Sur son baladeur numérique, Miloudi a 8105 morceaux qui, mis bout à bout nécessiteraient 30 jours d'écoute en continum pour en faire le tour. Autant de morceaux, patiemment collectés au fil des années, transférés amoureusement dans cette minuscule boîte qui tient davantage de la boîte d'allumettes que de celle des souvenirs, qui ont chacun à un moment donné marqué la longue vie de notre mélomane nomade ne voulant sacrifier ni sa musique ni sa liberté de mouvement. Il y a bien entendu les inconditionnels, qui imprègnent la mémoire quotidienne de Miloudi et il y a ces éclairs qui trouent le ciel du présent de leur lumière fugace inspirée par la météo du jour. S'ensuit alors une écoute en boucle jusqu'à satiété ou jusqu'à l'émergence d'un nouvel éclair, jamais prémédité, donnant à l'expérience une coloration éclectique assumée. Cette semaine fut donc algérienne. Hachemi Karwabi qui chante la nostalgie et Cheb Yazid avec son tube « Sabri, sabri » ont rythmé chaque instant, y compris dans son sommeil, de notre homme dans sa dimension d'oreilles sur pattes. Bénie soit cette invention se disait-il en regardant le minuscule boitier qui le suivait partout et qui le mettait à l'abri de la frustration engendrée par le manque. Où qu'il fût, il lui était possible d'accéder à n'importe quel morceau que l'instant lui suggérait. Un peu à l'image d'une baguette magique qui mettrait à la portée de celui qui la possède n'importe lequel de ses désirs, sans restriction… sauf en cas de panne de batterie. Dans ce cas, reste la mémoire qui, se transformant en homme-orchestre, retranscrivait quelques notes du thème rêvé dans une sorte de passerelle virtuelle qui le séparait du moment salvateur où la vraie musique l'envelopperait à nouveau de ses partitions.