Ahmad Ahmad, le nouveau président de la CAF, a choisi le Maroc pour effectuer son premier déplacement officiel. Cet ancien ministre malgache est déterminé à nettoyer la Confédération et la remettre sur les rails pour qu'elle soit à la hauteur des ambitions de l'Afrique. Il vient de démissionner de son poste de vice-président du Sénat de Madagascar pour se consacrer à sa nouvelle fonction à la tête de la CAF. - L'Economiste: Les relations entre la CAF et le Maroc étaient tendues. Peut-on considérer votre premier déplacement à Casablanca comme un nouveau virage? - Ahmad Ahmad: Comme je l'ai dit lors de ma campagne, ce qui s'est passé avant, et qui ne porte pas atteinte à la Confédération, je ne veux même pas en toucher un mot. Par contre, cette CAF que je préside actuellement, qui s'ouvre sur tous les horizons, une CAF qui, dès le départ, s'associe avec le Maroc pour amorcer le changement. Aujourd'hui, nous disons que le football ne peut rester en dehors des mouvements politiques dans le continent. Nous nous associons à la diplomatie qui est enclenchée par SM le Roi du Maroc et nous voudrions bien l'accompagner dans cette démarche. Nous voudrions que le football soit au diapason de cette diplomatie agressive au niveau du continent. Le président de la Fédération royale marocaine de foot nous a rassuré, lui qui a déjà amorcé quelques contrats dans la ligne directrice de cette diplomatie. - Quelles sont les priorités de la nouvelle présidence de la CAF? - D'abord nettoyer la maison, remettre la CAF au niveau administratif aux normes et standards actuels de gestion, particulièrement sur le plan financier. Evidemment, nous avons clamé haut et fort l'exigence d'une transparence dans la gestion financière. En tant que président, je me repose entièrement sur l'expertise de Fouzi Lakjaâ en la matière. - Avez-vous engagé un audit pour vérifier les comptes de la CAF sous Issa Hayatou, marquée par une opacité légendaire? - Nous attendons la réunion du comité exécutif qui aura lieu bientôt pour enclencher toutes ces démarches. Aujourd'hui, c'est une obligation administrative de gestion avant de prendre les rênes d'une institution aussi grande que la CAF. Il faut absolument un audit. - Pensez-vous que le Maroc pourrait contribuer à la réalisation des objectifs de la nouvelle présidence? - Je suis entièrement convaincu que de grands pays comme le Maroc, l'Egypte, le Nigéria, l'Afrique du Sud, le Ghana, le Congo ou d'autres pays ayant la chance de se développer sur le plan économique peuvent s'associer avec nous. Evidemment, nous allons nous rapprocher des différentes institutions dans le continent pour qu'on puisse aller de l'avant. Il ne s'agit pas seulement de développer le football en tant que jeu mais surtout de l'utiliser comme un instrument de stabilisation sociale et économique. - Comment mobiliser les financements nécessaires pour la mise en œuvre de votre stratégie? - J'attends mon comité exécutif, j'attends mon président de la Commission des finances et les responsables de marketing. Mais attention, ne rêvons pas! Tant que nous ne mettons pas au diapason des standards internationaux en matière de gestion et de transparence financière, c'est un leurre. Nous ne pouvons pas être crédibles vis-à-vis des sponsors. C'est la première tâche à remplir. Les partenaires vont voir ce qui va s'opérer avant de venir nous aider dans cette démarche. - Quel est le budget et les sources de financement de la CAF? - Actuellement, il y a deux sponsors qui sont Total et Orange. De l'autre côté, il y a la vente des droits de télévision. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas la main sur ces dossiers. Je viens d'être informé par mon secrétaire général intérimaire qu'aucun contrat n'a été transmis. Je ne peux pas vous cacher cela. C'est votre droit de savoir d'autant que la CAF appartient à tout le monde. Cela aussi c'est de la transparence. - La modernisation de la gouvernance après tant d'années de laisser-aller est une nécessité. Que faire? - Il y a beaucoup de personnes de bonne volonté qui ont beaucoup d'expertise mais cela dépendra beaucoup de notre détermination. En tant que président, je dois aller de l'avant et réformer tout cela. Cela devrait être une fierté pour l'Afrique. - Comment renforcer les liens avec la FIFA pour assurer une meilleure représentativité de l'Afrique au niveau mondial? - Déjà, la FIFA a donné un signal fort à l'Afrique. Le président Gianni Infantino a nommé une Africaine à la tête de l'administration de la FIFA. Fatma Soumara est secrétaire générale de cette institution. Une chose qui n'a jamais été faite. C'est à nous d'en profiter, de resserrer les liens et d'aider cette responsable à tirer le maximum de profit pour que sa position soit bénéfique pour le continent. Je sais que c'est une femme qui a une volonté de fer. Je l'ai côtoyée lorsque j'étais au gouvernement, elle était alors responsable des Nations unies dans mon pays. C'est elle qui avait géré la sortie de la crise malgache. J'ai confiance encette femme qui veut aller de l'avant, qui aime son continent. Elle aime travailler de manière claire et transparente. - Que va vous apporter Fouzi Lakjaâ à la CAF? - Pour le moment, je ne peux pas vous dire plus. En tant que président, je vais essayer d'exploiter au maximum possible l'expertise de chaque membre du comité exécutif, même de chaque président de Fédération. Vous savez tous qu'il excelle dans la gestion financière. Comment dès lors ne pas chercher à profiter de son savoir-faire? Mais la nomination doit se faire au sein du comité exécutif. C'est un indicateur très fort que je vous livre.