Retour sur la vie et les oeuvres d'un auteur hors pair dont les écrits restent «immortels». Ernest Miller Hemingway, plus communément appelé Ernest Hemingway, nous a quittés voilà maintenant cinquante ans. Alors même qu'un océan nous sépare, et que ses écrits sont rédigés dans une langue qui n'est pas la nôtre ce qui nous contraint à nous référer à la traduction de ses oeuvres, il convient de rendre hommage à ce grand homme qui a beaucoup influencé la littérature par son humanisme et l'universalité de ses écrits. Anissa Bellefqih, auteur marocaine édité chez L'Harmattan, nous le confirme : «J'apprécie beaucoup Ernest Hemingway et j'ai lu plusieurs de ses ouvrages. C'est un auteur qui arrive à faire vivre le lecteur dans l'histoire qu'il raconte et écrit». D'ailleurs, pour tout lecteur passionné, il ne saurait être question d'ignorer un de ses chefs d'œuvre : «Le vieil homme et la mer». Ce roman laisse des empreintes indélébiles sur le lecteur même s'il ne s'agit que d'une simple histoire de pêche où, dans la majorité de l'œuvre, le personnage principal, Santiago, un vieux pêcheur cubain, ne parle qu'à lui-même et très rarement, au début et à la fin de l'œuvre précisément, à un jeune pêcheur du nom de Manolin. L'écrivain marocain Abdellah Taïa nous dit à ce propos : «Le vieil homme et la mer est un roman qui m'a beaucoup impressionné. Je n'oublierai jamais les relations très fortes entre le vieux pêcheur Santiago et le jeune Manolin. La vie est une épreuve infinie. Et malgré les attaques, la fatigue et le découragement, il ne faut jamais renoncer à la lutte. Voilà la leçon de vie qu'on peut tirer de ce roman très humaniste». Bien que quelques pages ne suffisent pas pour exprimer l'hommage mérité envers un homme de cette envergure, on trouve ici l'essentiel de ce qui a fait d'Ernest Hemingway, l'un des plus grands écrivains de tous les temps : Il faut rendre à Cesar… Ernest Miller Hemingway est né le 21 juillet 1899 à Oak Park, près de Chicago, dans l'Etat de l'Illinois aux USA, d'un père dentiste, Clarence Hemingway, et d'une mère musicienne, Grace Hall. Ecrivain et journaliste, Hemingway a réussi à influencer le roman du XXe siècle grâce à un style d'écriture très réaliste qui lui est propre et une vie d'aventurier qu'il vécut. De son vivant, l'auteur a publié sept romans, six recueils de nouvelles et deux œuvres non romanesques. On lui doit aussi trois autres romans, quatre recueils de nouvelles et trois œuvres non romanesques qui ont été édités à titre posthume. Plusieurs de ces œuvres rencontrèrent de son vivant et aujourd'hui encore un succès énormes. Ces dernières sont considérées comme étant de grands classiques de la littérature américaine. Maurice Edgar Coindreau, qui a traduit en langue française plusieurs œuvres d'Hemingway , explique la démarche de l'auteur : «L'auteur arrive toujours à capter l'intérêt du lecteur par l'évocation tragique des grands combats politiques du siècle (comme la guerre d'Espagne) ou par la promotion de certaines valeurs morales telles que le dépassement de soi ou le goût de l'aventure et ce, dans une écriture très simple, épurée à l'extrême, enchaînant les actions du récit de manière journalistique, voire presque «télégraphique». Mais ce qui ne manque pas de surprendre, c'est le contraste existant dans les œuvres de l'écrivain. Ses romans ont toujours pour personnages principaux soit des aventuriers comme lui, soit des personnages qui, ayant perdu foi en la vie, sombrent dans des tourments intérieurs ou dans un cynisme évident. Une vie bien remplie Ce contraste devient compréhensible quand on sait que les récits de l'auteur sont inspirés de ses nombreuses expériences. Il est reporter au Kansas City Star avant de devenir ambulancier en Italie pendant la Première Guerre mondiale. Il s'enrôle ensuite dans l'infanterie italienne où il fut gravement blessé. La guerre terminée, l'écrivain devient correspondant à Paris du Star de Toronto, avant de s'installer à Key West en Floride, puis en Espagne et en Afrique. Hemingway retourne en Espagne lors de la guerre civile espagnole et y assume la fonction de correspondant de guerre, fonction qu'il honorera à nouveau pendant la Seconde Guerre mondiale. A la fin de la guerre, Ernest Hemingway s'installe près de La Havane puis à Ketchum dans l'Idaho où il mettra fin à ses jours en 1961. Il ne supportera pas sa déchéance physique provoquée par un diabète avancé: une cécité annoncée et une descente irréversible dans la folie. Ce n'est que trois ans après sa première publication, en 1923, qu'Hemingway acquiert une renommée certaine avec «Le soleil se lève aussi», en 1926. L'auteur arrive en 1929 à asseoir définitivement sa réputation de «grand écrivain» avec son second grand roman «L'Adieu aux armes». Dans de très nombreux écrits, Hemingway condamne avec force les injustices économiques et politiques qui sévissent dans le monde. L'un de ses romans les plus célèbres, «Pour qui sonne le glas», inspiré de son expérience de la guerre d'Espagne, a été écrit en 1940 et l'auteur y démontre son attachement à la liberté et son importance dans le monde. En 1952, Ernest Hemingway publie «Le vieil homme et la mer» pour lequel il reçoit une très haute distinction en 1953 : Le prix Pulitzer. Mais c'est en 1954 qu'Hemingway reçoit la plus prestigieuse distinction littéraire, le prix Nobel, pour lequel il donnera devant le jury de l'Académie suédoise à Stockholm, le discours le plus court de l'histoire de cette institution. Pour conclure, voici l'hommage que lui rend le professeur universitaire de lettres Abdelali Chibani : «J'étais très jeune quand j'ai lu Ernest Hemingway. Comme tout le monde, j'ai commencé par «Le Vieil homme et la mer». A l'époque, habitué aux classiques français dégoulinant de psychologisme, ce roman au style simple m'a tout simplement fasciné comme m'a fasciné le combat perdu du vieux pêcheur contre le poisson qu'il a pêché et dont il ne ramène que le squelette au port. C'est ainsi que j'ai découvert qu'on pouvait écrire un roman sur un homme et un poisson pour rendre compte de la condition humaine. Ensuite je suis passé à «L'Adieu aux armes» et «Les neiges du Kilimandjaro». Avec Hemingway, j'ai été entraîné dans un monde où la virilité, l'effort physique, la lutte contre les éléments servent à rendre compte de la condition humaine. Je ne crois pas que Hemingway ait eu quelque influence intellectuelle sur moi, mais il m'a permis de sortir des minuscules appartements parisiens des romans français que je lisais pour respirer l'air du grand large qu'on retrouve dans les romans de ce journaliste féru de pêche et de chasse. En tout cas, c'est grâce à lui que je me suis mis à lire les «classiques» américains: Steinbeck, Faulkner, Dos Passos ou Flannery O'Connor; de ce point de vue, j'ai une dette envers lui». Amine Amerhoun Citations d'Ernest Hemingway «Décider de ne pas être un salopard permet de se sentir plutôt bien... Ca pourrait presque remplacer Dieu.» «La lâcheté est presque toujours due à la simple incapacité de suspendre l'activité de son imagination». «La première panacée pour une nation mal dirigée est l'inflation monétaire, la seconde est la guerre. Les deux apportent prospérité temporaire et destruction indélébile. Les deux sont le refuge des opportunistes économiques et politiques». «Chacun de mes contacts avec la politique m'a donné l'impression d'avoir bu dans un crachoir».