After the CJEU rulings, Morocco demands deeds not words from the EU    Maroc-UE : signature d'une convention de 190 millions d'euros pour la reconstruction des zones sinistrées par le séisme d'Al Haouz    NARSA dans la tourmente : des responsables accusés de trafic de voitures    Le Maroc, un partenaire « fiable » et « un pilier de stabilité » dans la région    Gaza : Les Palestiniens sont sans abri et privés de nourriture et d'eau potable    Le calvaire prolongé de Mohamed Saad Berrada, le ministre des silences embarrassés    Vague de froid: l'Etat s'apprête à prêter assistance à 872.000 personnes ciblées durant l'hiver    Future Citroën C4 production moves to Kenitra, Madrid plant at risk    Installation du nouveau DG de l'ONMT, Achraf Fayda    Rencontres : la philosophie au rendez-vous    Ligue des Champions féminine de la CAF : Sanaâ Mssoudy et Doha El Madani dans l'équipe type du tournoi    Malgré les menaces du Polisario, le Rallye Africa passera à nouveau par El Guerguerate    El Español : Le Maroc continue de suffoquer Melilla    Maroc : Un touriste belge disparaît près de Taghazout    Israël nomme un défenseur de la marocanité du Sahara, ambassadeur aux Etats-Unis    Italie : La chef marocaine Nour Maaffer remporte un prestigieux prix de cuisine    MMA : Boughanem, champion marocain de Muay Thai, remporte son combat en Autriche    Ahmed Spins, le fils Akhannouch sur la scène de Coachella 2025 en Californie    Afrique du Sud. L'ANC expulse définitivement Jacob Zuma    Le Parlement marocain prend part à la 70ème session annuelle de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN    Le Maroc a exporté pour trois milliards de dollars de produits de la mer en 2023    Coupes africaines des clubs : Raja Casablanca-AS FAR en tête d'affiche, la RS Berkane reçoit les Angolais de CD Lunda Sul    Botola D1. JII: Football au degré zéro, il faut voir ailleurs pour se faire plaisir !    Football : Gyökeres déjà parmi les buteurs les plus efficaces de l'histoire sur une année civile    Swissport remporte la concession de onze salons VIP dans les aéroports marocains    Interview avec Peter PanyinAnaman: « J'ai réalisé que Ses citations ont le pouvoir d'inspirer, de motiver et d'éduquer »    Le Maroc, l'Algérie et le syndrome de Cassandre...    La DGSN et la sûreté de l'Etat belge renforcent leur coopération en matière de sécurité    Terrorisme : Le Maroc dans le viseur des jihadistes sahéliens [INTEGRAL]    Un trafiquant de drogue belge recherché arrêté par les autorités marocaines à Casablanca    Achraf Fayda entame son mandat à la tête de l'ONMT    Hommage à la solidarité des marocains lors des inondations de Valence    Etats du Sahel. Trois pays, un seul passeport    Festival du Cinéma des peuples : "Gray Days" d'Abir Fathouni remporte le Grand Prix    Interview avec Asma Graimiche : « Il est nécessaire d›intégrer la critique de cinéma aux programmes universitaires »    Mode. Le caftan marocain fait sensation à Séville    Foot: la sélection marocaine U15 prend part à un tournoi international en Espagne    Olympiakos : Ayoub El Kaabi claque un hat-trick et devient le meilleur buteur du championnat    Ayyoub Bouaddi penche pour les Lions de l'Atlas    Assurances : Les primes émises en hausse de 4,8% à fin septembre 2024    Epson Maroc : Cinq années de réalisations, d'innovations et de leadership    CV, c'est vous ! EP – 77. Nasry Aboujihade, un chirurgien au service de votre sourire    M Avenue et le FIFM : Une collaboration qui illumine Marrakech    Taznakht : The Grand finale of the Aït Ouaouzguit carpet festival    Coopération sino-marocaine : Le Maroc, « un partenaire clé au sein de la BRI »    Investissements : Karim Zidane VRP du Maroc en Corée et au Japon    Libye: L'union africaine réitère la pertinence des processus de Skhirat et de Bouznika    Taznakht : Clôture en beauté pour le Festival du tapis d'Aït Ouaouzguit    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Salim Jay : La littérature maghrébine de langue française, un compromis ambigu ?
Publié dans Le Soir Echos le 04 - 05 - 2010

C'est une problématique trop souvent caricaturée  qu'analysent abruptement   Jacqueline  Kaye et Abdelhamid Zouhir dès  1990 dans  «The Ambiguous Compromise Langage, Literature, and National Identity in Algeria and Morocco».   
Les auteurs font une remarque qui ne peut, certes, pas être balayée d'un revers de la main : «Si la littérature algérienne écrite en français était plus accessible que la littérature algérienne écrite en arabe, durant la période allant de 1954 à 1962, ce n'est pas que la langue française soit supérieure à la langue arabe ; c'est plutôt parce que les écrivains algériens de langue française se conformaient aux normes littéraires d'un empire colonial qui s'était agrandi depuis le XVIe  siècle et était parvenu  à modeler leur perception de l'humanisme au détriment d'autres perceptions». Et de se demander quelle eût été la renommée de Kafka s'il avait écrit «Le Procès»  en yiddish ou en tchèque plutôt qu'en allemand.
«La Colline oubliée»  (1952) et «Le Sommeil des justes» (1955) furent les premiers romans de Mouloud Mammeri (1917-1989). Le romancier et anthropologue enseigna la langue et la culture berbère à l'université  et sa passion humaniste a laissé une empreinte durable. La question de l'identité, Mohammed Dib la voyait comme «un sophisme que la critique a inventé spécialement pour les écrivains algériens». Une exception à cette hypothèse  devrait, sans doute, être aménagée pour le cas de Jean El Mouhoub Amrouche, l'écrivain qui montra que l'attitude à l'égard de la littérature algérienne de langue française a évolué en cinquante ans. Donnons deux exemples:
«C'était à une vente publique, à Paris (…), j'étais cette année-là le seul écrivain algérien à y signer et j'avais une conscience aiguë de ma solitude et de ma fugitive représentativité».
« Il se présenta  devant mon stand un Algérien trapu, très brun, vêtu avec cette naïve élégance et cette émouvante correction du prolétaire déraciné à qui l'habitude du racisme enseigna que l'habit fait le moine. Il me demanda en arabe : 
-Lequel veux-tu que je prenne ? (…) Je ne sais pas lire. 
Je ne pus m'empêcher d'interroger :
-Alors pourquoi achètes-tu un livre ? 
Il ne chercha pas ses mots pour me dire : 
-Parce que tu es de chez nous et que tu parles de nous».
Cette scène est rapportée par le romancier Malek Haddad dans «Ecoute et je t'appelle».  Après 1962, cet écrivain ne publia plus que des articles dans la presse. Cesser d'écrire ?!
A Rabat en 1958, Jean Amrouche  confiait, lui, lors d'une conférence : «Je ne peux pleurer qu'en kabyle». Gaston Deferre lui rendit hommage en 1985 dans «Jean  Amrouche eternel Jugurtha»  (Ed. Archives de la ville de Marseille): «Hybride culturel condamné par l'Histoire, Amrouche se considérait avec une profonde amertume. Mais les hybrides culturels sont aujourd'hui  légion, d'où qu'ils viennent de par le monde. Ils pourraient bien reconnaître en Jean Amrouche un aîné douloureux et lumineux, saluer en lui le pionnier des lettres et de la poésie algérienne d'expression française».
Le titre du roman d'Assia Djebar «La Disparition de la langue française»  offre une image caricaturale de l'exil de nombreux intellectuels algériens francophones dans les années 1990. Quant à la visibilité de la littérature algérienne de langue arabe, Waciny Laredj, romancier et universitaire, y contribue de tout son allant. Mais c'est en Sorbonne qu'il enseigne aujourd'hui. 
On se replongera dans la lecture de «Minuit passé de douze heures : écrits journalistiques, 1947-1989» (Seuil, 1999) de Kateb Yacine pour y retrouver le texte d'une conférence prononcée par l'auteur de «Nedjma» alors qu'il était âgé d'à peine dix-sept ans. C'était le 24 mai 1947 à la salle des Sociétés savantes à Paris. Le jeune homme ne disait, au fond, rien d'autre que ce qu'écrirait  Mouloud Feraoun dans son «Journal 1955-1962» : «Il y a un impératif désiré par tous, un idéal à atteindre. Se sentir libéré, l'égal de tous les hommes».
D'instinct, chaque lecteur, en quelque langue que ce soit, n'a pas d'autre idéal à atteindre, à partager et à transmettre. Chaque œuvre véritable, partout dans le monde, n'a pas de plus urgent dessein secrètement tapi au cœur du texte : libérer de la servitude  la parole et l'imagination.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.