L'adoption du projet de loi de finances 2013 par la Chambre des représentants s'est déroulée dans la précipitation. La loi organique du PLF devra résoudre le problème. L'examen du PLF par les élus de la 2e Chambre constitue un vrai test pour le gouvernement Benkirane qui ne dispose pas de la majorité dans cette Chambre. De la séance plénière du samedi 24 novembre consacrée à l'examen général du PLF et à son adoption, les députés gardent une amertume. Ils estiment que la précipitation dans laquelle ils sont appelés à remplir leur tâche n'est pas sans conséquence sur la qualité de leur travail. «Le rendement parlementaire reste faible par rapport à notre ambition. Jusqu'à ce jour, c'est le gouvernement qui garde plus de contrôle sur le PLF et non le Parlement », déclare au « Soir échos » le président du groupe PAM à la Chambre des représentants, Abdellatif Ouahbi. Et d'expliquer que le PLF n'est soumis aux députés que deux jours avant le délai constitutionnel consacré à son examen et son vote. La Constitution accorde en totalité 70 jours à cet exercice de façon à permettre aux deux Chambres du Parlement de disposer de 30 jours chacune. Les 10 jours restant sont consacrés à l'adoption finale du PLF par la Chambre des représentants au cas où des amendements sont proposés par la Chambre des conseillers. Constitué en majorité des partis de l'opposition, il est certain que celle-ci n'épargnera pas au PLF 2013 une avalanche d'amendements. Insuffisance de temps et de moyens « Le budget d'une année doit être discuté au sein des différentes commissions dont les membres n'ont, pour la plupart, qu'une dizaine de minutes chacun pour participer aux débats sectoriels. Le gouvernement dispose, pourtant, de tous les moyens lui permettant de déposer ce texte bien avant le délai. Si nous avions le PLF deux mois à l'avance, nous pourrions y travailler plus à l'aise », estime Ouahbi. Le groupe PAM, qui a proposé le plus grand nombre d'amendements (69 sur 250), a dû faire appel à des bénévoles de son parti pour parvenir à remplir sa mission. « Il n'y a ni équilibre ni coopération entre les deux pouvoirs législatif et exécutif sur ce volet, pour le moment », regrette le président du groupe PPS, Rachid Roukbane pour qui les députés sont appelés à traiter une pile de données en très peu de temps. « Chaque député ne compte que sur ses propres moyens pour accomplir ce travail », précise-t-il, faisant allusion au manque d'expertise et de moyens humains dont souffrent les différents groupes parlementaires. C'est à l'unanimité que les députés revendiquent donc une amélioration de la méthodologie de travail de manière à leur permettre une efficacité. C'est le but que la loi organique du PLF devra atteindre. « Nous disposons d'une sous-commission en charge de l'élaboration de cette loi organique en partenariat avec le gouvernement. Une première esquisse de ce projet est prête depuis septembre dernier. Elle est entre les mains du gouvernement qui devra l'examiner en profondeur, afin qu'elle soit applicable dès le PLF 2014. C'est la promesse du gouvernement », confie le président de la commission des finances et du développement économique, Said Khayroune, député du PJD. « C'est l'unique loi sur laquelle travaillent les deux pouvoirs ensemble, actuellement, afin de permettre aux députés d'entamer l'examen du PLF vers le mois de juillet et de disposer d'outils de pilotage », se réjouit le président de la Chambre des représentants, Karim Ghellab, précisant que la quête de la performance reste un souci unanime alliant Parlement et gouvernement. Cette loi organique devra ainsi instaurer un nouveau cycle de travail où la priorité sera accordée à la qualité des débats, et donc au rendement législatif. « Nous avons traversé un mois difficile, mais réussi », tient à affirmer Ghellab, rappelant que la présence des députés à chaque commission, lors de la discussion du PLF 2013, a été très importante en dépassant la centaine. Un contrat de travail Un contrat de travail équitable et équilibré, c'est sur cette base que le prochain PLF devra être discuté. « Dès juillet, nous pourrions nous rencontrer avec le gouvernement pour une prise de connaissance des principales lignes du PLF, mais aussi des données à nous fournir », indique Said Khayroune, précisant que le PLF 2013 n'est pas le seul à avoir été voté à des heures aussi tardives (dimanche 25 décembre à 3h30). « Depuis jeudi, la commission des finances n'a pas cessé de travailler de jour comme de nuit, pour l'examen des amendements et l'adoption du premier volet du texte», rappelle-t-il. Et de souligner que la séance plénière d'adoption du PLF aurait pu se limiter à deux heures si la discussion des budgets sectoriels n'avait pas duré 12heures après le refus de certains groupes parlementaires de présenter des synthèses de 30mn maximum. La responsabilité de la gestion du temps appartient aussi aux députés. Une télé pour le marketing parlementaire Le président de la Commission des finances et du développement économique, Said Khayroune, est convaincu que la plus grande majorité du travail parlementaire n'est pas connue des citoyens. A part les deux séances ordinaires des questions orales des deux Chambres, le citoyen ignore ce qui se passe au sein des commissions où se déroule le plus gros du travail. « L'opinion publique a une idée fausse sur le député qu'elle croit avide d'intérêts personnels. Ce n'est pas vrai, car 99 % des travaux parlementaires sont invisibles », martèle Khayroune. La chaîne parlementaire pourrait bien corriger cette « idée fausse ». En tout cas, c'est ce que croit le président du groupe PPS, Rachid Roukbane, pour qui cette chaîne pourrait diffuser les travaux des commissions évitant que celles-ci dévorent la séance plénière habituellement diffusée sur la première chaîne. Le projet avance à pas sûrs, selon le président de la Chambre des représentants, Karim Ghellab. « Nous voulons améliorer l'existant et agir en complémentarité. Nous avons la volonté d'y arriver dans les meilleurs délais », promet-il. * Tweet * *