Marcel Khalifé est l'un des grands maîtres du luth arabe et du lyrisme puissant. Militant audacieux et poète sensible, il incarne l'aura libanaise par excellence, longtemps forgée par les conflits. A découvrir avec ferveur mercredi soir au Festival de Casablanca. Virtuose du oud et compositeur de génie, Marcel Khalifé est constamment à la recherche du non-dit. Né au Liban, il est auteur de textes courageux et de compositions versatiles. Sa lutte incessante contre les ingérences étrangères pendant la guerre du Liban l'ont propulsé au devant de la scène engagée. Fervent supporter de la cause palestinienne, il a su rallier la population arabe à sa cause, et la sensibiliser à sa musique poignante. Sa maîtrise du luth arabe et sa capacité à repousser les frontières classiques de la composition lyrique ont forgé son succès international. Son art est une caresse vocale, un poème frontal et un combat sans compromis. Marcel Khalifé a débuté comme soliste et oudiste dans les années 70, puis s'est tourné vers la musique chorale, les bandes sonores et la musique d'orchestre. Auteur de plusieurs œuvres purement instrumentales comme la Symphonie du Retour, Sharq, Concerto Al Andalus, Mouda'aba ou Caresse, et Taqasim ou Traits, il est compositeur de 17 albums et de musiques de films réalisés par d'éminents metteurs en scène libanais et arabes. Il a surtout participé à d'innombrables festivals prestigieux au monde et collaboré avec des orchestres internationaux majeurs notamment l'Académie de l'orchestre de Boulogne Billancourt, la Chambre d'Orchestre de San Francisco, l'Orchestre philharmonique de Liverpool et d'Italie et tant d'autres. Adulé pour ses chansons poétiques populaires, il a été le porte-parole des heures troubles pendant les années de guerre au pays du Cèdre et dans les territoires palestiniens occupés. Porte-voix de compositions éclectiques, sa musique brasse inflexions arabes authentiques et rythmes swing jazz et tango, et son talent survole les contrées arménienne, andalouse et latino-américaine. Accompagné de son orchestre El Mayadine depuis 1976, dont le nom évoque aussi bien «une place de village» qu'un «champ de bataille», les sons de sa troupe cumulent qanun, mandoline, ney (flûte arabe), clarinettes, accordéon, violons et violoncelle. Soutenu par des musiciens hors pair (contrebasse jouée par Peter Herbert, percussion par son fils Bachar, et piano par son fils Rami), il forme également un duo avec la talentueuse chanteuse libanaise Oumayma Khalil. Il a également longtemps accordé ses violons avec le luthiste Charbel Rouhana, autre fidèle compagnon de route. A ce propos il déclare : «Nous, les Arabes, connaissons mal l'histoire de notre musique. Nous l'avons surtout vue sous l'angle de la chanson, le temps est venu d'aller plus loin». L'autre ami de longue date du compositeur n'est autre que feu le poète palestinien Mahmoud Darwiche dont il adapte souvent les textes dans sa musique. Disparu en 2008, les textes de ce frère musulman s'adaptent merveilleusement aux partitions de ce chrétien maronite. Les deux monstres sacrés ont un vécu lourd d'espoirs perdus et de déchirures, et le cristallisent brillamment dans un patrimoine arabe commun. Tagasim, fin 2006, est un hommage instrumental au poète défunt, et est une des œuvres les plus audacieuses et abouties de l'artiste. Adulé pour ses chansons poétiques populaires, il a été le porte-parole des heures troubles pendant les années de guerre au pays du Cèdre et dans les territoires palestiniens occupés. Nommé par l'Unesco «artiste de paix », il a longtemps entonné la cultissime «Ila Haifa,» ou «A Haifa», en hommage aux souffrances du peuple palestinien. Profondément humain, il a longtemps transmis des messages de paix, d'humanité et de justice, tout en chantant la femme et l'amour. Porte-voix des martyrs, des détenus dans les prisons arabes et des exilés, chacune de ses chansons est inscrite dans la mémoire collective. Ses œuvres inclusent les populaires «Rakwet Arab,» or «Arabic Coffeepot», un morceau célèbre de 1996 et les instrumentales «Marassi,» ou «Correspondances», «Touroukat wa dajij» or «Routes et bruit», «Fi Bali Oughina» ou «Une chanson dans ma tête», ou encore «Jawaz Safar» ou Passeport et la bouleversante «Oumi» ou «Ma mère». «L'ennemi ne peut pas nous forcer à chanter ce qu'il veut, dit-il, nous ne devons jamais arrêter de chanter pour la paix et l'entente». Rebelle charismatique et poète du peuple, il incarne l'audace subtile des guerriers sans armure. Ceux aux premiers rangs. A ne pas manquer mercredi soir.