C'est à un véritable exercice d'opposition gouvernementale auquel s'est livré Adil Douiri, ancien ministre et membre de l'Istiqlal qui forme pourtant la coalition gouvernementale, en marge l'étape casablancaise du Forum de Paris le mercredi 6 février. L'ancien ministre du Tourisme a tiré à boulets rouges sur le gouvernement et en particulier le PJD, sans toutefois le citer. « Nous sommes inquiets de la façon de décompenser. Nous pensons que la situation économique et sociale sont très tendues. Il faut être prudent dans la décompensation qui doit être très graduelle et progressive. D'un autre côté, nous sommes favorables à un système d'aides conditionnées aux populations, comme ce que nous avons proposé dans le cadre du programme électoral de l'Istiqlal, à savoir Tayssir pour l'éducation des enfants et le programme Riaaya pour la santé de la femme. Par contre, nous sommes prudents par rapport aux aides directes inconditionnées sans contrepartie qui sont des programmes difficiles à gérer », a t-il notamment lancé par rapport à la réforme de la caisse de compensation. Le gouvernement a-t-il failli à sa mission ? Lors de la manifestation qui a rassemblé plusieurs hauts décideurs et économistes notamment Dominique Strauss-Kahn et Ana Palacio et dont le thème est « Vivre le chaos : où sont les opportunités de la crise ? », Adil Douiri s'est carrément emporté en tirant sur le parti islamiste tout en louant les réalisations de Nizar Baraka, le ministre istiqlalien. « Nous avons baissé l'IR, augmenté les salaires, diminué les droits de douane, réussi à maintenir la résilience de notre monnaie et stimulé la croissance des exportations des biens de consommation. Comme l'a déclaré Nizar Baraka, ministre de l'Economie et des finances, l'Etat a pris le taureau par les cornes et nous avons investi massivement pour maintenir la croissance », déclare-t-il avant d'ajouter que la nouvelle Constitution donne plus de pouvoirs au Chef du gouvernement et que ce dernier doit jouer pleinement son rôle et fournir davantage d'efforts. « Nous n'avons pas senti une mobilisation pour une véritable gouvernance économique. Il n y a ni plan d'action ni plan de redressement pour l'économie à moyen terme. Où sont les leviers qui devraient soutenir notre croissance ? », s'alarme Douiri. Pourquoi Douiri profite de chaque occasion pour médiatiser une position voulant discréditer Abdelilah Benkirane ? En lui posant la question si ça relève du paradoxe que de tirer d'une telle manière sur un gouvernement dont l'Istiqlal fait partie, Douiri a rejeté cette idée en rappelant que « L'Istiqlal a dressé un mémorandum très clair à la coalition gouvernementale pour qu'elle soit associée aux grandes décisions politiques. On ne peut pas assumer des décisions auxquelles on n'a pas participé et on ne participe pas aux grandes décisions politiques pour l'instant », nous lance-t-il. Qui parle de populisme ? Douiri conclut sur un ton plutôt optimiste et confiant pour ce qui est de la croissance économique du Maroc, sans lâcher prise quant à sa position virulente en conditionnant cette prospérité économique à une meilleure gouvernance, « aller au-delà du populisme et du show médiatique et de la politique spectacle ». Des termes forts que Douiri lance aux centaines d'invités remettant même en cause la crédibilité de la presse, puisqu'il faut savoir que la « politique spectacle » ne peut avoir lieu sans l'implication directe des médias qui favoriseraient cette tendance. D'ailleurs, il conviendrait de signaler que Douiri avait déclaré récemment qu'il ne faut pas « écouter la presse». Pour information, lors de cet événement, nous avons remarqué une quasi-absence d'invités PJDistes… Une occasion en or pour cet Istiqlalien de défendre les membres du parti politique auquel il appartient et tirer sans concession sur le PJD, ceci sans proposer de véritables solutions quant à l'asphyxie de nos finances publiques, lui à qui plusieurs observateurs imputent l'échec du plan Azur à l'époque où il était ministre du Tourisme.