La Chambre allemande de commerce a organisé mardi à Casablanca un séminaire sur la nouvelle loi sur la protection des consommateurs. Une occasion d'insister sur l'urgence de la mise en place des décrets d'application, mais aussi de rappeler les lacunes juridiques qui entachent la loi 31-08. « Le diable se cache dans les détails » et les détails d'application de la loi 31-08 sur la protection des consommateurs se font toujours attendre. Pour mémoire, cette loi a été adoptée en janvier 2011 pour être publiée au Bulletin officiel en mai dernier. Censée informer le consommateur et lui procurer de quoi meubler le champ juridique, cette loi a certes marqué le pas. Néanmoins, l'unanimité se fait autour de son déséquilibre, et les lacunes juridiques l'accompagnant, ainsi que l'a précisé Me Mehdi Diouri, avocat au cabinet du même nom, notamment lors d'un séminaire sur la nouvelle loi sur la protection des consommateurs ; un séminaire organisé par la Chambre allemande de commerce, mardi à Casablanca. S'inspirant de la législation européenne (principalement allemande et française), le nouveau cadre juridique pâtit de plusieurs insuffisances, à commencer par la représentativité. Les associations de protection des consommateurs se trouvent dépourvues de tout poids réel, comme le souligne Diouri. Par poids, il est entendu le pouvoir de mener des actions en justice. « Or, cela suppose qu'elles aient la qualité d'utilité publique. Et les conditions exigées pour l'acquisition d'une telle qualité heurtent le bon sens et handicapent matériellement et humainement l'épanouissement des associations de protection des consommateurs », détaille l'expert. Ce dernier prévoit en fait l'apparition de nouvelles formes d'associations en ligne avec la dynamique observée au niveau des mouvements consuméristes dirigés essentiellement par les jeunes. S'agissant du corps de la loi, celui-ci prévoit neuf textes réglementaires dont les décrets d'application attendent toujours de voir le jour. Ce qui n'est pas sans remettre en question toute la machine de consécration de la culture de consommation attribuant au consommateur son pouvoir réel d'acteur économique averti et responsable. Ce retard se trouve doublé de l'absence sur terrain du Conseil supérieur de la consommation, lequel n'existe que théoriquement. « La composition, les attributions et le mode de fonctionnement de ce conseil… autant d'interrogations qui interpellent – et à maints égards », souligne Douiri. Un consommateur actif… Avant de pointer du doigt le manque de cohérence entre les différents organes chargés de la protection des consommateurs. Le rôle du Conseil de la concurrence et le champ de compétences dans lequel il opère est significatif à cet égard. « Personnellement, je me demande si ce Conseil est véritablement actif. Pour qui ?pourquoi ? », s'interroge-t-il. Autre faille juridique, la loi 31-08 n'évoque pas la protection contre les risques professionnels menaçant la santé des consommateurs, le droit à une protection de leurs intérêts sanitaires, alimentaires et environnementaux, ou encore leur droit à la réparation du préjudice subi. Une tâche, paraît-il, laissée au soin du droit commun ; en l'occurrence le droit civil, bien que l'on enregistre peu de choses sur ce compartiment du droit privé : « Des sanctions pour intoxication alimentaire ? Je n'en vois pas! Encore moins des sanctions lorsqu'il s'agit de produits périmés étalés sur les rayons de magasins », fait-il remarquer. À ses yeux, le volet sécuritaire et sanitaire est la première levée de bouclier qu'il faudrait opérer dans le cadre de ces innovations juridiques, au lieu de se focaliser sur les crédits à la consommation et immobiliers. À eux seuls, ces deux chapitres accaparent plus de 60 % des 206 articles que compte la loi. Une attitude « non appréciée », « comme si le crédit était une fatalité pour la société marocaine », se désole l'expert. Ce dispositif juridique « éparpillé », censé faire passer le consommateur du statut de passif (victime) à celui d'actif (partenaire), ignore totalement la question du contrat d'adhésion. Un contrat dans lequel l'entreprise impose le contenu contractuel au client. Par la force des choses, le consommateur adhère au contrat qu'il n'a pas négocié, conclut Douiri. Les réserves 1- L'entrée en vigueur dépend de l'adoption des textes réglementaires : L 'obligation générale d'information mise à la charge des professionnels ; L'information sur les délais de livraison ; Les opérations de démarchages ; Les loteries publicitaires ; Le crédit à la consommation. 2- Les obligations de mise en conformité avec les nouvelles dispositions légales : Les contrats d'abonnement à durée déterminée ; La protection des consommateurs contre les clauses abusives ; Le crédit à la consommation.