Clôture des Assises nationales de l'IA : le Maroc trace les fondements d'une souveraineté numérique durable    L'Office des changes dévoile à Casablanca les grandes lignes de sa stratégie 2025-2029    Bourse de Casablanca : clôture en hausse    Espagne : Comme en 2023, Sumar oublie le Polisario dans ses négociations avec le PSOE    Vigilance, réactivité et sens aigu du temps réel : les services sécuritaires marocains déjouent toute velléité terroriste    La finale de la Coupe du monde des clubs pourrait se jouer à 9h du matin    Officiel : Hamdallah rejoint Al-Hilal en prêt    Mondial des clubs : Hakimi et Bounou dans l'équipe type des 8es de finale    Mauritanian and Algerian armies meet in Tindouf after Polisario attacks on Es-Smara    Vague de chaleur avec chergui et fortes averses orageuses, de mercredi à samedi dans plusieurs provinces    Sur Hautes Instructions Royales, la Fondation Mohammed V pour la solidarité met en service 13 nouveaux centres dans différentes villes du Royaume    Guercif. Démantèlement d'un réseau d'escrocs    UNESCO: Marruecos reelegido en el consejo ejecutivo de la Comisión Oceanográfica Intergubernamental (COI)    Morocco re-elected to UNESCO's Intergovernmental Oceanographic Commission for 2025-2027 term    Presse : le délai de dépôt des demandes de l'aide publique prolongé jusqu'au 30 septembre    Archéologie. La Côte d'Ivoire se dote d'un musée    Le Maroc veut devenir un leader africain du gaming, soutenu par Yoshiki Okamoto    "Meqbouline, les hôtes de Toumliline" : une expérience unique de coexistence interreligieuse    Immersive Fintech Day by Attijariwafa bank & KPMG: les fintechs marocaines à l'honneur    Transmission monétaire : le crédit en retrait malgré l'abondance de liquidités    Nucléaire iranien : Téhéran suspend sa coopération avec l'AIEA    Eliesse Ben Seghir, nouvelle cible de l'Atlético Madrid    U20 (F) – Amical : Les Lioncelles confirment face au Bénin    Feu Mohamed Benaïssa désigné personnalité de la 20e Foire internationale du livre d'Alexandrie    Musique : « Den Den », le cœur de Tawsen bat la chamade !    Nostalgia Lovers : Casablanca replonge dans la fièvre rétro du 3 au 6 juillet    Renforcement du partenariat stratégique entre le Maroc et la Chine au cœur d'une rencontre diplomatique de haut niveau à Paris    Tanger: Le groupe allemand "ZF LIFETEC" inaugure une nouvelle usine de production de systèmes de volants    Renforcement de l'alliance défensive entre le Maroc et les Etats-Unis ouvre la voie à un partenariat stratégique plus profond    Le Maroc obtient une technologie tchèque de génération d'eau atmosphérique    La Fédération saoudienne du commerce rencontre le quatuor Benali-Zidane-Mezzour-El-Bouari, les échanges entre Rabat et Ryad évalués à 1,33 milliard de dollars en 2024    L'ambassade de Chine au Maroc lance le concours « La Chine à mes yeux » et invite les jeunes à participer    Larache : décès d'un détenu impliqué dans l'affaire de la "cellule de Chamharouch"    Relever les défis du développement social requiert une vision régionale et internationale unifiée    Le voilier russe Kruzenshtern fait escale au port de Casablanca pour les 80 ans de la victoire soviétique sur l'Allemagne nazie    Nadia Hai : Une Franco-Marocaine au cœur des enjeux méditerranéens    UE : Les énergies renouvelables, principale source d'électricité en 2024    Maroc : Mohamed Boudrika condamné à 5 ans de prison    Le Polisario apparaît comme nouveau vecteur de déstabilisation téléguidé par l'Iran, selon The Telegraph    Le Maroc et l'Azerbaïdjan approfondissent leur concertation dans les domaines sociaux    Les prévisions du mercredi 2 juillet    CAN féminine (Maroc-2024): « les joueuses ont hâte d'entamer la compétition » (Jorge Vilda)    CDM 2025 : Dortmund défiera le Real en quarts    El Jadida : Le nouveau procureur du Roi sonne la charge contre les entorses à la sacralité de la Justice ...!    El Jadida : Le Parc Mohammed V, un joyau en péril, attend sa renaissance !    France : Plusieurs vols annulés jeudi en raison d'une grève des contrôleurs aériens    Sahara : Pour freiner la dynamique marocaine, l'Algérie promet 1 MM $ aux pays africains    Syrie : Un parti appelle le président Al-Charaa à désigner le Polisario une organisation terroriste.    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Benotman et Guemriche dans le Dictionnaire des Personnages populaires de la littérature
Publié dans Le Soir Echos le 02 - 06 - 2011

En introduction au foisonnant Dictionnaire des personnages populaires de la littérature des XIXe et XXe siècles par 100 écrivains d'aujourd'hui (Seuil, 2010), les directrices d'ouvrage, Stéfanie Delestré et Hagar Desanti préviennent: « la raison nous a commandé de concentrer notre aire de recherche sur l'Europe occidentale et l'Amérique du Nord ».
Ce parti-pris s'explique certes par la nécessité de concocter un ouvrage maniable par les lecteurs, et ce dictionnaire, dans les limites qu'il respecte, atteint déjà près de 800 pages qui se fréquentent avec allégresse.
On y retrouve la Esmeralda de Victor Hugo et le Robinson Crusoé de Defoe, le Martin Eden de Jack London, dont Driss Chraïbi avait composé une adaptation radiophonique pour France-Culture, la Folcoche de Vipère au poing, le fameux roman d'Hervé Bazin, le grand Meaulnes d'Alain-Fournier et le James Bond d'Ian Fleming, mais aussi Emma Bovary dont Gustave Flaubert disait : « c'est moi », la Lolita de Vladimir Nabokov et le commissaire Maigret de Simenon.
Tous ces personnages et une foule d'autres sont réenchantés sous la plume d'écrivains d'aujourd'hui. L'une de mes joies de lecteur du Dictionnaire des personnages populaires de la littérature des XIXe et XXe siècles, aura été d'y retrouver un auteur singulier et attachant, Abdel Hafed Benotman en portraitiste de Spartacus, celui-là même qu'Arthur Koestler présentait ainsi : « Spartacus descendait d'une famille de pâtres nomades : il était né dans une petite bourgade d'où il tirait son nom. Il était sans éducation première, mais possédait au plus haut point le don d'absorber toutes les leçons, d'en contrôler la valeur et de les transformer immédiatement en actes ».
Benotman l'évoque avec un grand lyrisme, lui que l'éditeur présente comme « écrivain français longtemps sans-papiers » et dont je vous disais il y a plusieurs mois le charme puissant qu'il avait su donner à son roman Eboueur sur échafaud (Rivages,2009). Benotman interroge le « crime» de Spartacus et l'énonce ainsi : « Avoir métamorphosé la cruauté des armes, pour le plaisir sanglant des puissants, en fraternité des armes pour la liberté et la dignité des plus pauvres ».
Ne reculant devant rien, comme à son habitude, car Benotman est un réfractaire-né, il émet une audacieuse hypothèse : « Jésus-Christ lui-même, soixante et onze ans plus tard, a peut-être calqué son amour du genre humain sur le respect que Spartacus avait pour l'autre… On peut rêver et le croire. Spartacus, un Christ avant l'heure ? »
Un autre écrivain dont je vous ai déjà vanté le talent, le lexicologue Salah Guemriche, auteur du quasi-fameux Dictionnaire des mots français d'origine arabe (Seuil, 2007) s'est penché, lui, sur la figure de Meursault dans L'Etranger d'Albert Camus. Son analyse débouche sur une proposition audacieuse à partir du fait qu'« un grand lecteur, Edward Saïd, refusa, lui, de voir dans L'Etranger, une parabole de la condition humaine. Pour l'intellectuel américano-palestinien, qui replace le roman dans son contexte (l'Algérie coloniale), Meursault est le type de « personnage sans histoire», évoluant « dans un cadre qui (…) paraît fortuit, sans rapport avec les graves problèmes qu'il pose ». Autant dire que Meursault serait lui-même un personnage fortuit ? Fortuit, parce que absurde ? « Le soleil tue les questions », en effet. Et la mer serait là pour les noyer… Mer, soleil ; mère sol. Oui : et si tout Meursault, demande Guemriche, était dans Albert Camus, comme un « extrait » d'auteur ? Littéralement : toutes les lettres de Meursault sont contenues dans Albert Camus ».
Que cette hypothèse ne nous éloigne pas pour autant de Tartarin de Tarascon qu'Alphonse Daudet dépeignit tenant d'une main un livre tandis que, « de l'autre il brandissait une énorme pipe à couvercle de fer ». Jean-Pierre Jody le définit dans une impitoyable entrée comme « un gros couillon boursouflé de cette bêtise joviale et naïve, tantôt attendrissante, tantôt redoutable, qui laisse le regard en suspens entre la compassion et la moquerie. De ces consciences tranchées, aux certitudes définitives, dont on ne peut jamais savoir si elles vont produire le meilleur ou le pire ».
Une sorte de mélancolie, malgré les sourires, les émois et les trophées, nimbe ce Dictionnaire… aux vastes ressources car, ainsi que l'explique l'écrivain et psychanalyste Michel Schneider : « les mythes et leurs héros sont immortels, mais les romans et leurs personnages non. Humbert et Lolita mourront. Chacun de ce qu'il avait voulu fuir : elle la maternité, synonyme de devenir adulte, lui une maladie du cœur, l'autre nom d'une peine d'amour ».
Les derniers mots du roman ? « Ma Lolita. » Le cercle se referme. Mais sur quoi ? Sur qui ? Sur le temps. La vie qui a passé si vite et a effacé les êtres dont ne reste que le nom. Car, souvenons-nous que Tartarin, dont le nom vient du bavardage hâbleur (en arabe) est celui, Jody nous le rappelle, qui n'a jamais quitté sa ville, et « ira, à reculons et poussé par aiguillon de la vanité, traquer une proie digne de lui : le lion d'Algérie. Pour n'y tuer qu'une vieille bête aveugle et apprivoisée ». A vous d'apprivoiser ce Dictionnaire bien vivant et passionnant.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.