Le Maroc a été élu à la vice-présidence du Mouvement des Non-Alignés(MNA) à l'issue du dernier sommet tenu en Iran il y a quelques jours. Youssef Amrani, ministre délégué aux Affaires étrangères et à la coopération, revient pour Le Soir Echos sur les principales actions qui vont marquer ce mandat. « Pour ce qui est du sommet de Téhéran, la délégation marocaine n'a pas manqué de défendre aussi bien les intérêts du Royaume que les objectifs et les idéaux du mouvement », souligne Youssef Amrani, ministre délégué aux Affaires étrangères et à la coopération. Quel bilan établissez-vous de la participation du Maroc au 16ème sommet du Mouvement des Non-Alignés qui s'est tenu en Iran ? Tout d'abord je tiens à rappeler que le Mouvement des Non Alignés, est le plus grand groupement multilatéral après l'Organisation des Nations Unies et que le Maroc, membre fondateur, a toujours contribué, de manière efficace et positive, aux travaux du mouvement. Pour ce qui est du sommet de Téhéran, la délégation marocaine n'a pas manqué de défendre aussi bien les intérêts du Royaume que les objectifs et les idéaux du mouvement dont notamment l'attachement à la souveraineté, le respect de l'intégrité territoriale des Etats membres, l'instauration de la paix et de la sécurité et le développement de la coopération. Le bilan est donc extrêmement positif dans la mesure où le Maroc a activement enrichi le débat interactif au niveau des Ministres des Affaires étrangères portant sur « la paix durable à travers une gouvernance mondiale commune ». Lors du Sommet, dont une partie de la séance de clôture a été présidée par notre pays, la délégation marocaine a reflété les questions et les préoccupations arabes et africaines, car il ne faut pas oublier que nous sommes le seul pays arabe, élu au nom du continent africain, qui siège actuellement au Conseil de sécurité. Concrètement, on a plaidé pour la construction d'un système équitable, inclusif, transparent et efficace de gouvernance mondiale pour faire face aux multiples risques et défis. Sur le plan bilatéral, j'ai tenu d'importantes réunions avec plusieurs chefs de délégations et homologues particulièrement d'Afrique et d'Amérique latine. Et sur la question du Sahara ? Nous avons saisi cette occasion pour expliciter, aux pays membres du Mouvement des Non-Alignés (MNA), les paramètres des résolutions du Conseil de sécurité sur lesquels devrait se fonder la solution politique du différend régional de la question du Sahara. Le Maroc a également réitéré son soutien aux efforts du Secrétaire Général de l'ONU visant à parvenir à une solution politique négociée au différend artificiel autour du Sahara marocain, et ce sur la base de critères bien définis appelant également l'ensemble des parties concernées à coopérer pleinement avec l'ONU et les uns avec les autres pour parvenir à ladite solution. Aujourd'hui, tout le monde constate la convergence qui existe entre les positions du Mouvement des Non Alignés et celles de l'Organisation des Nations Unis en ce qui concerne la nécessité pour les parties de continuer à faire preuve de la volonté politique et à travailler dans un climat propice au dialogue afin d'entrer dans une phase plus intensive de négociations. D'ailleurs, le document final et la déclaration du Sommet de Téhéran confortent la position du Maroc: la déclaration souligne, à deux reprises, le respect de l'intégrité territoriale et la non ingérence dans les affaires intérieures des pays, le document final met l'accent sur les développements survenus depuis 2006, et comme vous le savez, le Maroc avait soumis en 2007 l'initiative audacieuse d'autonomie qui avait permis de déclencher le processus de négociation. En outre, le même document, mentionne les 7 dernières résolutions consécutives du Conseil de sécurité sur le Sahara marocain qui mettent en valeurs les efforts sérieux et crédibles de notre pays. « Nous estimons que telle qu'elle se présente aujourd'hui, l'architecture de la gouvernance mondiale est appelée à s'adapter aux nouvelles mutations internationales afin de bâtir un monde prospère, harmonieux, juste et équitable. ». Quelles sont les résolutions majeures qui ont été prises par les dirigeants du Mouvement des Non-Alignés(MNA) lors de cette rencontre ? Alors que le monde connaît aujourd'hui, des mutations profondes et des bouleversements sans précédent, affectant non seulement les Etats individuellement, mais également la paix et la stabilité mondiales, la sécurité mondiale n'est donc plus liée aux seuls conflits armés ou à la menace terroriste, mais est désormais, et de plus en plus, liée à des origines économiques, sociales et environnementales. Partant de ce constat plusieurs résolutions ont marqué ce 16ème Sommet. Pour la première résolution qui constitue la base de ce mouvement, à mon sens, elle indique que les Etats membres du MNA doivent coordonner leurs positions et conjuguer leurs forces pour faire valoir les intérêts du monde en développement. Autre résolution toute aussi indéniable est que les Etats doivent s'acquitter de leurs obligations internationales dans la lutte contre la menace du terrorisme, qui continue de nuire à la paix, à la sécurité, à la stabilité et au développement de nombreux pays du MNA. Concernant la question palestinienne, l'accent a été mis sur le rétablissement des droits nationaux du peuple palestinien en tant que condition sine qua non de l'instauration d'une paix équitable, globale et durable dans la région. Le dialogue entre les religions, les cultures et les civilisations a suscité l'intérêt en ce sens qu'il devrait être renforcé, grâce à des soutiens déployés au niveau international, en vue de résorber toute confrontation, d'éliminer la xénophobie et l'islamophobie. A cela il faut ajouter que le thème de la conférence a permis à l'ensemble des délégations de souligner l'importance de mettre en œuvre une véritable gouvernance internationale au service de la paix et de la stabilité. Sur ce point précis, le Maroc a démontré que seul un modèle de gouvernance cohérent et rénové est à même d'apporter des solutions intégrées aux problèmes auxquels le monde fait face aujourd'hui. Il a appelé à une nouvelle dynamique interne nécessaire, pour faire des structures du Mouvement un incubateur d'idées innovantes et d'initiatives visant, particulièrement, à consolider la Coopération Sud-Sud, couvrant les domaines du commerce, des finances, d'investissement ainsi que les transferts de connaissance, de compétences et d'expertise technique entre les nations en développement. L'Iran qui organisait ce sommet a profité de l'événement pour appeler au soutien du MNA à son programme nucléaire controversé. Quelle est la position du Maroc sur ce dossier ? Partant du principe que le Traité de Non Prolifération (TNP) constitue la pierre angulaire du régime de non-prolifération et l'instrument clef pour la préservation de la paix et de la sécurité dans le monde, le Maroc a constamment appuyé, depuis la ratification du Traité en 1970, les décisions visant le renforcement du processus d'examen du TNP et les initiatives visant à renforcer l'autorité de ce régime et à promouvoir son universalité. La position du Maroc en matière de Non-prolifération et de Désarmement a donc toujours été de s'aligner sur les 3 piliers du Traité que sont: la réalisation du Désarmement nucléaire, général et complet; la Non-prolifération des armes et technologies nucléaires; et le Droit à l'utilisation pacifique de l'énergie atomique. Le Maroc a pris la vice-présidence du Mouvement des Non-alignés à l'issue de ce sommet. Quelles seront les actions que Rabat entreprendra sous ce mandat ? Il s'agit là d'une reconnaissance du rôle de Sa Majesté le Roi et d'une confirmation du statut privilégié du Maroc, acteur respecté et écouté sur le plan international. A l'instar de son action au niveau international et conformément aux principes et fondamentaux de sa politique étrangère, le Maroc continuera à plaider en faveur de la paix, de la sécurité, de la coopération et du développement. Nous allons œuvrer pour un modèle de gouvernance cohérent et rénové capable d'apporter des solutions intégrées aux problèmes auxquels le monde fait face aujourd'hui. Cet engagement ne peut, à terme, que consolider le poids économique et stratégique du Mouvement des Non Alignés et lui permettre de faire valoir ses intérêts et peser davantage sur l'échiquier international. Cependant, nous estimons que telle qu'elle se présente aujourd'hui, l'architecture de la gouvernance mondiale est appelée à s'adapter aux nouvelles mutations internationales afin de bâtir un monde prospère, harmonieux, juste et équitable. Comment va se passer la cohabitation avec l'Iran qui préside le mouvement étant donné que Rabat et Téhéran n'ont plus de relations diplomatiques depuis 2009 ? Au-delà de toute contrainte d'ordre bilatéral, le Mouvement est un forum multilatéral qui requiert la coordination entre l'ensemble des Etats membres. Dans tous les cas, le Maroc demeure déterminé à réaliser les objectifs du Mouvement. À votre avis, comment peut-on mettre à profit le MNA pour trouver une solution qui soit favorable au peuple palestinien ? La position du MNA est claire et constante en faveur du peuple palestinien, et comme je l'ai mentionné précédemment, cette question figure dans la déclaration finale du sommet. L'instauration d'une paix équitable, globale et durable dans la région nécessite la cessation de l'occupation et la reconnaissance du droit inaliénable du peuple palestinien à l'établissement de son Etat indépendant et viable avec Al-Qods al-Charif pour capitale. Sur ce point précis, la délégation marocaine a réitéré le soutien permanent à la cause palestinienne comme elle a rappelé l'engagement de Sa Majesté le Roi, en sa qualité du Président du Comité Al Qods pour défendre les droits du peuple palestinien frère. Et concernant le conflit syrien ? Comme nous l'avons toujours soutenu, l'issue de la crise syrienne passe par un règlement pacifique basé sur le dialogue politique, dans le cadre d'une transition démocratique, la réconciliation nationale entre l'ensemble des composantes de la société syrienne, ainsi que le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de la Syrie. Certes, on assiste aujourd'hui à un blocage au sein du Conseil de sécurité, mais la situation sur le terrain particulièrement sur le plan humanitaire interpelle la communauté internationale. A ce propos, j'ai profité de la tenue du Sommet pour informer les participants du rôle, de l'engagement et des initiatives du Royaume dont la dernière en date consiste en l'installation d'un hôpital marocain au profit des réfugiés syriens et ce, sur Hautes Instructions de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. * Tweet * *