Le journalisme mène à tout, à condition de savoir s'en sortir ! Voilà une phrase lapidaire, d'autant moins amène pour nous qu'elle est fausse. Ridicule ! Elle signifie aussi le mépris pour ce métier qui, pourtant, n'arrête pas d'attirer et de séduire , y compris ceux qui feignent le dédaigner. Or, le journalisme est un métier, il a ses propres règles, sa déontologie, son éthique et ses exigences. J'ajouterais ses défauts, ses grandeurs et ses misères ! Maintenant il y a le précepte qui nous pend au nez, selon lequel « on naît poète, mais on devient journaliste » ! Autrement dit, si la poésie est un don de Dieu, un talent inné, le journalisme est d'abord un apprentissage et une formation. On devient journaliste, après avoir suivi le cursus requis, au sein d'une école ou d'un institut, ensuite d'une rédaction de la presse écrite ou audio-visuelle... Et certainement aujourd'hui sur un site électronique ! On y fait ses premières armes, y exerce ses premiers coups de sabre aussi... Le journalisme s'apprend, comme tous les autres métiers ! Et certainement pas sur le tas, comme d'aucuns voudraient nous le faire croire et dire. Les règles du métier participent d'une règle qui est celle des règles de cette profession qui, de tout temps et comme un temple constamment violé, y voient défiler tout le monde...On se garderait de dire une « auberge espagnole » ! C'est la seule discipline qui ouvre ses portes à des professeurs montés sur leurs ergots de savants, d'avocats, de banquiers, de tout et tutti quanti ! Tout le monde veut donner de la plume ou de la voix ! Un médecin souhaiterait-il livrer ses fantasmes ? N'importe quel organe lui ouvre ses colonnes...Le médecin a le droit d'exercer le métier de journaliste, tant mieux ! Mais un journaliste a-t-il le droit d'exercer ou de réfléchir sur la médecine ? Paradoxale, incohérente et même choquante la réflexion nous conduit à dire que le journalisme au Maroc a été envahi par toutes catégories de maîtres-penseurs qui n'ont rien à voir avec notre métier ! Nous autres, savons le prix de cette coercitive aberration : notre statut est fragilisé parce qu'il ne nous distingue pas ! A quelques heures de la remise du Prix Albert Londres pour le meilleur reportage, voici ce que ce même vieux Albert disait de notre métier : « Je demeure convaincu qu'un journaliste n'est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n'est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie». C'était en 1929. »