Jeune initiateur d'AMC mode et véritable « activiste », Bechar El Mahfoudi tente de dynamiser le secteur de la mode marocaine et d'en faire une vitrine de modernité, accessible à tous. Discussion avec un « fédérateur », loin du glamour et des paillettes. Fondateur de FestiMode en 2006 et d'AMC mode (Association marocaine des créateurs de mode) en 2009, Bechar El Mahfoudi défend haut les couleurs de la mode marocaine. Conscient du « manque de crédibilité » des jeunes créateurs face à des industriels frileux, constamment en quête de « talents crédibles », Bechar El Mahfoudi met en relation les jeunes talents et les professionnels du métier. Il a récemment parrainé la future collaboration de Ghita Laskrouif avec la marque locale Flou Flou, une des premières entre créateur et industriel. Il a également signé une convention avec la Maison méditerranéenne des métiers de la mode (MMMM), importante passerelle entre la mode locale et celle du pourtour méditerranéen. Bechar El Mahfoudi a le mérite de contribuer à créer la mode, à défaut de la suivre. Rencontre. Une partie de la collection printemps-été 2012 de la marque Flou Flou vient d'être confiée à la jeune Ghitta Laskrouif, initiative parrainée par AMC Mode. Qu'en pensez-vous ? En règle générale, les industiels et les créateurs ne parlent pas la même langue, les premiers sont dans le pratique et imposent souvent des contraintes, alors que le créateur est dans une vision future et avant-gardiste. Entre Ghita et Flou Flou, il y a un équilibre, en termes de fashion business. Ghita est autodicate et s'est forgée une bonne expérience, grâce à ses multiples collaborations avec des experts internationaux, de multiples ateliers, et les rencontres faites ici. Il est vrai qu'elle réalisera des créations moins libres que ce qu'elle fait d'habitude, mais ses créations vont apporter beaucoup pour la mode marocaine. Les créateurs qui dessinent pour les marques locales sont souvent des étrangers. Ne trouvez-vous pas cela préjudiciable pour la mode marocaine ? Je ne dirai pas que c'est préjudiciable ; c'est de la valeur ajoutée. Il faut dire que les créateurs locaux ont du potentiel et de la créativité, mais ils leur manquent la crédibilité. Nous avons malheureusement ce regard valorisant vis-à-vis de l'expertise etrangère. La confiance vient de la démonstration, ce que nos jeunes, même talentueux, n'ont pas encore pu faire. Voilà pourquoi les industriels ont créé Casa Moda, pour générer une confiance en ces jeunes talents. Dans le cadre du concours euro-méditerranéen, un lauréat marocain bénéficiera, à partir d'avril prochain, de plusieurs résidences à l'étranger. Parlez-nous des ateliers qu'AMC Mode organise régulièrement. À AMC Mode, l'idée est donner des cursus courts, s'étalant sur quelques jours, avec des intervenants spécialisés ; des évènements qui finissement toujours par un happening. Malheureusement, tout le programme de formation n'a pas été achevé faute de budgets, la moitié ayant été faire grâce au soutien de l'ambassade d'Espagne, en 2010 et 2011. Il y a eu aussi les deux Nuits de la mode, un concept qui a regroupé les professionnels de la mode, blogueurs, créateurs jeunes et confirmés, et étudiants. Une bonne opportunité pour la rencontre et l'échange. Qu'en est-il du prochain atelier avec Saïd Mahrouf ? C'est le quatrième atelier de toute la série, et aussi une sorte de troisième nuit de la mode, dans le but de drainer les professionnels et les amoureux de la mode. C'est un atelier papier qui aura lieu du 21 au 24 novembre, et qui finira en une exposition aux Anciens abbatoirs, sur des mannequins en bois. L'idée, même si elle a déjà été exploitée ailleurs, est de créer des vêtements en papier mais d'une manière artistique. Quell genre de public drainent normalement les évènements mode que vous organisez ? Les évènements regroupent normalement les adeptes de l'art et les habitués de la mode, mais, avec l'élargissement actuel de la communauté mode et le développement de la presse dédiée, des blogs et d'un public plus pointu, les événements prennent plus d'ampleur. Que pouvez-vous nous dire sur la récente convention signée avec la Maison méditerranéenne des métiers de la mode ? En faisant partie de ce réseau euro-méditéranéen, nous bénéficions d'activités qui accompagnent nos créateurs. Les créateurs de mode, en manque d'initiatives les promouvant à l'extérieur, se verront impliqués dans des démarches d'encadrement selon des normes plus internationales. À titre d'exemple, dans le cadre du concours euro-européen, un lauréat marocain bénéficiera, à partir d'avril prochain, de plusieurs résidences à l'étranger, de façon à lui permettre de donner un coup de fouet à sa performance.