La polarisation de la scène politique est le moyen idoine pour en finir avec l'éclatement de la carte partisane. La création d'une coalition de huit formations est un pas vers cet objectif. Mais qu'en est-il réellement ? Sommes-nous en train de nous acheminer vers une polarisation de la scène partisane ? L'annonce, mercredi à Rabat de la création d'une coalition de huit partis laisse entrevoir cette perspective. Cet espoir ne date pas d'hier, il remonte en fait à 1995, lorsque feu Hassan II avait exprimé devant le Parlement son vœu de voir se constituer, au Maroc, trois pôles : droite, centre et gauche. L'expérience du gouvernement de l'Alternance (1998-2002) avait mis en sourdine cette perspective. Le contexte politique de l'époque n'y était guère favorable. A quelques semaines de l'échéance du 25 novembre, l'initiative du RNI, du MP, du PAM et les autres, en dépit de nombre d'interrogations qu'elle suscite a, au moins le mérite de secouer les autres structures partisanes et de les inciter à s'inscrire dans une démarche similaire. Chez le PAM, l'heure est plutôt à l'euphorie. « Depuis que j'ai intégré cette formation, je suis convaincu que le PAM est capable de rassembler les forces partageant une part de libéralisme, de démocratie et de modernité. Le PAM a parfaitement joué ce rôle », estime Mustapha Merizak, secrétaire régional du parti du Tracteur à Meknès. Sur un ton différend, le politologue Mohamed Darif explique que l'enjeu est ailleurs et que les rôles ont plutôt changé, à la faveur d'autres formations politiques. « Au lendemain des communales de 2009, le PAM incarnait déjà le rôle de parti régulateur afin de circonscrire l'influence du PJD. Avec la variable du mouvement du 20-Février, nous assistons actuellement à la montée du RNI. Et c'est cette formation qui assume, désormais, cette responsabilité ». Avec cette nouvelle coalition, « nous nous acheminons vers la constitution de deux pôles : le premier est libéral, avec une fibre sociale et un discours moderniste, alors que le second dépend de la volonté des partis de la Koutla, soit un mélange de progressisme socialiste et de conservatisme», ajoute-il. Nombreux sont ceux qui partagent ce ton interrogatif de notre interlocuteur sur la capacité de la Koutla à se repositionner en tant qu'un véritable acteur politique, comme ce fut le cas au début des années 1990. Certains, au sein même de l'USFP, estiment que la mission de la Koutla a pris fin avec la formation du gouvernement de l'Alternance dirigé par Abderrahman El Youssoufi. Une lecture à laquelle El Habib Malki, membre du bureau politique de l'USFP, ne souscrit pas. Dans de précédentes déclarations au Soir échos, il avançait que, « aujourd'hui, la société marocaine a besoin de stabilité pour réussir les réformes. La Koutla rénovée, en tant que pôle stabilisateur dans le changement, peut et doit remplir cette mission ». Un vœu pieux, tant les différences entre les composantes au sein de la Koutla sont criantes. L'épisode du seuil des législatives a montré le fossé abyssal séparant l'USFP et l'Istiqlal du PPS. Alors que les deux premiers faisaient campagne pour une barre d'au moins 6 %, le PPS s'est retrouvé isolé. Seuls quelques petites formations l'ont fortement soutenu dans sa demande de fixer le seuil à 3 %. L'isolement des PJDistes est sur les rails. Même s'il arrivait premier lors des législatives du 25 novembre prochain, il serait difficile pour les frères de Benkirane de constituer une majorité à moins d'un mariage avec les trois composantes de la Koutla. Les islamistes peuvent certes compter sur le soutien de quelques Istiqlaliens conservateurs, mais à l'USFP, les choses ne s'annoncent guère faciles. Le rapprochement initié, début 2008 et fin 2009, entre Driss Lachgar et Mustapha Ramid, s'est brusquement arrêté avec la nomination de l'USFPéiste au poste de ministre des Relations avec le Parlement (remaniement de janvier 2010). Depuis, le PJD est à la cherche des partenaires. En vain.