Les hommes marocains sont éduqués de façon à multiplier leurs relations sexuelles. La mère et le père les encouragent même. Quand ils décident de se marier, dans la majorité, ils ne choisissent aucune de celles qu'ils ont fréquentées. Ils demandent plutôt à leur mère de leur choisir «Bent Nass» (une fille de bonne famille). Ce qui nous incite à poser la question : quels sont les critères de «Bent Nass» ? Est-ce celle qui n'a eu jamais de relations sexuelles avec des hommes ou celle qui a gardé sa virginité intacte ? L'on sait qu'il y a plusieurs façons de faire l'amour sans perdre la fameuse membrane». Le parler cru de la sociologue Soumaya Naamane Guessous laisse perplexes certaines personnes de l'assistance. Invitée samedi dernier par HEM (Institut des hautes études de management) de Casablanca pour animer une conférence sur «l'évolution des relations entres les femmes et les hommes dans la société marocaine» dans le cadre de son Université citoyenne, l'universitaire et auteur de «Au-delà de toute pudeur» pousse l'analyse plus loin. «J'ai demandé à plusieurs hommes quelle est la raison de vouloir une fille vierge ? La majorité a répondu : c'est pour ma mère. Ce qui prouve que le matriarcat pèse lourd dans notre société. Ils ont également répondu que la virginité est la preuve de la pureté de la fille», note la sociologue qui s'interroge encore une fois sur les critères d'une fille pure. «Si la pureté est liée à la virginité et à l'hymen, sachez qu'une fille peut très bien avoir plusieurs relations sexuelles sans perdre sa virginité. Sans oublier les différentes techniques chirurgicales qui existent aujourd'hui pour réparer et resserrer l'hymen comme à l'état vierge. Aujourd'hui, les chinois innovent et mettent en vente libre un hymen artificiel. Tiraillé entre la modernité et la tradition, l'homme se retrouve ainsi perdu. En fin de compte il ne sait plus si la fille est vierge ou pas». «J'ai demandé à plusieurs hommes quelle est la raison de vouloir une fille vierge ? La majorité a répondu : c'est pour ma mère. Ce qui prouve que le matriarcat pèse lourd dans notre société». ,ue la valeur d'une personne ne repose pas sur l'hymen, mais ailleurs. «Ne trouvez-vous pas injuste le fait d'évaluer les valeurs d'une personne uniquement sur cette membrane ?», s'interroge-t-elle. Dans son intervention, la sociologue a abordé également les causes des tensions dans le couple. Et ce qui attise la flamme de l'amour comme des mots d'amour. Toutefois, souligne-t-elle, les hommes marocains n'expriment pas leurs sentiments. Ils sont très rares ceux qui disent des mots mielleux du genre «je t'aime» ou «tu me manques» à leurs épouses ou partenaires. La tradition marocaine, toujours bien ancrée dans les esprits, désigne cette attitude de signe de faiblesse. Les femmes, assoiffées d'amour, de tendresse et d'affection, se sentent négligées. Place à la frustration. Ce qui crée des tensions dans le couple. « Exprimer des mots d'amour est un apprentissage. C'est une culture qui se construit. On ne peut pas exiger d'un homme de révéler ce qu'il ressent et à être doux avec son épouse ou sa partenaire alors qu'il a été éduqué depuis son enfance à se montrer dur. Un autre élément s'ajoute à cela qui complique davantage la situation. Si ce besoin d'amour et de tendresse chez la femme est inné et naturel, eh bien, il est exacerbé par les chaînes satellitaires. Celles-ci nourrissent le rêve du prince charmant dévoué pour sa dulcinée et qui la comble de tendresse et d'amour», analyse-t-elle. Soumaya Naamane Guessous poursuit son exposé en posant la problématique du retard du mariage chez les femmes notamment celles qui ont bien réussi leur émancipation. «Une femme qui a réussi son parcours scolaire et professionnel impressionne certes l'homme. Elle le séduit même. Mais, ce profil ne trouve pas mari car les hommes ont peur de ces femmes. Ils les rejettent quand il s'agit de mariage. L'homme marocain a beau crier modernité mais le traditionnel prend le dessus lorsqu'il s'agit de mariage. Son idéal de femme est sa mère, une femme au foyer et soumise. L'homme a peur surtout de perdre son pouvoir sur la femme et ses privilèges». En somme, la sociologue conclut son exposé : la société marocaine a connu une mutation rapide qui a provoqué un bouleversement dans les relations entre femmes et hommes, qui connaissent actuellement une crise de confiance.