La prochaine loi de finances étant prévue le 20 octobre prochain, les impératifs du calendrier électoral fixé au 25 novembre, pourraient mettre en porte-à-faux le prochain gouvernement. Décryptage. Une première mondiale ! Détrompez-vous, ce n'est nullement d'une invention technologique révolutionnaire qu'il s'agit, mais d'une situation inédite que le Maroc s'apprête à affronter les mois prochains : deux gouvernements pour une même loi de Finances ! Elections anticipées obligent, les dates ont été chamboulées ainsi que les agendas. Salaheddine Mezouar, ministre de l'Economie et des finances aura, de ce fait, une équation difficile à résoudre. Car au-delà de sa marge de manœuvre très limitée à contenir le déficit budgétaire et à boucler son budget de cette année, il aura à gérer, dans les prochains mois, un circuit compliqué pour l'adoption dans « les normes constitutionnelles » de la loi de Finances 2012. Interrogé quant à cette situation insolite, Mohamed Najib Boulif, membre du conseil national du PJD nous déclare que la résolution de cette équation dépendra étroitement de choix politiques et non de choix procéduraux. A en croire Boulif, ce n'est pas un réel problème, à condition qu'un choix politique bien réfléchi et volontaire soit appliqué. Pour saisir la complexité de l'équation présentée à Mezouar, il conviendrait, néanmoins, de rappeler le circuit de la loi de Finances au sein du Parlement. En effet, une fois que Mezouar livrera le budget au Parlement avant le 20 octobre – un délai imposé par la Constitution -, il le présentera devant la Chambre des représentants qui débutera la discussion du texte et les budgets sectoriels avec le gouvernement El Fassi. Une fois adopté, le budget sera ensuite transféré à la Chambre des conseillers. Celle-ci le discutera avec le prochain gouvernement et avec un nouveau ministre des Finances. Après son adoption, le budget sera renvoyé à la Chambre des représentants pour une deuxième lecture. Et c'est là que le bât blesse ! Plusieurs interrogations vont être soulevées. Une loi de Finances refilée à un gouvernement qui ne l'a même pas décidée pourrait générer une crise politique débouchant sur une crise économique, si, par exemple, le gouvernement El Fassi prenait des décisions compromettantes pour son successeur. Question budget, le prochain gouvernement aura du pain sur la planche et plusieurs défis à relever. A cause des 11 milliards de dirhams du dialogue social, la masse salariale atteindra 97 milliards de DH contre 86 milliards prévus dans le budget en cours. Ensuite, la caisse de compensation terminera l'année en dépassant les 40 milliards de dirhams contre 17 milliards prévus dans la loi de Finances 2011. Résultat, 34 milliards de dirhams plomberont le déficit budgétaire de l'Etat en cette fin d'année. Un lourd fardeau dont héritera le prochain gouvernement ! Face à cette situation, Boulif ainsi que plusieurs observateurs sondés proposent un report du vote de la loi de Finances 2012. «Cette question d'ordonnance n'est pas nouvelle et a déjà été opérée sous l'ère de l'alternance en 1998. », nous rappelle Boulif. Ce dernier propose le mois de décembre comme date du vote du prochain budget. D'ailleurs, la nouvelle Constitution, dans son article 75, a prévu cette option de report. Un scénario qui revient avec persistence, reste à voir ce que le gouvernement El Fassi décidera.