Un salarié est congédié de son poste sans motif apparent. Il demande alors sa réintégration avec paiement de ses salaires et cotisations à la CNSS, «perdus» depuis son licenciement. Qu'en dit la loi ? Et y a-t-il jurisprudence en la matière ? Le tribunal de première instance a exigé la réintégration de l'employée licenciée tout en lui accorant de bénéficier de son salaire et des cotisations de la CNSS. Il ressort des pièces du dossier N°335/5/1/2010 et de l'arrêt attaqué que la salariée Mlle Iman occupe le poste de chargée de clientèle au sein de la société K2S depuis le 2/12/2002 et qu'elle a été surprise le 13/07/2007, par la demande de son employeur, d'arrêter le travail sans qu'il lui soit pour autant permis de bénéficier de ses droits. La salariée considère que la décision de son employeur est abusive et elle demande auprès du tribunal sa réintégration dans son poste d'emploi. En sus, elle demande de bénéficier de son salaire et le paiement des cotisations de la CNSS depuis la date de son licenciement. Le tribunal de première instance exige de l'employeur de réintégrer Mlle Iman dans son poste, depuis la date d'effet du licenciement. Il lui permet en outre de bénéficier de son salaire et des cotisations de la CNSS. Sauf que la Cour d'appel n'est pas du même avis : elle considère que la salariée a le droit de réintégrer son poste sans qu'elle puisse bénéficier du paiement de son salaire et de ses cotisations. La salariée fait grief à l'arrêt attaqué pour les deux défauts de motifs et de base légale. Quelle est la position de la Cour dans cette affaire ? La salariée a-t-elle le droit de demander à son employeur le paiement de son salaire et des cotisations de la CNSS depuis la date d'effet de son licenciement ? La réintégration du salarié Souvent, la rupture du contrat est liée à la demande des dommages et intérêts. Néanmoins, le code du travail permet aux parties de la relation du travail d'éprouver une autre voie, à savoir la réintégration. La mise en œuvre de cette solution constitue un moyen pour remettre les pendules à l'heure et pour rétablir la relation du travail. Ceci dit, la réintégration du salarié dans son poste d'emploi revêt un caractère important soit dans le cas d'un licenciement individuel ou collectif. Le législateur exhorte le salarié congédié à recourir à la procédure de conciliation préliminaire devant l'inspecteur du travail et ce pour demander sa réintégration, comme il lui permet de demander en cas d'échec de la conciliation de demander au tribunal sa réintégration. (Voir Article 41 CT). Il exige en outre, en cas de licenciement collectif, que l'employeur qui envisage le licenciement de tout ou partie de ses salariés, pour motifs technologiques, structurels ou pour motifs similaires ou économiques, d'engager des concertations et des négociations avec les délégués des salariés en vue d'examiner les mesures susceptibles d'empêcher le licenciement ou d'en atténuer les effets négatifs, y compris la possibilité de réintégration dans d'autres postes. (Voir l'article 66 CT). Il s'avère que cette mesure revêt un caractère important car elle permet d'atténuer le chômage, notamment dans le cas d'un licenciement collectif et d'éviter les répercussions négatives du licenciement sur la vie des salariés. Les difficultés d'exécution Malgré l'importance de la réintégration pour l'économie nationale et le climat social, elle demeure improductive devant le refus ou l'exécution malsaine de cette mesure par certains employeurs. Ceci dit, l'inspecteur du travail, dans le cadre de la conciliation préliminaire, peut proposer aux parties du conflit cette solution. Néanmoins, son acceptation est tributaire du degré de la maturité et de la compréhension de ces derniers et de l'effort fournis lors de la conciliation. Le juge de fond traite les demandes de réintégration au cas par cas. Il n'ordonne pas automatiquement la réintégration du salarié dans son emploi, mais apprécie la demande de chaque salarié en fonction des situations et des circonstances qui lui sont présentées. En cas de refus de l'exécution de la décision du juge, le salarié doit engager un nouveau procès pour la demande des dommages et intérêts. La position de la Cour de cassation L'affaire précitée en haut suscite deux questions, à savoir la réintégration du salariée dans son emploi et la date d'effet de cette réintégration. La Cour de cassation considère que la décision du tribunal est motivée étant donné que l'article 41 du Code du travail permet au tribunal de choisir entre la réintégration et le dédommagement du salariée et qu'il ne prévoit pas son exécution depuis la date d'effet de licenciement. La Cour admet en effet la réintégration du salariée mais sans lui payer ni le salaire ni la cotisation à la CNSS. Elle précise en outre que le paiement du salaire est tributaire du travail effectif. L'intérêt de cette jurisprudence réside dans le fait qu'elle a mis fin à un débat sur la date d'effet de paiement de salaire et des cotisations de la CNSS et qu'elle permet de mettre le point sur la différence entre la nouvelle législation et l'ancien statut de 1948. Il découle de l'analyse de cette arrêt que l'ancienne législation était plus favorable en matière de réintégration que la nouvelle législation. Le statut de 1948 garde au salarié congédié injustement le droit de bénéficier de la réintégration à compter de la date de son licenciement tandis que le code du travail, lui, prive de cette date d'effet. * Tweet * *