La situation sociale, économique et politique de notre pays ressemble à un casse-tête chinois, tant par sa complexité que par ses contradictions. La marmite du 20 février se tiraille entre les divers ingrédients qui la composent et on découvre que ce mouvement, qui semblait spontané, obéissait à une plate-forme commune avec un agenda politique destiné à promouvoir une monarchie parlementaire et à disqualifier des personnalités physiques ou morales qui constituent, aux yeux du peuple, des proies faciles car identifiables et considérées comme influentes. A ce bouillonnement, se greffent des revendications sociales de tous bords faisant dire à l'humour légendaire de nos compatriotes, « qu'aujourd'hui, lorsqu'un un mari est privé d'exercice du devoir conjugal, il organise une manif ». On a pu aussi entendre, samedi dernier, des supporters reprenant en chœur, lors d'un match désormais légendaire, un « Achaab Yourid tlata lzéro » Le gouvernement, lui, sort et range sa matraque, adoptant une attitude illisible face à la rue, et signe quantités de chèques en blanc pour s'acheter une paix sociale très relative tout en endettant la collectivité, en ralentissement les investissements publics (principal moteur de la croissance actuelle) et en hypothéquant la compétitivité des entreprises. La confusion des actions du gouvernement s'accentue quand sa voix est portée par un Khalid Naciri dont la verve n'a d'égal que le déficit d'analyse de la situation qui, il est vrai, reste complexe. Pendant ce temps MM. Moattassim et Mennouni nous ont concocté une nouvelle constitution que nous serons appelés à ratifier ou non, sous peu, et qui répondrait largement, selon les dires des rares privilégiés y ayant eu un accès sommaire, aux principales revendications exprimées par les partis politiques et la société civile. Les désignés à la vindicte populaire connaissent, pour leur part, des destins à symétrie variable. Fouad Ali El Hima jette l'éponge, Mounir Majidi se fait discret tout en réussissant son festival et en poursuivant le projet de déconnexion du patrimoine royal des secteurs matures de l'économie nationale qui, il faut rendre à César ce qui lui appartient, fut annoncée bien avant les remous du printemps arabe. Certaines concessions de services publics jettent l'éponge et d'autres se défendent becs et ongles face aux accusations. Moncef Belkhayate, victime d'une sortie malheureuse sur le Mouvement du 20 février, se fait largement pardonner grâce à la superbe victoire du Onze national face à son rival algérien. Les Marocains se questionnent, s'interpellent, s'invectivent, adaptant leurs opinions au gré des évènements, des informations et des analyses contradictoires. Dans tout ce brouhaha, les Marocains se questionnent, s'interpellent, s'invectivent, adaptant leurs opinions au gré des évènements, des informations et des analyses contradictoires et abondantes qu'ils suivent ou produisent assidûment. Ils se demandent si Rachid Niny est vraiment un criminel de droit commun, si le 20 février est aux mains de salafistes dangereux ou de trotskistes mécréants, si la démocratie est finalement une bonne voie ou s'il ne faudrait pas laisser le système en l'état qui, depuis plus d'une décennie, fait quand même du bon boulot. Tant de questions sans réponses, des rumeurs qui fusent de toutes parts sur les intentions des uns et les actions des autres au sein d'une population pleine d'espérance qui vit une transition démocratique pacifique dans l'attente d'une facture financière qui s'annonce onéreuse ! Le Maroc vit une période étrange ou tout le monde pressent que le voyage vers la démocratie est en marche et chacun commence à mesurer le poids des responsabilités individuelles et collectives. L'ampleur de la charge pour conduire une nation et diriger un Etat entre-apparaît pour la première fois aux yeux de tous. A nous de rendre hommage à notre souverain pour l'avoir, jusque-là, totalement assumé tout en impulsant, et avec quel brio, un nouvel élan de civilisation pour notre pays. RYAD MEZZOUR