment vivent dans la pauvreté ». C'est plus de la moitié de la population de l'Afrique subsaharienne !
Cela reflète le manque de fiabilité des statistiques publiées par la Banque mondiale, statistiques qui servent surtout à cautionner les politiques néolibérales imposées à travers le monde par ses propres experts. Selon son communiqué, « 1,4 milliard de personnes vivant dans le monde en développement (1 personne sur 4) subsistait avec moins de 1,25 dollar par jour en 2005 », alors que les estimations précédentes tournaient autour de 1 milliard de personnes. Pour autant, la Banque mondiale ne manque pas de se réjouir car ce qui compte pour elle, ce n'est pas le nombre de pauvres, mais la proportion de personnes pauvres. Pourquoi ? Parce qu'avec la démographie mondiale galopante, ce chiffre permet plus facilement de faire illusion : si, par exemple, le nombre de personnes pauvres stagne, la proportion de pauvres baisse mécaniquement au fil des ans. Voilà pourquoi l'objectif dit « du millénaire » est de réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour. Mais avec les énormes erreurs de la Banque mondiale dans ses calculs sur la pauvreté, c'est tout l'édifice des politiques internationales actuelles contre la pauvreté qui s'écroule. Les politiques d'ajustement structurel (réduction des budgets sociaux, recouvrement des coûts dans les secteurs de la santé et de l'éducation, agriculture tournée vers l'exportation et réduction des cultures vivrières, abandon de la souveraineté alimentaire, etc.), imposés par le FMI et la Banque mondiale depuis le début des années 1980, ont détérioré les conditions de vie de centaines de millions de personnes dans le monde. Les critiques envers la Banque mondiale n'ont pas manqué à ce propos. Ainsi Thomas Pogge, professeur à l'université Columbia, écrivait récemment : « Les méthodes de calcul de la Banque mondiale sont extrêmement douteuses. Il y a des raisons de penser qu'avec une méthode plus plausible, on observerait une tendance plus négative et une pauvreté beaucoup plus étendue. (…) Tant que la méthode actuelle de la Banque mondiale et les données qui se basent sur elle conserveront leur monopole dans les organisations internationales et dans la recherche universitaire sur la pauvreté, on ne pourra pas prétendre prendre ce problème réellement au sérieux. » La Banque mondiale a fait la preuve de son échec, tant sur le plan statistique que sur le plan politique. Plus que jamais, l'objectif visé doit être triple : l'abandon de la logique de l'ajustement structurel, l'abolition de la Banque mondiale et son remplacement dans le cadre d'une nouvelle architecture institutionnelle internationale.

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