L'Organisation marocaine des droits humains sort de son mutisme. Après avoir condamné l'éventuelle extradition d'un présumé trafiquant, voilà que l'OMDH s'attaque aux officiers de la DST. L'OMDH refait parler d'elle, après à une longue mise en veille due à la nomination de sa présidente, Amina Bouayach, au sein de la commission chargée de réformer la Constitution. Dans un communiqué publié mercredi, l'OMDH a demandé que le travail des services de renseignement (DST) soit «contrôlé» et «transparent». L'association admet tout de même que «l'octroi du statut d'officier de la police judiciaire aux fonctionnaires de la DST va sans doute limiter l'impunité de ceux qui sont soupçonnés de torture et de détention illégale», peut-on lire sur le communiqué. Mais cela ne suffit pas aux compagnons de Bouayach puisque son organisme prétend que cet octroi doit «s'accompagner d'un code de conduite pour un fonctionnement transparent de la DST et la possibilité pour le Parquet d'effectuer des visites de contrôle impromptues dans ses locaux », ajoute le texte. Projet de loi jugé insuffisant La semaine passée, un projet de loi avait été émis par la majorité concernant ce même sujet. Ce projet accorde aux fonctionnaires de la DST le statut d'officier de la police judiciaire. L'opposition avait d'ailleurs émis des réserves vis-à-vis du projet de loi, le jugeant insuffisant. Par ailleurs, l'association d'Amina Bouayach, proche des milieux socialistes, avait exhorté le Maroc à ne pas extrader Djamel Ktiti, un Franco-Algérien accusé de trafic de drogue, dans son pays d'origine. L'OMDH craint, en effet, que ce natif de Saint-Etienne soit torturé à mort par les sécuritaires algériens. Dépassée sur le terrain par l'AMDH de Khadija Ryadi, la principale association des droits humains au Maroc, l'OMDH tente de se refaire une place dans l'échiquier droit-de-l'hommiste marocain. 3 QUESTIONS À … Amina Bouayach, présidente de l'Organisation marocaine des droits humains (OMDH) « Fixer les attributions de la DST » Pourquoi considérez-vous que l'octroi du statut d'officier de la PJ n'est-il pas suffisant ? C'est important que le corps de la DST soit sous le contrôle de la Justice, mais ce n'est tout de même pas suffisant. Il faut en plus de cela un code déontologique et comportemental, ainsi qu'un code qui détermine les attributions de chacun des officiers. Il faut qu'ils soient totalement soumis au Parquet. Nous sommes prêts à donner nos observations ainsi que nos recommandations. Nous souhaitons aider la Justice à préparer la transition d'un corps sous la tutelle du Parquet. Tout cela bien-sûr dans le cadre de la gouvernance sécuritaire. Vous avez récemment condamné l'éventuel extradition en Algérie du Franco-Algérien accusé de trafic de drogue par crainte qu'il soit torturé. Pensez-vous qu'il serait mieux traité au Maroc ? Premièrement, le Maroc l'a arrêté car il y avait un mandat d'arrêt international émis par l'Algérie. Le Maroc n'a aucune accusation contre lui, le Maroc doit donc être soumis à la décision du Comité contre la torture. De plus, tous les éléments nous font croire que Djamel Ktiti serait torturé à mort dans le cas où il serait extradé en Algérie. Notre souhait est que le Maroc protège quelqu'un qui d'après toutes les organisations serait voué à la torture. Mais je pense que les choses sont en train d'évoluer positivement. À quelques semaines des législatives, quel sera le rôle de l'OMDH lors de ces élections ? Notre rôle sera, comme en 2007, un rôle d'observation. En plus de notre observation qualitative, nous souhaitons mettre en place une observation dite populaire. Nous allons lancer un site, officiellement, fin octobre. Le site s'intitule www.marsad.ma, celui-ci existe déjà mais seulement à sa phase de test. Le jour de son lancement officiel, nous allons le valider avec des experts internationaux. Sur le plan technique, l'accès sera plus facile pour tout le monde. Jusqu'à maintenant, je suis heureuse par rapport à la réaction des visiteurs du site. Plus de 6 000 personnes ont d'ores et déjà donné leurs observations et informations sur les élections. À travers ce site, nous souhaitons développer une sorte de démocratie participative, en faisant participer un public plus large à notre vie politique, notamment ceux qui utilisent les nouvelles technologies de l'information.